Croyez-moi, les syndicats aussi sont fatigués de répéter toujours le même message. Cependant, avons-nous le luxe d’abandonner notre discours devant l’urgence d’un coup de barre en éducation au Québec ? Cela fait combien d’années que l’on dénonce les conditions inacceptables vécues par les élèves, les étudiantes et étudiants et le personnel dans les écoles et les cégeps ? Depuis combien d’années les appels à l’aide de ceux forgeant l’avenir de nos enfants sont-ils totalement ignorés par les décideurs publics ? Est-il déjà venu à l’esprit de M. Dumont que les témoignages répétés du personnel enseignant, du personnel de soutien et du personnel professionnel mettent plutôt en lumière l’indécente ignorance qui est perpétuée à leur endroit ? Les travailleuses et travailleurs de l’éducation, à coups de décrets, de lois spéciales et d’austérité, ont été malmenés de négociation en négociation dans les dernières années. Plus désabusés que jamais, les enseignantes et enseignants décrochent de leur métier, écrasés par la surcharge et le manque de ressources. Le personnel de soutien, que l’on oublie trop souvent, peine quant à lui à joindre les deux bouts à cause de la précarité et du manque d’heures. Du côté du personnel professionnel, le manque d’attractivité des conditions de travail cause chaque année un exode vers le privé, au détriment des élèves et des étudiantes et étudiants dans le besoin.
La cour est aujourd’hui pleine. Le choix de la grève, bien avant d’être une menace, c’est avant tout un ultime cri du cœur que lancent les travailleuses et travailleurs de l’éducation et de l’enseignement supérieur, où les femmes occupent la majorité des postes. Ces dernières veulent négocier et que le gouvernement écoute les solutions portées à la table. Elles exigent des réinvestissements pour améliorer les conditions de travail et avoir un impact direct sur les conditions d’apprentissage des élèves, des étudiantes et étudiant, et leur avenir.
À l’heure où le Québec vit une crise sans précédent, nous lançons plus que jamais un appel pour que l’éducation soit un projet de société capable de répondre aux nombreux défis qui se posent face à l’avenir : la formation, la requalification, la lutte contre le décrochage et la valorisation de la réussite. Est-il à ce point trop demandé d’avoir de l’ambition pour notre jeunesse et de miser sur le meilleur levier existant pour abattre les inégalités et la pauvreté ?
Sans aucune analyse sur les enjeux et la réalité de l’école publique ou de l’éducation, le chroniqueur nous sert un énoncé de principe aux sympathies patronales usées comme un crayon qui écrit les mêmes propos depuis presque 15 ans. S’est-il au moins donné la peine de connaître le fondement de nos demandes ou sinon leurs coûts ? En effet, s’il existe certainement un prix à payer pour valoriser l’éducation, l’inverse est aussi vrai lorsque l’on considère les 800 000 journées de maladie prises par le personnel enseignant et le personnel de soutien scolaire en 2019 et qui ont coûté un milliard de dollars. Également, l’économiste Pierre Fortin estime que chaque cohorte de décrocheurs coûte deux milliards de dollars par année au Québec.
Le gouvernement a promis de régler les enjeux et de faire de l’éducation une « priorité nationale », rien de moins. Venant de quelqu’un d’aussi aguerri à la politique que Mario Dumont, cette promesse passe aujourd’hui totalement sous le radar. S’il existe une constante avec les mauvaises conditions de travail des employées et employés de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la santé, ce sont bien les idées préconçues contre ceux-ci. Il faudra toujours s’étonner des propos qui, faisant fi de toutes les données probantes et des signaux d’alarme accumulés au fil des ans, prôneront toujours de niveler par le bas. Pour chaque disque usé, il y a une vieille cassette !
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