Déjà, en 2014, la société avait recours aux services de la multinationale de relations publiques Edelman pour vanter la sécurité des pipelines par rapport au train et établir des stratégies visant à discréditer ses opposants [2]. Mais les pratiques quelque peu douteuses suggérées par Edelman dans un document obtenu par Greenpeace avaient à l’époque soulevé l’indignation (mais non l’étonnement) des citoyens informés… À tel point que la pétrolière a été contrainte, pour une question d’image, de rompre son contrat avec la firme américaine de relations publiques [3].
Mais ses efforts souterrains n’en ont pas été freinés pour autant. En décembre 2014 paraissaient, dans la section XTRA de La Presse+, des « articles » intitulés « D’où provient notre pétrole ? » et « Le raffinage au Québec, un élément essentiel de notre indépendance énergétique ». Malheureusement, il n’était nulle part mentionné qu’il s’agissait de textes publicitaires et non de textes journalistiques. Bien sûr, rien n’interdit la publicité. Mais encore faut-il que cela soit clairement indiqué. Car la publicité, sans nécessairement être mensongère, n’a pas pour but d’informer, mais de convaincre. Elle ne présente toujours que le beau côté de la médaille et ne peut prétendre faire le tour de la question au même titre qu’un véritable reportage soumis aux règles élémentaires du journalisme. Le Conseil de presse du Québec vient d’ailleurs d’adresser un blâme à l’entreprise de presse dans une décision rendue en octobre 2015 et diffusée depuis jeudi sur le site de l’organisme [4]. Mais le message est passé et la population a été bernée.
Est-ce ainsi que TransCanada espère arriver à convaincre les Québécois de la nécessité de ses projets d’expansion ? Est-ce cela que M. Louis Bergeron, vice-président de la compagnie au Québec et au Nouveau-Brunswick, considère comme « une discussion basée sur la science et les faits » ? Le fait d’affirmer que les pipelines sont la solution parce qu’ils sont plus sécuritaires que les trains ne relève-t-il pas de la restriction mentale ? Ne faudrait-il pas préciser que le transport par pipeline du pétrole des sables bitumineux n’est aucunement destiné à réduire son transport par train, mais bien à accroître le volume de pétrole extrait et transporté ? Ne faudrait-il pas aussi préciser que la priorité n’est pas de pouvoir transporter du pétrole, mais bien de planifier dès maintenant notre sortie des énergies fossiles si l’on veut freiner les perturbations déjà bien palpables que nous réservent les changements climatiques ?
Soyons optimistes, et parions que les Québécois ne se laisseront pas berner.
François Prévost
Membre du Regroupement vigilance hydrocarbures Québec (RVHQ)