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Dossier-Brésil. Un régime autoritaire : l’héritier des contre-réformes en pleine crise

Publié par Alencontre le 10 - octobre - 2018

Était prévisible la première place acquise au premier tour des élections brésiliennes, le 7 octobre 2018, par le candidat d’extrême-droite Jair Bolsonaro (Parti social-libéral) et de son colistier au même profil, Hamilton Mourão, un général de réserve mis à la retraite, mais payé, sur décision de Michel Temer, depuis le 28 février 2018. Il est membre du Partido renovador trabalhista Brasileiro qui n’avait pas de représentation fédérale. Les sondages d’Ibope et de Datafolha, que nous avions reproduits, annonçaient l’issue du 7 octobre. Toutefois, l’ampleur des suffrages captés par Bolsonaro n’était pas envisagée par les « analystes » et les forces militantes, diverses, se situant à gauche sur l’éventail politique.

Le nombre d’électeurs et d’électrices ayant voté est de 107’050’530. Les votes nuls 6,14%, les blancs, 2,65% ; le taux d’abstention : 20,3%.

Jair Bolsonaro a réuni 46,03% des voix, soit un électorat équivalent à 49’276’991. Une donnée plus expressive que les pourcentages pour ceux et celles qui ne scrutent pas de près la situation brésilienne. Le candidat du PT (Parti des travailleurs) – sacré par Lula le 11 septembre comme le candidat du PT, Fernando Haddad – a obtenu 29,28% des suffrages exprimés, ce qui équivaut à 31’341’997 électeurs et électrices. Quelque 18 millions de moins.

Un politicien de « premier rang » – membre d’une formation qui a fait les beaux jours de la classe dominante à la sortie de la dictature (1985), le Parti de la social-démocratie brésilienne – Géraldo Alckmin est rétrogradé en quatrième position avec 4,76% des voix, et 5’096’341 de « supporters ».

Sur la troisième place du podium, médaillé de bronze, Ciro Gomes (Parti démocratique travailliste) : 12,47% des suffrages, soit 13’344’353 de votant·e·s. Les médaillés d’argent et de bronze rassemblent, avec quelque 44 millions d’électeurs, 5 millions de moins que Jair Bolsonaro. Ceux qui ne scrutent pas la société et ses tribulations sous l’impact d’une crise multiforme – qui s’accentue depuis 2014 – ont fait preuve d’une grande myopie.

Ils se sont enfermés dans la « tour d’ivoire » du seul monde des partis politiques. Un sujet préféré des articles de la presse superficielle. Or, le pouvoir d’attraction du discours et du personnage de Jair Bolsonaro ne renvoie pas seulement aux forces qui se sont mobilisées à ses côtés, sous diverses modalités, mais aussi à la syntonie qui s’établit entre, d’une part, le vécu d’électeurs potentiels, leurs affects – validés par des expériences propres à la quotidienneté et mémorisés comme des « preuves » –, l’interprétation de leurs intérêts, l’impact sur eux d’un « storytelling » (d’une mise en récit) diffusé par les grands médias, si importants au Brésil et, d’autre part, la figure construite d’un personnage comme Bolsonaro qui imprime un sens à cet agglomérat de ressentiments.

Les écrits sur le fascisme de Trotsky sont fort utiles pour capter des éléments susmentionnés, sans tomber dans le piège des analogies trop rapides. Néanmoins, il ne faudrait pas oublier les traits subtils de l’ouvrage de Wilhelm Reich, La psychologie de masse du fascisme, écrit en 1933, pour commencer à analyser les origines et les traits du tsunami du 7 octobre.

