Édition du 17 décembre 2024

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Le Monde

G7 – l’insoutenable légèreté d’un prétendu pouvoir

Le show d’Angela Merkel a commencé au Château d’Elmau en Bavière. Pour que sept représentants occidentaux puissent passer un week-end de luxe, on dépense 300 millions d’euros.

Il faut croire que Dieu soit un capitaliste et supporteur d’un monde ordo-libéral. Car avant même l’arrivée des Obama, Cameron & Cie., il a envoyé un orage violent sur le camp des manifestants, les derniers qui trouvent encore l’énergie nécessaire pour lever la voix contre ce show onéreux qui non seulement, apportera aucune nouvelle orientation de la politique occidentale, mais qui ne fait que creuser davantage le clivage entre la politique et les peuples. 300 millions d’euros de dépenses pour un week-end dans le luxe douillet de ce magnifique château – et ce, à un moment où la paupérisation des populations ne fait pas uniquement ravage dans les pays du Sud, mais également partout ailleurs.

Protégés par 22.000 policiers, les représentants politiques des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne, du Japon, du Canada, de l’Italie et de la France n’auront pas le temps de se pencher sérieusement sur les vrais problème du monde – comment peut-on envisager sérieusement une telle rencontre en l’absence de la Russie et de la Chine, sans participation de la plus puissante organisation mondiale qui est celle des pays BRICS ? A croire que les dirigeants occidentaux ferment les yeux devant les réalités de ce monde. Mais à ce moment-là, à quoi bon dépenser une fortune pour ce show PR ?

Ce qui fait peur à ces politiques, ce ne sont pas les inégalités dans le monde qui tuent, mais les quelques manifestants qui s’expriment contre ce cynisme politique. Les 22000 policiers déployés envoient un message clair aux peuples : « Nous pouvons faire tout ce que nous avons envie de faire et si vous n‘êtes pas contents, on a de quoi vous matraquer ». Un avertissement destiné à calmer les esprits de ceux qui rêvent déjà du soulèvement des peuples malmenés. Une sorte de déclaration de guerre du monde politique aux citoyens. Comme si cette poignée d’hommes et de femmes politiques avaient vraiment un pouvoir réel.

Incapables de résoudre ne serait-ce qu’un des grands dossiers de notre époque, que ce soit le conflit ukrainien, la politique des réfugiés, la pauvreté dans le monde entier, le climat, les gens qui se retrouvent en Bavière ne sont pas aussi puissants qu’ils ne le pensent. Les vraies décisions politiques ne se prennent plus au niveau politique, mais dans les étages feutrés des grands fonds d’investissement et des groupes multinationaux – les politiques ne sont plus que des marionnettes qui exécutent les désirs d’un libéralisme devenu fou et qui marche sur les intérêts des peuples.

En réalité, le groupe G7 n’a aucune emprise sur la marche des affaires dans le monde. Le sommet en Bavière, par conséquent, est donc un show totalement superflu, une pure démonstration d’un prétendu pouvoir, concerté par une chancelière qui s’est une nouvelle fois agenouillée devant le président américain en lui promettant que personne n’allait parler des scandales d’écoutes à répétition. Cela aurait fait désordre. Mieux vaut sortir la nième déclaration condamnant l’annexion de la Crimée par le grand absent de ce show, Vladimir Poutine.

Heureusement qu’il reste des gens qui n’ont pas encore totalement baissé les bras devant cette mise en scène onéreuse de la politique occidentale. Mais ce week-end constitue une véritable épreuve pour les manifestants. Quelle différence d’images entre le luxe débordant du Château Elmau et le camp des manifestants inondé avec ses tentes et sacs de couchage trempés, encerclé par les forces de l’ordre !

Il ne faut pas s’attendre à un quelconque résultat de ce sommet. Il y aura, bien entendu, une très belle déclaration à la fin de ce sommet qui dégoulinera de bonne volonté de faire tout le nécessaire pour que ce monde devienne un endroit meilleur. On parlera du climat, des maladies rares, des droits des femmes, de la paix – et après, tout le monde rentrera à la maison pour continuer à polluer, à laisser mourir des gens atteints de maladies rares, à discriminer les femmes et à produire et à vendre des armes à tout va. Business as usual. Révoltant.

Kai Littmann

Militant anticapitaliste allemand.

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