Édition du 24 septembre 2024

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Syndicalisme

Gel des salaires du secteur public : cherchez l'erreur !

Dans une entrevue accordée au Groupe TVA le 1er août dernier, le ministre des Finances Carlos Leitão nous inquiète. Il disait s’attendre à un rebond important dans la création d’emplois au Québec d’ici à la fin de l’année, mais en ajoutant du même souffle que la fonction publique québécoise ne pourra pas toutefois compter beaucoup de sang neuf au cours des prochains mois en raison du gel de la masse salariale du secteur public.

L’auteur est président du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).

Pourtant, la campagne électorale ontarienne nous a bien démontré que pour les citoyens, qu’ils viennent du secteur public ou du secteur privé, un emploi, c’est un emploi ! L’actualité récente au Québec nous a elle aussi prouvé qu’un emploi de service public donné au privé peut coûter très cher aux contribuables. Cherchez l’erreur !

Il est décevant que le ministre Leitão ne parle pas du potentiel énorme d’économies que représenterait une diminution sérieuse du recours à la sous-traitance. Une telle diminution serait possible par la mise en place d’une politique de développement et de valorisation de l’expertise interne au sein de l’appareil public.

Cela est d’autant plus décevant, car le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) n’a de cesse de le répéter : la collusion et la corruption sont apparues lorsque la sous-traitance est devenue importante, provoquant une perte d’expertise, qui, à son tour, a engendré une forte dépendance envers les firmes privées, une diminution graduelle de la concurrence et de l’expertise interne et des dépassements de coûts importants. De combien de commissions Charbonneau le gouvernement a-t-il besoin pour comprendre qu’il fait fausse route ?

Le SPGQ en fait la démonstration dans son mémoire déposé en juillet à la commission Charbonneau : l’analyse de l’évolution des contrats de service dans la fonction publique au cours des dix dernières années nous apprend que le nombre et l’importance des contrats en services professionnels et auxiliaires ont connu une croissance fulgurante depuis 2003-2004. La valeur de ceux-ci est en effet passée d’environ 900 millions en 2003-2004 à 2 041 millions en 2012-2013, ce qui signifie qu’elle a doublé en moins de dix ans !

Pour faire avaler la pilule aux Québécois, le gouvernement se limite à mettre sur pied la Commission de révision permanente des programmes. Cette commission sera chargée de passer au crible les programmes gouvernementaux afin de dégager des économies de 3,2 milliards pour l’an prochain afin d’atteindre l’équilibre budgétaire.

Difficile de comprendre tout cela, car en confiant la charge de cette commission à l’ex-ministre libérale Lucienne Robillard, le gouvernement se déleste de ses responsabilités en créant un comité externe chargé d’effectuer un travail que le gouvernement devrait plutôt faire lui-même. Par ailleurs, il s’agit encore une fois d’un geste de sous-traitance ! Dans un monde idéal, le gouvernement ne devrait-il pas évaluer, sur une base permanente, l’efficacité de ses programmes et se servir à bon escient de l’expertise de ses milliers de professionnelles et de professionnels ?

Plutôt que de se retrancher derrière une commission qui coûtera au bas mot 3,8 millions aux contribuables, pourquoi le gouvernement ne fait-il rien, dès maintenant, pour endiguer le recours abusif à la sous-traitance et contrer l’évasion fiscale ? C’est pourtant là que se trouve une bonne partie des 3,2 milliards recherchés (et même beaucoup plus, croyons-nous !). Cherchez l’erreur !

Richard Perron

Président du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)

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