Au dix-neuvième siècle, l’aventure impérialiste a repris de plus belle avec la conquête de l’Algérie par la France et la mainmise égyptienne sur l’Égypte. Des révoltes massives des populations ont été réprimées par des massacres que les Européens justifiaient au nom de leur « mission civilisatrice ».
Au tournant du vingtième siècle, les puissances européennes se sont remises à l’assaut contre l’empire ottoman qui contrôlait la région et qui était en déclin. La France et l’Angleterre se sont divisés le gâteau, la France par exemple prenant le contrôle de la Syrie et du Liban. Les populations qui réclamaient l’indépendance ont été bombardées au gaz. Sous la coupe de Londres, l’Égypte est devenue un immense champ de coton pour nourrir les industries anglaises.
Après la Deuxième Guerre mondiale, la conquête s’est « modernisée ». Les États-Unis ont fait irruption en prenant sous leur protection la monarchie saoudienne au moment où le contrôle des riches ressources de pétrole devenait stratégique. Ils ont fomenté le renversement d’un régime nationaliste en Iran. Ils se sont alliés à la Turquie en l’intégrant dans le dispositif de l’OTAN ce qui a permis à la dictature turque de réprimer les Kurdes.
Dans le contexte de la guerre froide contre l’URSS, les États-Unis et leurs alliés-subalternes européens et canadiens se sont appuyés sur le nouvel État israélien mis en place par une grande opération de purification ethnique où un million de Palestiniens ont été expulsés de leur pays. En 1967, Israël avec ses appuyeurs de l’OTAN ont brisé le projet nationaliste de Nasser en Égypte et envahi la partie non-occupée de la Palestine de même que la région du Golan en Syrie. Par la suite, l’empire américain s’est appuyé sur Israël qui est devenu ni plus ni moins le « gendarme » de la région. La Palestine est alors devenue l’épicentre du combat sous l’égide de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Les États-Unis et Israël ont pensé marquer un grand coup en expulsant les Palestiniens du Liban (1982) grâce aux massacres de milliers de civils (dont celui de Sabra et Shatila). Parallèlement, Washington a apporté une très importante aide militaire au régime de Saddam Hussein dans la guerre contre l’Iran. Des massacres d’une ampleur inédite ont eu lieu, comme en Afghanistan d’ailleurs, où l’armée américaine armait les combattants islamiques.
Après l’implosion de l’Union soviétique (1989), l’invasion du Koweït par l’Irak a précipité une nouvelle ronde de guerre. Se rangeant derrière les pétromonarchies, les puissances de l’OTAN se sont déployées directement au Moyen-Orient avec des centaines de milliers de soldats. De nouveaux conflits se sont dispersés au Liban, dans les régions kurdes de la Syrie, dans les territoires palestiniens, en dépit d’un soi-disant processus de paix qui était perverti au départ puisque l’État israélien tenait à maintenir l’occupation.
Quand le printemps arabe a éclaté au tournant de 2010, la première réaction des États-Unis et des États européens a été de défendre Moubarak et Ben Ali, tout en suggérant une « transition » pour maintenir le système en place, quitte à envoyer les dictateurs dans un exil doré. Le tout a débordé dans une insurrection populaire qui a balayé la région, y compris la Syrie. Devant le raz-de-marée, Washington et Paris ont pratiqué la politique du deux poids deux mesures, dénonçant le régime de Bashar Al-Assad en Syrie et celui de Kadhafi en Lybie, tout en tolérant les États prédateurs (Arabie saoudite, Turquie, Israël, Jordanie). Parallèlement, on a permis aux militaires égyptiens de revenir en force pour mettre fin dans ce pays au printemps arabe. Et puis, comme si cela n’était pas passé, on a laissé grandir Daesh avec l’argent saoudien et la complicité turque. On se disait encore, « l’ennemi de mon ennemi est mon ami »…
On se retrouve aujourd’hui avec le résultat que tout le monde connaît. Sauf que la colère n’a jamais été si puissante dans les pays concernés. Des centaines de milliers de personnes sont prêtes à se battre, quitte à donner leur vie, plus souvent qu’autrement au nom d’une illusoire Jihad. D’autres, qui sont des millions, prennent le chemin de l’exil.
La tempête ne fait que commencer.
En attendant, il y a des comiques, des « journalistes » et des pseudos experts qui feignent d’occulter cette histoire et qui reprennent la rengaine de la lutte de la « civilisation » contre la « barbarie ». Malheureusement pour eux, les faits sont têtus. Dans quelques années, ils diront comme les criminels qui ont déclenché la guerre dans les années 1990, « désolé, on s’est trompés » (c’est ce que papa Bush vient de dire dans son autobiographie).