Le gouvernement québécois montre lui aussi des inclinations peu démocratiques visant à favoriser les intérêts pétroliers et gaziers. La règlementation complaisante du ministre de l’environnement David Heurtel sur la protection de l’eau potable vient paver la voie à l’industrie du gaz et pétrole de schiste avant même que le Bureau d’audiences publiques en environnement (BAPE) n’aie terminé ses travaux sur ces projets et alors que 70 municipalités ont déjà voté un règlement beaucoup plus restrictif afin d’encadrer plus sérieusement l’industrie. L’accueil favorable aux projets de pipelines d’Enbridge et TransCanada et les permis accordés aux compagnies pétrolières et gazières pour faire des forages malgré l’opposition des municipalités et des citoyens, pensons au décret permettant les présents forages à Anticosti, en dit long sur l’état d’esprit qui règne au sein du parti au pouvoir.
À quoi mène cette mauvaise volonté politique ? À soutenir la croissance des pays asiatiques, dont la Chine et l’Inde. C’est à ces pays qu’est destiné en majorité le pétrole des sables bitumineux qu’on veut acheminer par pipeline et par pétrolier pour l’exportation. Il en est aussi de même du gaz liquéfié. La production du gaz et pétrole de schiste sont des effets indirects de ce grand projet national. Cette conjoncture politique intervient au moment où toute la biodiversité est menacée par la concentration de CO2 dans l’atmosphère, lequel provoque le réchauffement climatique et l’acidification des océans. Le phytoplancton, à la base de la chaine alimentaire et qui fournit la moitié de l’oxygène de la planète, connait un déclin rapide.
Les poissons de fond quittent leur habitat par manque d’oxygène. Les océans comptent déjà des centaines de zones dites mortes où la plupart des espèces pêchées font place aux méduses. Les experts prévoient que les espèces marines dotées d’un squelette, c’est-à-dire pratiquement toutes les espèces de poissons et crustacés, devraient disparaître d’ici 20 à 50 ans. Quand on sait qu’un tiers de l’humanité tire de l’océan sa principale source de protéines et que les revenus de la pêche comptent pour des milliards dans l’économie mondiale, on conçoit les problèmes à venir1.
Il ne faudra pas compter sur la Chine et l’Inde pour mettre en œuvre des politiques de décroissance visant à freiner leurs émissions de GES. Les économies émergentes estiment que c’est aux pays développés de réparer les dégâts causés par la révolution industrielle à laquelle ils n’ont pas pris part. C’est donc dans les pays industrialisés que se joue l’avenir de la planète. Et les québécois sont appelés bien malgré eux à tenir un rôle historique dans cette lutte au réchauffement climatique. Refuser les projets de pipeline et de développement pétrolier et gazier au Québec, c’est enfin rendre possible l’amorce d’une transition vers les énergies vertes. C’est rejeter le masque de la croissance qui est en passe de tout détruire. C’est donner l’exemple.
Louise Morand
Comité vigilance hydrocarbures L’Assomption
3 août 2014