Des résultats qui parlent

Revenons à quelques résultats. Dans un Etat comme celui de São Paulo, le candidat du PSL obtient 53% des suffrages (12’378’012 d’électeurs) ; celui du PT : 16,42% (3’833’982 d’électeurs). Il est toujours possible d’argumenter – et cela est vrai – qu’Haddad, ancien maire de São Paulo, avait subi une défaite électorale saisissante en octobre 2016 face à un nouveau venu qui prétendait au poste stratégique de maire de la plus grande ville du Brésil : João Doria Junior du Parti de la social-démocratie brésilienne. Ce dernier avait obtenu au premier tour des « municipales » 53,3% des voix contre 16,7% pour Fernando Haddad. Cette fois les proportions du résultat électorale sont similaires. Si ce n’est que l’opposant n’est pas un multimillionnaire comme João Doria Junior, fils d’un politicien connu, mais le capitaine à la retraite Jair Bolsonaro. Soit un admirateur explicite de la dictature, de l’armée, de la police, des tortionnaires, de l’autodéfense armée, un sexiste et homophobe assumé, de même que le défenseur, cela va de soi, des « valeurs de la famille », déployant donc le drapeau de l’opposition au droit à l’avortement. Ses trois fils n’ont-ils pas connu un succès analogue lors de ces élections ? Et les évangélistes réactionnaires n’ont-ils pas fait de Jair leur « messie » politique, lui dont le prénom sonne bien : Jair Messiah Bolsonaro ?

Nous citerons, dans cet article, les Etats où Bolsonaro a obtenu la majorité absolue : Rio Grande do Sul (52,63%), Paraná (56,89%), Matto Grosso do Sul (55,06%), Goias (57,24%), Espirito Santo (54,76%), Matto Grosso (60,04%), Rondonia (62,24%), Acre (62,25%), Roraima (62,97%), Rio de Janeiro (59,79%). Fernando Haddad n’a réuni une majorité absolue qu’à Bahia (60,28%), Piauí (63,4%), Maranhão (61,26%) et Sergipe (50,09%). Fernando Haddad n’arrive en première position que dans les Etats suivants : Pernambuco (48,87%, avec Bolsonaro à 30,57%) ; Rio Grande do Norte (41,19%, avec Bolsonaro à 30,21%), Paraíba (45,46% avec Bolsonaro à 31,3%), Alagoas (44,75%, avec Bolsonaro à 34,4%). Autrement dit, le candidat du PT a obtenu une majorité absolue dans quatre Etats du Nordeste.

Enfin, parmi les députés fédéraux ayant rassemblé le plus de votes, se détache en première place le fils de Jair Bolsonaro, avec 1’843’735 suffrages à São Paulo. En deuxième position, Joice Hasselmamn (avec 1’078’666 votes) à São Paulo, membre du PSL depuis avril 2018. Certes, par le passé, elle était très présente dans les médias télédiffusés et les réseaux sociaux, ainsi qu’animatrice de relief des manifestations, en 2015 et 2016, contre Dilma Rousseff. Son apologie du juge Sergio Moro n’est pas passée inaperçue, ainsi que son soutien à la police fédérale lors de la répression de manifestations.

Les militaires et le « garde-à-vous » face à l’histoire

Major Olimpio, membre du PSL, est élu au sénat dans l’Etat de São Paulo avec 25,81% des suffrages et arrive en première position, suivi par Maria Gabrilli du PSDB qui réunit 18,59% des suffrages.

Ce membre de la Police militaire – une institution militaire réputée pour ses talents répressifs – a exprimé son point de vue, plus « nuancé » que son patron, sur la dictature militaire : « L’histoire du régime militaire a été racontée que par un seul côté, de manière incroyable, par les vaincus [la gauche donc]. Normalement quand on raconte une histoire c’est celle des vainqueurs, dans le cas du régime militaire ce furent les vaincus. Il existe une histoire qui un jour va être à nouveau contée, pour trouver un équilibre ». Major Olimpio a-t-il lu Enzo Traverso ou Michael Löwy, à l’envers ?

A l’endroit, la mémoire positive de la dictature se concrétise par la présence (déjà) de 22 élus ayant des liens avec les forces armées : police militaire, militaire à la retraite, membre des forces armées, pompiers militaires, dont 13 sont du PSL (Folha de São Paulo, 9 octobre 2018). Parmi les conseillers de Jair Bolsonaro se trouve le général de réserve Augusto Heleno Ribeiro Pereira. Il a développé sa carrière militaire ascendante dès 1969. Il commanda les troupes de la MINUSTAH (Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti), de juin 2004 à septembre 2005. Dans une tradition qui s’est exprimée parmi des militaires français fort à droite durant la guerre d’Algérie, Augusto Heleno a émis des critiques sur cette mission. Pourquoi ? Elle n’a pas combiné une politique de sécurité stricte avec des projets de développement « social », un autoritarisme pour le bien d’un peuple maté. Jair Bolsonaro avait envisagé de l’inscrire comme vice-président sur le ticket présidentiel. Il refusa. Mais il confirma son soutien au capitaine.

