Alors que la pénurie de logements locatifs et la hausse importante du coût des loyers qui en découle avaient déjà de graves conséquences pour les femmes locataires, la pandémie a encore plus mis à mal leurs conditions de vie en les précarisant davantage. Leur accès à un logement qu’elles sont capables de payer et où elles peuvent vivre en sécurité, dans la paix et la dignité a également été limité. « Les dernières données statistiques le confirment : non seulement la pandémie a durement affecté la participation des québécoises au marché du travail mais en plus, la crise du logement ne se résorbe pas. Déjà en 2016, c’était plus de 248 000 ménages locataires dont le principal financier était une femme qui dispensaient plus de 30% de ses revenus pour se loger, avec un revenu annuel médian de seulement 19 624 $. Alors que les loyers explosent, on peut se demander comment font les femmes aujourd’hui et particulièrement celles victimes de violence conjugale », s’inquiète Céline Magontier, responsable des dossiers Femmes au FRAPRU.
Selon une étude menée par Hébergement Femmes Canada, plus d’une maison d’hébergement sur deux constate une augmentation de la gravité de la violence subie par les femmes canadiennes qu’elles desservent depuis le début de la pandémie. Déjà pour l’année 2019-2020, le taux de refus des demandes d’hébergement auprès des maisons membres de l’Alliance MH2 atteignait 75% à Montréal et 37% dans les régions où le service existe. « Le manque à combler est énorme. Au-delà des refus dans les régions où les services existent, les régions administratives de la Mauricie, de Lanaudière, des Laurentides, de l’Outaouais et de l’Abitibi-Témiscamingue ne sont carrément pas desservies. C’est inacceptable ! Quand on sait que tous les 10 jours une femme est victime d’une tentative de meurtre dans un contexte conjugal au Québec, c’est outrageux de voir que le gouvernement tolère d’aussi grands vides de services pour les victimes de violence conjugale ! », s’insurge Gaelle Fedida, coordonnatrice politique de l’Alliance MH2. « C’est pourquoi il est primordial de débloquer les 106 unités de logement social pour femmes en 2ème étapes, coincées dans la machine depuis un et demi ! Ces délais sont aberrants alors que le gouvernement Legault reconnaît les maisons d’hébergement de 2ème étape comme une ressource essentielle pour garantir la sécurité des femmes et des enfants victimes de violence conjugale et que la ministre de l’Habitation, Andrée Laforest, a répété à plusieurs reprises que l’habitation est une priorité de son gouvernement », ajoute Madame Fedida.
Selon les deux regroupements, non seulement ces 106 unités doivent être débloquées dès le prochain budget Girard, mais celui-ci doit également comprendre un grand chantier de logements sociaux. « Que ce soient les HLM, les coopératives ou encore les OSBL d’habitation, les femmes sont grandement majoritaires parmi les locataires de logements sociaux du Québec. Le logement social, pour les femmes, c’est essentiel ! », explique Céline Magontier. Or, seules 66% des femmes suite à leur séjour en maison de 2eme étape au Québec ont trouvé un logement correspondant à leur capacité de payer en 2019-2020. Sur ce nombre, 45% vivent en logement social et seulement 21% en logement régulier. « Si rien n’est fait, faute de logements abordables disponibles, de trop nombreuses femmes vont continuer à être prisonnières de leur bourreau et voir leur vie mise en danger. Ceci est d’autant plus vrai dans un contexte de confinement qui limite l’accès des femmes aux lignes d’aide, puisque sous le regard constant de leur agresseur. Ça prend du logement social et vite ! », martèle la porte-parole de l’Alliance.
Alors qu’il en manque cruellement, les nouveaux logements publics, sans but lucratif et coopératifs se réalisent au compte-goutte depuis quelques années. En tout et pour tout, seulement 1 019 logements sociaux ont été construits l’an dernier. « C’est trop peu considérant les besoins. Ce manque de financement chronique a des conséquences directes sur la capacité de ces femmes à s’en sortir et s’avère même dévastateur pour certaines d’entre elles. Il en va de la responsabilité de la CAQ d’inverser la tendance. Le logement social est la seule formule qui assure aux femmes à faible et modeste revenu des logements décents et sécuritaires rencontrant leur capacité de payer, ce que le marché privé ne permet pas à l’heure actuelle », conclu Céline Magontier, réitérant la demande qu’un chantier de 50 000 logements sociaux en 5 ans soit annoncé dès le prochain budget du Québec, ainsi que la livraison des 106 unités de deuxième étape coincées depuis un an et demi.
Il est possible de consulter en ligne les mémoires pré-budgétaires du FRAPRU et de l’Alliance.
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