La hausse des droits de scolarité telle qu’annoncée par le ministre des Finances Raymond Bachand amènera en 2016-2017 un déboursé d’un montant annuel d’environ 665 millions de $ payé par les étudiantes et les étudiants universitaires québécois. Ce montant comporte l’effet combiné de l’évolution démographique et de l’impact de la hausse des droits de scolarité sur la clientèle universitaire. En comparaison, les universitaires québécois payaient en 2008-2009 un montant total en droits de scolarité équivalant à 304,6 millions de $. Les programmes de l’Aide financière aux études (AFE) pourront venir en aide à une partie de la clientèle universitaire. Celle-ci représentait en 2008-2009, 51,1 % des bénéficiaires de l’AFE et recevait une aide totale de 475 M$, soit près de 56 % de l’aide totale accordée.
Le coût de la gratuité scolaire en milieu universitaire
Les chercheurs ont ensuite calculé qu’il en coûterait entre 176 M $ et 405 M $ à l’État québécois pour introduire la gratuité scolaire sur un budget total de 15 milliards $ du ministère de l’Éducation soit entre 1,2 % et 2,7 % du budget. « Nous estimons que l’élimination des droits de scolarité ferait épargner à l’État 77 millions de $ en coût de programmes d’aide aux études. En additionnant une baisse en crédits d’impôt de 63,1 millions de $, nous estimons que l’impact total de l’élimination des droits serait de 140 millions de $. En prenant en compte ces deux facteurs, on peut estimer que les coûts de la gratuité universitaire se situeraient entre 176 millions de $ et 405 millions de $ », ont calculé les deux chercheurs de l’IRÉC.
Ces derniers ont constaté que peu d’études se sont penchées de manière scientifique sur la question de la gratuité scolaire. Selon les recherches du ministère de l’Éducation lui-même, les effectifs universitaires augmenteraient entre 7,8 % et 12,1 % selon les scénarios sous un régime de gratuité scolaire. « Notre rapport de recherche, disent-ils, permet de chiffrer le financement du réseau universitaire qui serait nécessaire pour compenser l’élimination des droits de scolarité. Au final, pour mieux assoir les discussions, une évaluation des besoins financiers réels du réseau universitaire est nécessaire. Selon nous, c’est seulement après ce travail que l’on pourra déterminer des dispositions optimales pour le financer ».
Sous-estimation des conséquences
Le régime actuel n’est pas sans présenter certains aspects inquiétants, notamment au niveau de l’accessibilité des études universitaires aux étudiants moins fortunées. Plusieurs études démontrent en effet que la perception qu’une étudiante ou un étudiant a des droits de scolarité est bien souvent plus importante que le montant réel qu’il doit payer. La disponibilité des ressources financières à travers le programme de l’AFE n’encouragera donc pas automatiquement l’étudiante ou l’étudiant à participer à des études universitaires.
Un autre aspect inquiétant est celui de l’endettement. En effet, les étudiantes et les étudiants de famille se situant près du revenu médian ne sont généralement pas admissibles aux bourses de l’AFE et doivent contracter des prêts auprès de celle-ci ou auprès d’institutions privées. Or, tout comme le coût des études, l’endettement peut conditionner les étudiantes et les étudiants à prendre certaines décisions sous-optimales pour eux-mêmes et pour la société. « Selon la littérature scientifique, une étudiante ou un étudiant ayant une dette élevée à la fin de ses études de premier cycle sera plus enclin à aller sur le marché du travail plutôt que de continuer à la maîtrise. Cette décision est d’autant plus contraignante qu’une fois sur le marché du travail, les probabilités d’un retour aux études sont grandement restreintes », ont poursuivi Jules Bélanger et Oscar Calderon.
« Un endettement important aura également des conséquences sur le choix de carrière d’une étudiante ou d’un étudiant à la fin de ses études. Une recherche menée aux États-Unis démontre en effet que les étudiantes et les étudiants très endettés vont avoir tendance à choisir des emplois à salaires très élevés plutôt que des emplois d’intérêt public à salaires plus faibles », ont précisé les chercheurs de l’IRÉC.
« Même dans une perspective strictement comptable, ont-ils conclu, le choix du gouvernement n’apporte pas des économies substantielles à court terme et sous estime des conséquences à moyen et long terme nettement plus lourdes pour la société », ont conclu les deux chercheurs de l’IRÉC.
Pour des informations plus complètes, consulter le rapport de recherche : http://www.irec.net/upload/File/EducationAidefinanciere Janvier 2012.pdf