Engagées envers la communauté artistique, les deux organisations arrivent à créer une véritable synergie et à rassembler à Québec le meilleur de l’art actuel au cœur de l’hiver. Ce happening unique fait rayonner Québec - ville du patrimoine mondial - et devient un haut lieu de découvertes, rassemblant des artistes d’ici et d’ailleurs, qui se distinguent sur la scène de l’art actuel.
Les mots du commissaire invité, Steven Matijcio, sur le thème choisi : Les illusions sont réelles
Pour sa 10e édition, Manif d’Art - La biennale de Québec prend ses quartiers dans de multiples salles, espaces et milieux disséminés dans la ville, chacun modulant le thème principal tout en prolongeant les questionnements et les réflexions dans des directions variées. Les illusions sont réelles est une méditation sur la prolifération des artifices dans notre quotidien, depuis les saveurs synthétiques, les photographies modifiées et les conspirations virales jusqu’à la rhétorique politique, à l’intelligence artificielle et à la réalité virtuelle, en passant par l’infox vidéo et les identités que l’on se concocte en ligne. Les demi-vérités sont vieilles comme le monde, mais l’accélération, l’expansion et l’ubiquité de la tromperie, que favorisent les médias sociaux, annoncent, pour certains, l’ère « postvérité ». Manif d’art - La biennale de Québec mène le public au cœur de cet univers déconcertant dans la perspective d’artistes d’horizons divers, qui fabriquent et déconstruisent des illusions en tous genres et se penchent tant sur l’aspect séducteur que sur les dangers de ce phénomène en croissance.
L’exposition centrale de la biennale, proposée au MNBAQ, regroupe les œuvres de 21 artistes qui explorent des merveilles variées et ambiguës sous forme d’abstractions déstabilisantes, de transformations matérielles, de représentation d’animaux, de présences spectrales, de technologies en progression et de curiosités stupéfiantes qui font vaciller : réalité ou manipulation ? La quantité prodigieuse de faux-semblants et de désinformation qui colonisent nos vies influe sans cesse davantage sur nos perceptions tout en alimentant nos aspirations. Magiciens, bêtes mythiques, surfaces changeantes, sosies et apparences fluides stimulent la curiosité et désorientent : comment faire son chemin dans un monde où réel et virtuel sont si habilement tissés ? Dans cette arène aussi périlleuse qu’envoûtante, les artistes de Les illusions sont réelles titillent l’imagination sans oublier de mettre en garde ceux et celles qui se laissent trop facilement leurrer. En filigrane, deux questions : à qui, et surtout, comment faire confiance ?
Quand les artistes s’amusent à mystifier le public
Le MNBAQ a rassemblé une centaine d’œuvres d’une vingtaine d’artistes internationaux, canadiens et québécois regroupés par Matijcio sous l’enseigne d’un thème fascinant, mystérieux et dans l’air du temps. Parmi ces artistes d’envergure, qui investissent le pavillon Pierre Lassonde, il faut souligner la présence de : Pierre Huyghe (France), Gillian Wearing (Angleterre), Titus Kaphar (États-Unis), Gabriel Lester (Pays-Bas), Tauba Auerbach (États-Unis), Tony Tasset (États-Unis), Nicolas Baier (Canada), Michel de Broin (Canada), Brian Jungen (Canada), Karine Payette (Canada), Karine Fréchette (Canada), Annie Baillargeon (Canada) et Karen Tam (Canada).
Les œuvres rassemblées procureront des expériences inoubliables aux visiteuses et aux visiteurs, allant d’un art de l’émerveillement, ambivalent, fascinant et inquiétant à la fois, jusqu’aux illusions en apparence anodines, inondant notre quotidien. Le jeu de Les illusions sont réelles n’aura jamais été aussi palpitant.
À travers un parcours unique dans les salles temporaires du pavillon Pierre Lassonde, le plaisir sera double pour le public, car en plus de s’émerveiller devant des œuvres de fascination, il pourra découvrir des artistes aux démarches artistiques vraiment singulières.
Parmi les œuvres incontournables venues d’ailleurs
Parmi les incontournables, il faut voir A Journey That Wasn’t, de l’artiste français Pierre Huyghe, qui propose une fusion cinématographique où la réalité et sa reconstitution deviennent indistinguables. Des images d’une expédition dans l’Antarctique sont imbriquées à celles d’un concert sur l’anneau de glace de Central Park. À la frontière du documentaire, son film s’attarde aux distinctions entre fiction et réalité, sous un titre qui donne l’impression que rien de cela n’est jamais arrivé.
Pour sa part, l’artiste américain Tony Tasset décortique le rêve américain et ses nombreux mirages. Il récupère des images emblématiques issues des médias de masse et en produit des caricatures saisissantes. L’œuvre Snowman with Coke Can Mouth and Broom est l’imitation truquée d’une forme iconique de l’art populaire : le bonhomme de neige.
Il faut également s’arrêter devant les toiles Dancer et Heavy Halter, réalisées par Sascha Braunig, une artiste d’origine canadienne qui vit et travaille aux États-Unis. Elle s’amuse avec la luminosité artificielle dans une approche sensorielle de la peinture. Les silhouettes évidées de ses œuvres, réduites à de minces armatures lumineuses, semblent se prêter à un jeu de cache-cache presque charnel sur scène.
