Car il s’agit bien d’une insulte du parti conservateur à toute la population francophone du pays. Les commentateurs-trices s’en sont attristés-es ont insisté sur le courage de ces candidats et de la candidate pour avoir accepté de « s’exposer » publiquement ainsi. Imaginez l’inverse : des candidats-es unilingues français participant à un tel débat à Toronto, Edmonton, Vancouver ou n’importe quelle capitale du pays. En fait, il n’aurait jamais eut lieu. Aucun des partis fédéraux ne l’aurait permis, conservateurs en tête. On imagine le tollé qui s’en serait suivi. Les plus vieux et vielles d’entre-nous se rappelleront la tempête qu’avait soulevé une intervention de Jean Marchand à l’époque parce qu’il avait utilisé le mot « demande » sans savoir que ce mot a un sens impératif en Anglais qu’il n’a pas en Français. Ce fut presque un casus belli. Il y avait dans le gouvernement Trudeau père, un francophone qui ne maitrisait pas l’Anglais !
En ce moment, c’est le parti conservateur qui est complètement à blâmer. Comment peut-il accepter que son ou sa futur-e chef-fe ne pipe mot en Français ? Même avec des promesses de l’apprendre. Comment cela n’est-il pas une condition de candidature avant même la capacité de mettre quelques milliers de dollars sur la table ? Le fait est qu’il est fort possible que ce parti ait un chef unilingue anglophone sans que cela ne fasse le moindre pli sur la différence……du Canada anglais. Pour ajouter l’outrage à l’insulte, tout ce beau monde à voté le printemps dernier pour imposer le bilinguisme aux personnes postulant pour des postes de hauts fonctionnaires.
Ce qui s’est passé mardi le 17 janvier 2017 à Québec, dans la course à la chefferie du Parti conservateur est une insulte envers les francophones du Canada, je le répète. Et cette insulte est possible à cause de la perte de statut de la langue française au pays. Ce cher Justin Trudeau « s’enfarge dans les fleurs du tapis » ; en voulant respecter les deux langues, Il navigue à vue et nous donne la preuve, que dans son esprit, contrairement à ce qu’il veut démontrer, le Français est restreint au territoire québécois, seul lieu où il se voit obligé d’utiliser cette langue même pour répondre à une anglophone qui lui pose une question en Anglais.
Le Parti libéral nous a cassé les oreilles avec l’égalité des deux langues mais il s’agit d’une égalité toute juridique sans grands effets. Depuis la Confédération, la loi sur l’Amérique du nord britannique, les deux langues sont mises à équidistance comme le dit André Robitaille. Comme si elles étaient et avaient jamais été à égalité dans les faits et conçues comme égalitaires. La loi sur les langues officielles, accrochée au rapatriement de la Constitution, ne permettrait-elle pas aux anglophones de se sentir dégagés-es d’efforts pour soutenir et faire se développer la langue française ? De soutenir activement ceux et celles qui à travers le pays luttent pour que leurs pauvres droits soient respectés jusqu’à l’application concrète des institutions nécessaires sur le terrain ? On sait bien que c’est le contraire qui se passe.
Pire, maintenant qu’il n’y a plus de FLQ pour terroriser le Canada anglais, que les efforts pour mener à bien le projet d’indépendance du Québec à bien stagnent en ce moment, nous sommes entrés dans une phase d’indifférence. Dans son dernier rapport, le Commissaire aux langues officielles, M. Graham Fraser souligne que des changements institutionnels ont été apportés dans l’administration de la loi sur les langues officielles mais sans que qu’ils ne traduisent la volonté du gouvernement d’en faire une priorité. Aussi que les instruments pour l’évaluation du statut des langues officielles existent mais que leur mise en œuvre s’avère problématique. Dans une récente déclaration, une des associations de francophones hors Québec, soulignait que les immigrants-es francophones récemment arrivés-es au pays, s’assimilaient à l’Anglais à grande vitesse.
L’actuelle constitution, qui n’a jamais été acceptée par le Québec, a mis le Français dans le grand bain du multiculturalisme où il se noie parmi les autres langues parlées au pays, une langue minoritaire comme les autres. Justin Trudeau insiste beaucoup plus sur le sort des langues amérindiennes que sur celui du Français. Il est vrai qu’elles sont en bien pire situation et qu’on doit d’urgence voir à leur survivance. Il est vrai aussi que perdue dans la mer anglophone de l’Amérique du nord, la langue française ne survivra que si un combat continue et vigoureux ne la soutient. En ce moment, l’indifférence dans les partis fédéralistes à Québec et Ottawa, celle de nos gouvernements quand ce n’est pas une véritable hostilité dans les provinces anglophones, font le lit de la folklorisation de la première langue européenne du pays. Tant d’autres facteurs économiques, de politique mondiale et de démographie travaillent déjà le Français que nos dirigeants-es ne devraient pas mettre plus d’huile dans ce moteur.
Si nous, francophones canadiens-nes, voulons sérieusement maintenir le statut du Français dans ce pays, nous devons absolument détacher la lutte à mener de celle pour l’indépendance. Nous devons absolument créer à travers le pays, les alliances nécessaires parmi les francophones hors Québec et parmi les anglophones attachés-es à cet enjeu, (ils existent) mèneront les luttes nécessaires pour obliger les dirigeants-es de tout bord à respecter sinon voir au développement de la place et du statut du Français dans le pays.