Demain (le 10 novembre NDLR), des milliers d’étudiantes et d’étudiants de toutes les régions du Québec manifesteront dans les rues de Montréal pour dénoncer une hausse brutale de 1625 $ des droits de scolarité, annoncée par le gouvernement Charest. Alain Dubuc, chroniqueur à La Presse, accuse ce matin ces jeunes de faire preuve de « corporatisme primaire ». Rien de moins ! L’accusation paraît bien lourde venant d’une personne issue de notre génération, qui a largement profité de la presque gratuité universitaire et qui est l’auteur d’un vibrant plaidoyer pour inviter les Québécoises et les Québécois à cesser de jalouser le succès des gens d’affaires en faisant L’Éloge de la richesse… d’une minorité.
Les droits de scolarité connaîtront une hausse de 75 %
Les droits de scolarité connaîtront une hausse vertigineuse au cours des prochaines années, passant de 2168 à 3793 $, soit une hausse de 75 % ! Avec les frais institutionnels obligatoires, les livres et autres dépenses liées à la scolarité, la facture grimpera à 4700 $. Et la mobilisation du mouvement étudiant ne serait le reflet que d’un banal pas-dans-ma-cour ? Allons donc, soyons sérieux. Dans plusieurs autres provinces, les droits de scolarité sont supérieurs certes, mais les étudiantes et les étudiants canadiens sont aussi plus lourdement endettés puisque le tiers d’entre eux doivent plus de 20 000 $ à la fin de leurs études. De plus, l’accès aux études est en baisse selon Statistique Canada.
Des jeunes de plus en plus endettés
Le « banal pas-dans-ma-cour » dont parle le chroniqueur de La Presse ne serait-il pas plutôt le reflet d’une inquiétude légitime des jeunes de voir leur endettement s’alourdir, comme c’est le cas ailleurs au Canada ? Une hausse aussi subite aura aussi un effet certain sur la hausse du temps de travail à temps partiel et probablement sur l’allongement des études, qui est un facteur important de la hausse des coûts de la scolarisation universitaire. Cette hausse pourrait dissuader des jeunes de poursuivre des études alors que le Québec aura un urgent besoin d’une population de plus en plus scolarisée pour relever les défis de la qualification de la main-d’œuvre. Elle pourrait aussi en convaincre de joindre le marché du travail quelque temps pour accumuler l’argent nécessaire à la poursuite de leurs études et ainsi les amener à faire un long détour avant de compléter leur formation universitaire.
Pourquoi l’ensemble de la population devrait-elle assumer le fardeau de cette hausse alors qu’il est démontré que les étudiants universitaires gagneront un revenu supérieur ? s’interroge le chroniqueur. Pour ne pas freiner l’accès aux études. Pour éviter un endettement excessif. Pour ne pas faire de l’instruction un simple enjeu marchand qui repose sur l’idéologie du chacun pour soi. Pour ne pas nier le caractère public de la culture et le rôle unificateur de l’Instruction publique, comme le soulignent deux chercheurs de l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) dans le livre Université inc.
Un souci d’équité intergénérationnelle
Mais aussi par souci d’équité intergénérationnelle, pourrions-nous lui répondre. Ou encore par simple solidarité. C’est pour ces raisons que les « corporatistes », des syndicats, comme Alain Dubuc nous appelle, manifesteront à leurs côtés demain. Les militantes et les militants de la CSQ seront du nombre.