31 janv. 2023 | tiré de socialistproject

La déclaration (en anglais)

Le 27 janvier, les délégués de plus de 25 pays du monde entier se sont réunis à La Havane pour tracer la voie vers le nouvel ordre économique international. Voici leur déclaration finale.

Le Congrès de La Havane,

Rappelant le rôle de la Révolution cubaine dans la lutte pour l’unification des nations du Sud du monde, et l’esprit de la Conférence tricontinentale de La Havane de 1966 qui a réuni des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine pour tracer la voie de la libération collective face à de graves crises mondiales et à une subjugation impériale soutenue ;

Entendre les échos de cette histoire aujourd’hui, alors que les crises de la faim, de la maladie et de la guerre accablent à nouveau le monde, aggravées par un changement climatique rapide et les sécheresses, les inondations et les ouragans qui non seulement menacent d’enflammer les conflits entre les peuples, mais risquent également l’extinction de l’humanité en général ;

Célébrant l’héritage de la lutte anticoloniale, et les victoires remportées en combinant un programme de développement souverain à l’intérieur, la solidarité pour la libération nationale à l’étranger, et un bloc du Sud fort pour forcer des concessions à ses intérêts, culminant avec l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur l’établissement d’un nouvel ordre économique international (NIEO) ;

Reconnaissant que le projet de décolonisation reste incomplet, perturbé par des attaques concertées contre l’unité du Sud sous la forme de guerres, de coups d’État, de sanctions, d’ajustements structurels et de la fausse promesse que le développement souverain pourrait être gagné par l’intégration dans un système mondial hiérarchisé ;

Soulignant que le résultat a été une divergence soutenue entre le Nord et le Sud, caractérisée par les mêmes dynamiques que celles qui ont défini l’ordre économique international cinq décennies auparavant : l’extraction des ressources naturelles, l’enfermement de la "propriété intellectuelle", le pillage de l’ajustement structurel et l’exclusion du système multilatéral.

Reconnaissant qu’en dépit de ces revers, la flamme de la résistance du Sud ne s’est pas éteinte ; que la poursuite d’un développement souverain a donné lieu à des réalisations sans précédent - de l’alphabétisation de masse et des soins de santé universels à la réduction de la pauvreté et à l’innovation médicale - qui permettent aujourd’hui une nouvelle campagne de coopération du Sud ;

Soulignant que ce potentiel d’unité du Sud est perçu comme une menace pour les puissances du Nord, qui cherchent à nouveau à préserver leur position dans la hiérarchie du système mondial par des mécanismes d’exclusion économique, de coercition politique et d’agression militaire.

Saisir l’opportunité de la conjoncture historique actuelle, lorsque la crise du système mondial existant peut soit renforcer les inégalités, soit renforcer l’appel à récupérer le protagonisme du Sud dans la construction d’un nouvel ordre mondial basé sur la justice, l’équité et la paix ;

Le Congrès de La Havane appelle à :

• Renouveler le Mouvement des Non-Alignés : Face aux tensions géopolitiques croissantes nées d’un changement décisif de l’équilibre mondial des forces, le Congrès appelle à résister au chant des sirènes de la nouvelle guerre froide et à renouveler le projet de non-alignement, fondé sur les principes de souveraineté, de paix et de coopération énoncés lors de la Conférence de Bandung en 1955, de la Conférence des non-alignés en 1961, de la Conférence tricontinentale en 1966 et au-delà.

• Rénover le NIEO : Pour accompagner le renouveau du mouvement des non-alignés, le Congrès appelle à rénover la vision d’un Nouvel Ordre Economique International adapté au 21ème siècle ; une vision qui doit s’inspirer de la Déclaration originale, mais aussi tenir compte des questions clés - de la technologie numérique à la dégradation de l’environnement - qui définissent les conditions actuelles du développement souverain ; et à inscrire cette vision dans une nouvelle Déclaration des Nations Unies à l’occasion de son 50ème anniversaire.

• Affirmer le pouvoir du Sud : le Congrès reconnaît que la libération économique ne sera pas accordée, mais doit être saisie. De même que l’appel initial à un nouvel ordre économique international a été gagné par l’exercice d’un pouvoir collectif dans la production coordonnée de pétrole, notre vision d’aujourd’hui ne peut se réaliser que par l’action collective du Sud et la formation d’institutions nouvelles et alternatives pour partager les technologies critiques, s’attaquer à la dette souveraine, piloter le financement du développement, affronter ensemble les futures pandémies, ainsi que coordonner les positions sur l’action climatique internationale et la protection de la souveraineté nationale sur l’extraction des ressources naturelles.

• Accompagner Cuba au sein du G77 : Le Congrès reconnaît l’opportunité cruciale qu’offre la présidence cubaine du Groupe des 77 plus la Chine pour sortir le Sud de la crise actuelle et canaliser les leçons de sa Révolution vers des propositions concrètes et des initiatives ambitieuses pour transformer le système international au sens large.

• Construire un bloc planétaire : Le Congrès appelle tous les peuples et toutes les nations du monde à se joindre à cette lutte pour réaliser définitivement le Nouvel Ordre Economique International ; à construire un bloc planétaire dirigé par le Sud et renforcé par les solidarités du Nord, dont les peuples reconnaissent leur obligation de résister aux crimes commis en leur nom ; et à porter l’esprit de ce Congrès de La Havane dans les communautés que nous appelons chez nous.