De son côté, Brian Jungen, un artiste britanno-colombien, puise dans les traditions héritées de ses origines Dane-zaa pour transformer en sculptures fantaisistes des objets issus de la production de masse. Il manipule ces objets en les déconstruisant et en les raboutant et faire en sorte qu’ils demeurent reconnaissables, tout en s’assurant que les nouvelles formes font allusion aux cultures matérielles autochtones.
Une autre œuvre remarquable, l’installation Open Black Box de l’artiste américain Tom Friedman, qui vient pousser les limites de la perception et de la rationalité pour tendre vers le fantastique. Un immense cube demeure partiellement invisible, répondant à la logique inconsciente de la perception qui complète ce qui est absent.
Et pour sa part, l’artiste américain Titus Kaphar réalise avec virtuosité des copies fidèles d’œuvres historiques avant de les couper, froisser, envelopper, déchiqueter, tordre, déchirer ou griffonner. En quête de réécriture historique, l’artiste met ainsi en lumière, dans une œuvre soufflante, des perspectives que les grands canons de l’art ont ignorées.
Parmi les œuvres phares du Québec
Il faut aussi apprécier l’œuvre Data du Québécois Nicolas Baier, qui au premier abord, pourrait passer pour une photographie grand format d’une forêt luxuriante, peuplée d’épinettes et sillonnée d’un ruisseau. Il s’agit en fait d’un paysage entièrement virtuel, un trompe-l’œil d’une vraisemblance déconcertante. L’exposition comprend également la première vidéo produite par l’artiste montréalais.
Dans les trois aquariums de verre remplis d’un liquide turquoise diaphane de l’œuvre de l’artiste montréalaise Karine Payette, les allers-retours incessants d’une mystérieuse créature dégagent une certaine inquiétude. Avec l’installation À perpétuité, Payette brouille les perceptions et met les visiteuses et les visiteurs en contact avec une espèce inconnue, un objet de curiosité.
Le Salon chinois - White Gold, une installation inédite de l’artiste montréalaise Karen Tam commente l’engouement des Occidentaux pour la porcelaine chinoise, aussi nommée l’or blanc, et rappelle les salons privés que l’on trouvait autrefois dans les demeures de la noblesse européenne. Mais l’installation est composée entre autres de véritables artefacts et facsimilés provenant de la collection du MNBAQ et de faux objets décoratifs créés par l’artiste, montrant au passage les violences auxquelles peuvent mener les représentations réductrices, caricaturales et déshumanisantes de l’autre.
L’artiste Karine Fréchette, originaire de Montréal, travaille de son côté la peinture pour plier la surface de ses toiles, y inscrivant une énergie dans laquelle une expérience spatiale se joue, entre esthétique psychédélique et allusions à l’écran ainsi qu’aux ondes qui nous entourent. Sillages 6 (Le tableau de Leipzig) est l’un de ces tableaux éloquents.
Enfin, le Montréalais Maskull Lasserre insuffle une certaine vitalité à des objets ordinaires en créant une illusion de muabilité. Avec la sculpture Conscience, une tension palpable émane d’un crâne en acier suspendu et soumis aux forces invisibles du magnétisme, à notre grande surprise.
Un rendez-vous sur Facebook, le 1er mars à 9 h
Pour tous ceux et celles qui aimeraient enrichir leurs connaissances et littéralement plonger au cœur de l’exposition centrale de Manif d’art 10 - La biennale de Québec. Les illusions sont réelles, le MNBAQ est heureux de leur donner rendez-vous sur Facebook, le 1er mars prochain dès 9 h. Bernard Lamarche, responsable du développement des collections et conservateur de l’art actuel (2000 à ce jour) au MNBAQ expliquera le thème de la biennale et s’attardera plus particulièrement sur certaines œuvres des nombreux artistes rassemblés au MNBAQ cet hiver.
Les crédits
L’exposition Manif d’art 10 - La biennale de Québec. Les illusions sont réelles est une exposition organisée par le Musée national des beaux-arts du Québec en collaboration avec Manif d’art - La biennale de Québec.
Commissariat
Steven MATIJCIO
Directeur, Blaffer Art Museum, Houston (Texas)
Bernard LAMARCHE
Responsable du développement des collections et conservateur de l’art actuel (2000 à ce jour), MNBAQ
Comité de programmation
Claude BÉLANGER
Directeur général et artistique, Manif d’art - La Biennale de Québec
Michelle DRAPEAU
Commissaire adjointe, Manif d’art - La Biennale de Québec
Steven MATIJCIO
Commissaire invité
Gestion du projet
Annie GAUTHIER
Directrice des expositions et des partenariats internationaux, MNBAQ
Marie-Hélène Audet
Cheffe du Service de la médiation, MNBAQ
Yasmée Faucher
Cheffe du Service de la muséographie, MNBAQ
Catherine GAUMOND
Cheffe du Service des collections, MNBAQ
Coordination
Bernard LAMARCHE
Design
Marie-France GRONDIN
Loïc LEFEBVRE
Designers, MNBAQ
Graphisme
Marie-France GRONDIN
Designer, MNBAQ
Le Musée national des beaux-arts du Québec est une société d’État subventionnée par le gouvernement du Québec.
Les illusions sont réelles
Manif d’art 10 - La biennale de Québec
L’exposition centrale au pavillon Pierre Lassonde du MNBAQ
Du 19 février au 24 avril 2022
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