Les liaisons entretenues par Jair Bolsonaro avec des cercles consistants de l’armée – dont la continuité et la place post-dictatoriale au Brésil n’ont jamais été remises en cause – existent depuis des années. Elles se sont accentuées depuis un an, dans les deux sens. Les sondages parmi les militaires montraient, durant la dernière période, l’influence croissante de Bolsonaro qui remplissait aussi le rôle d’une assurance anti-PT.

L’armée se présente comme non seulement comme un élément d’ordre, mais elle fait écho à une vaste « désillusion ». Cette dernière trouvait une traduction cernée par l’enquête d’opinion faite par le Pew Research Center-Global. Attitude&Trends (16 octobre 2017) : la « démocratie représentative » est considérée comme « très bonne » par seulement 8% de l’échantillon sondé au Brésil ; un pourcentage inférieur à celui du Mexique qui se situait à 9%. La dernière étude du World Economic Forum (WEF) portant sur « la compétitivité mondiale » place à la 137e place, sur 138 pays examinés, la « perte de confiance des Brésiliens face à la classe politique ».

Désenchantement et « besoin d’ordre »

Ce désenchantement possède plusieurs sources, parmi lesquelles la corruption généralisée. Elle est le produit d’une connexion instituée depuis longtemps entre, d’un côté, les grands travaux d’infrastructure de ce « pays continent » ainsi que son économie extractiviste et agro-exportatrice et, de l’autre, les instances politiques contrôlées par les partis des dominants ou ceux se mettant à la disposition du capital, comme le fit directement un secteur de l’appareil du PT. A cela s’ajoute l’impact sur l’emploi de la profonde récession – une perte d’emplois d’environ 20 millions, directe ou indirecte, ayant les formes d’une précarisation extrême (voir Ricardo Antunes à ce propos) –, la paupérisation et la montée de la violence qui est diffusée sur le mode d’un cumul d’événements anecdotiques qui saturent « l’information » sur les chaînes télévisées.

La droite extrême et l’extrême-droite ont compris qu’une fenêtre de tir idéale se présentait. Dès lors, les thèmes diffusés par Bolsonaro et ses réseaux ont rempli un vide politique, avec du « nouveau ». Ce qui dans un régime de temporalité accélérée et de renouvellement générationnel se mesure en semaines, pour ne pas dire moins.

Ce besoin « ordre » – sans « progrès », ni « amour », ce qui était la formule ternaire initiale empruntée à Auguste Comte pour en faire le logo du drapeau brésilien – est d’autant plus nécessaire pour le « monde des affaires ». Ralliées momentanément à un Michel Temer, défait en termes de crédibilité politique, pour accélérer des contre-réformes, des fractions des classes dominantes vont faire face, à court terme, à une difficulté. Les dépenses budgétaires « obligatoires » sont à hauteur de 90% composées par les rubriques suivantes : santé, éducation, salaires de la fonction publique, système de retraite, « aides sociales », subventions diverses. Dès lors, comme l’explique William Jackson, chef économiste de Capital Economics pour les « marchés émergents » : « Beaucoup des mesures nécessaires pour améliorer les finances publiques sont très impopulaires, mais elles doivent être appuyées par de fortes majorités pour aller de l’avant. » Jackson soulignait auparavant que : « Les investisseurs paraissent être plus à l’aise avec Jair Bolsonaro qu’ils considèrent plus favorable aux marchés, face au profil plus étatiste de Fernando Haddad » (El Pais, 7 octobre 2018).

A défaut de majorité populaire, autrement dit d’une résistance sociale décidée – car la majorité parlementaire peut être obtenue – « l’ordre » pourra être imposé par les composantes des forces armées. La criminalisation des mouvements sociaux et de leurs représentants fait partie de l’agenda de Bolsonaro. Ses formules « un bon voleur est un voleur mort » ; « tirez d’abord, interrogez ensuite », « tuez-les » à propos des militant·e·s du PT peuvent prendre une tournure plus institutionnelle dans la mise en place d’un régime autoritaire. Un tel régime peut avoir recours, de plus, à la marge, à des bandes fascisantes actives sur le terrain pour semer la crainte. L’expérience de la militarisation de Rio – décidée formellement par Temer – servira (et sert déjà) de banc d’essai utilisable pour un futur pouvoir autoritaire fédéral.

Jair Bolsonaro est depuis 27 ans député au parlement. Cette présence est due à une fonction souvent qualifiée au Brésil de « député du bas clergé » ; ce qui signifie qu’il avait comme rôle celui de rabatteur pour faire voter en faveur des caciques.

Aujourd’hui, il occupe une place dans le « haut clergé ». Et l’appui lui a été fourni médiatiquement par un richissime magnat de la communication : Edir Macedo. Ce dernier a fondé l’Eglise universelle du règne de Dieu et fait construire un temple pouvant réunir 10’000 fidèles (payant) à São Paulo ; une prétendue réplique du temple de Salomon, placée dans le quartier populaire de Bras, l’un des 96 districts de la mégalopole.

Les diverses communautés évangéliques regroupent plus de 22% de la population du Brésil, soit quelque 42 millions de personnes. Leur présence parlementaire est notable et les candidats cherchent leur appui. De leur côté, ces diverses Eglises évangéliques, qui sont des marchands du temple fort actifs, attendent des politiques des intercessions qui favorisent leur statut de contribuables.

Edir Macedo a soutenu, à l’époque, Lula et Dilma Rousseff. Cette fois son choix s’est porté sur Jair Bolsonaro. Il existe un conglomérat de fractions parlementaires qui a pour acronyme : BBB. Autrement dit : Bala (la balle de fusil), Boi (le bœuf), Biblia (la bible).

L’appui d’Edir Macedo à Bolsonaro s’est traduit par un accès à sa chaîne TV Record, très regardée, dans un pays où la décision de vote est fortement influencée par la télévision. Selon Ronaldo Almedia, professeur à l’université UNICAMP et membre de Centre brésilien d’analyse et de planification (Cebrap) : « Depuis septembre s’est produit un déplacement considérable des intentions du vote évangélique en direction de Bolsonaro. Bolsonaro représente une sensation d’ordre et d’autorité qui prend dans cette partie de la population, encore plus dans un contexte de régression économique et morale » (El Pais, 8 octobre 2018). Ce n’est pas un hasard si à l’occasion du dernier débat, avant la journée 7 octobre, Jair Bolsonaro a donné un long entretien à TV Record, laissant les autres candidats « discuter entre eux ». Lui, pour « raisons médicales », ne pouvait que se confier, en direct, aux téléspectateurs qui « refusent la pourriture morale diffusée par la gauche » comme l’explique le grand prêtre évangéliste de la Victoire du Christ.

Tisser des liens avec le grand capital

Dès le 8 octobre, le conseiller économique de Bolsonaro, Paulo Guedes, a pris contact avec des membres influents du « monde économique ». Paulo Guedes n’est pas qu’un élève de l’école de Chicago et un fanatique des privatisations. Il dirige un fonds d’investissement – Bozano Investimentos Gestão de Recursos Ldta – qui déclare 3,5 milliards de R$ sous gestion. Certes, la somme de 945 millions de dollars n’est pas énorme. Mais ce fonds se concentre sur le « venture capital » (prises de participation) et le « private equity » (achat, « redressement » et revente d’entreprises), ce qui facilite les contacts et peut être un lieu de rencontre dans la perspective d’une vague de privatisations.

Ainsi la Fohla de São Paulo du 9 octobre énumérait une série de contacts établis par Paulo Guedes en vue de la formation d’un gouvernement et de nominations à des postes influents. Etaient mentionnés : Alexandre Bettamio, président pour l’Amérique latine de Bank of America ; João Cox du conseil d’administration de TIM (filiale de Telecom Italia Mobile) qui dispose d’un rôle de premier plan dans la télécommunication mobile (GSM) au Brésil ; Maria Silvia Bastos Marques, membre de la direction de Goldman Sachs Brésil et ex-présidente de la BNDES (Banque brésilienne de développement), créée en 1952 dans une perspective développementiste, mais sa fonction a bien changé ; Roberto Campos Neto, directeur de Santander Brésil (filiale de Santander Espagne).

Le poste de patron de la Banque centrale (BCB) sera crucial. L’actuel gouverneur, Ilan Goldfajn, économiste israélien et gouverneur de la BCB depuis juin 2016, semble ne pas vouloir rester à ce poste. Qui va être choisi en cas de victoire de Bolsonaro ? Ce choix aura une consonance politique analogue à celui de Lula en 2003, lorsqu’il lança « son » dévolu sur Henrique Mereilles qui occupa ce poste jusqu’en 2010. Mereilles, lorsqu’il officiait aux Etats-Unis, était un proche de Bill Clinton. Il dirigea jusqu’en 1999 la BankBoston internationale, puis après la fusion de cette dernière avec le Fleet Financial Group, Mereilles devint le président de la FleetBoston Financial’s Global Banking, avant de revenir au Brésil en 2002.

Pour terminer ce bref aperçu des alliances socio-économiques que se doit de passer un potentiel président comme Bolsonaro, il ne faut pas oublier le secteur extractiviste. Le quotidien économique O Valor cite les contacts pris avec Roberto Castello Branco, gouverneur de la BCB, ex-conseiller de la direction du grand groupe Vale (minerai, gaz, pétrole), aujourd’hui à la tête de l’importante communauté professionnelle que représente la Fondation Getulio Vargas. Le nom de Fabio A. Abraho a aussi été mentionné, il siège à la direction d’Infra Partners, un géant de la logistique. Il est passé chez Vale.

Pour le capital, dans cette crise multiface, Bolsonaro président se doit d’encadrer une base populaire, de réprimer en criminalisant les résistances sociales et démocratiques. Pour cela il peut prendre appui conjointement sur les évangéliques et les divers corps d’armée – deux facettes de l’ordre – et engager une vague de contre-réformes. La nature de ce régime s’éclairera dans la foulée d’une élection victorieuse. Et si c’est le cas, ce basculement socio-politique au Brésil s’inscrira vraiment dans la fin – prévisible depuis quelques années – du cycle dit « progressiste » en Amérique latine, avec des similitudes à l’échelle mondiale. Ce qui peut être le sujet d’un autre article après le 28 octobre.

Pour l’heure, la mobilisation pour battre le ticket Bolsonaro-Mourão dans la rue et dans les urnes est une priorité, comme l’expliquent les trois articles que nous publions ci-dessous et qui proposent de voter contre Bolsonaro, pour Haddad. (10 octobre 2018)


Votez contre Bolsonaro. « L’alternative de gauche n’a pas pris fin le dimanche 7 octobre »

Par Esqerda online, 7 octobre 2018

Le premier tour des élections présidentielles est terminé. Le dénombrement des suffrages étant en cours de finalisation, Jair Bolsonaro (PSL) est en première place [éditorial écrit avant le décompte final]. En deuxième position, Fernando Haddad (PT). Il manque un nombre limité de suffrages au candidat du PSL (Parti social libéral) pour ne pas avoir gagné déjà au premier tour.

De cette façon, vont s’affronter dans une sorte de duel, à l’occasion du deuxième tour des élections, un candidat néofasciste d’extrême droite (Jair Messiah Bolsonaro) et le représentant du lulisme (Fernando Haddad). Une bataille est annoncée dans laquelle la neutralité n’est pas une option. Il n’y a qu’un choix dans cet affrontement électoral pour la gauche socialiste : vaincre la menace néofasciste lors du second tour des élections.

Il faut mesurer avec exactitude ce qui est en jeu. Le danger frappe à la porte. L’arrivée de Jair Bolsonaro à la présidence représente la victoire du plus barbare parmi les projets d’oppression et d’exploitation capitalistes au Brésil.

J. Bolsonaro au pouvoir implique que les droits fondamentaux des masses laborieuses – sociaux et du travail, tels que la retraite et le 13e salaire – soient mis en lambeaux, sous les effets d’une radicalisation des contre-réformes mises en œuvre par Michel Temer. