Plus de 91% des mémoires soumis rejetaient le projet. C’est une opposition historique à un projet industriel au Québec. La commission a souligné à quel point le débat sur ce projet est polarisé, tant au Saguenay que dans l’ensemble du Québec. Pour cette raison, elle a déclaré ne pas être en mesure de se prononcer sur l’acceptabilité sociale à l’égard du projet, « même si globalement, selon l’analyse qu’elle en a faite, la somme des risques afférents au projet dépasse celle de ses avantages. »
Dans leur rapport de 506 pages, les commissaires font entendre la parole des citoyens comme celle des experts qui abondent dans le même sens pour démentir les affirmations du promoteur. On peut y lire des citations en provenance de nombreux mémoires de comités membres du RVHQ, de leurs adhérents ainsi que de sympathisants de notre organisation. Le rapport fait référence six fois au mémoire du RVHQ pour indiquer notre point de vue sur six enjeux : les fausses promesses concernant l’emploi en région ; notre vision d’un développement régional axé sur la transition ; la nécessité d’abandonner les énergies fossiles pour contrer la crise climatique ; la dénonciation du mythe du gaz comme énergie de transition ; l’incompatibilité de nouvelles infrastructures gazières avec l’atteinte des cibles nationales de réduction de GES ; la responsabilité sociale d’Hydro-Québec qui doit servir à affranchir notre économie de sa dépendance envers les énergies fossiles.
Les auteurs du rapport font valoir que la rentabilité du projet est incertaine. Ils mentionnent que l’Agence internationale de l’énergie a émis des réserves sur l’utilisation du gaz comme énergie de transition à cause des émissions importantes produites dans les activités d’exploration et d’extraction en amont de la chaîne d’approvisionnement. Les commissaires reconnaissent aussi que le projet de GNL Québec nuirait à la transition énergétique dans les pays clients. Ils soutiennent enfin que les impacts en aval et en amont du projet devraient être pris en compte, notamment les impacts cumulatifs des différentes composantes du projet Énergie Saguenay (comme Gazoduq) et ceux des autres projets envisagés dans la zone portuaire de Saguenay qui pourraient nuire au rétablissement du béluga.
Comme on pouvait s’y attendre, le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, M. Benoit Charette, a choisi de s’accorder un délai avant de recommander au gouvernement d’autoriser ou non le projet Énergie Saguenay. Sa recommandation est attendue en juillet. Le message du juge en chef de la Cour suprême du Canada, M. Richard Wagner, qui défend la taxe carbone pour contrer la menace du réchauffement climatique, devrait l’inciter à entendre raison : « La lutte contre les changements climatiques requiert une action collective à l’échelle nationale et internationale, et ce, en raison du fait que, de par leur nature même, les GES ne connaissent pas de frontières ».
D’ici à l’annonce de l’abandon définitif du projet Énergie Saguenay, il faudra continuer de manifester notre opposition à ce projet. Mais la justesse du rapport du BAPE nous permet d’espérer que lorsque les citoyens, les scientifiques, les élus municipaux et les responsables d’organisations unissent leurs forces pour sauvegarder le bien commun, il devient possible de construire un avenir meilleur.
Un message, un commentaire ?