Bien qu’un nombre très négligeable de femmes portent le niqab ou la burqa ici au Québec, cette loi concerne toutes les femmes. Ceci est un enjeu féministe, car cette loi de « neutralité religieuse », dont le but déclaré, mais fallacieux est de garantir la sécurité ou de promouvoir la libération des femmes, ne conduit qu’à l’exclusion d’un certain groupe de femmes de l’espace public, et donc à leur précarisation. La loi 62 victimise certaines femmes et les rend vulnérables à la violence genrée. Isolement, barrières à l’accès aux services publics et violation des droits civiques, les répercussions sont innombrables pour les femmes visées.
Soyons honnêtes. Combien des militants antifascistes iront à l’hôpital ou prendront le transport en commun avec le visage couvert ?
En prétendant que cette loi ne vise pas seulement des femmes de confession musulmane, le gouvernement tente d’esquiver la dénonciation qu’il s’agit là d’une mesure islamophobe. D’après la ministre Stéphanie Vallée, cette loi vise également ceux et celles qui veulent avoir recours à des « cagoules ou des verres fumés » et des bandanas, évoquant ceux portés par les militants venus faire obstacle au rassemblement raciste tenu récemment dans la ville de Québec. Soyons honnêtes. Combien des militants antifascistes iront à l’hôpital ou prendront le transport en commun avec le visage couvert ?
Tandis que l’adoption de cette loi devient le cœur d’un débat où les gouvernements fédéral et provincial se disputent leurs domaines de compétences, des femmes deviennent la cible des tirs croisés d’une promesse électorale. Une cible facile, un groupe de femmes, très minoritaire, effacé de tout débat public les concernant, mais dont le signe distinctif, visible, est mobilisé pour frapper l’imaginaire et en même temps, devient le bouc émissaire parfait.
Nous devons dénoncer toute forme d’instrumentalisation du féminisme à des fins racistes et agir en conséquence.
La Fédération des femmes du Québec interpelle la nouvelle ministre du Secrétariat de la condition féminine, Hélène David, et la Présidente du Conseil Statut de la femme, Louise Cordeau, à se prononcer sur cet enjeu. Laisserons-nous le gouvernement adopter des lois racistes et islamophobes en brandissant l’argument d’un avancement de la condition féminine et de la laïcité, sachant que ces lois victimisent des femmes ? La Fédération des femmes du Québec fait également appel aux mouvements des femmes pour que les groupes réagissent. Nous devons dénoncer toute forme d’instrumentalisation du féminisme à des fins racistes et agir en conséquence. Soyons porteuses d’un projet d’émancipation pour toutes les femmes et refusons que le discours de l’égalité hommes-femmes soit détourné pour stigmatiser une partie d’entre elles.
Nous ne demeurerons pas silencieuses, car tant que toutes les femmes ne seront pas libres, nous serons en marche !
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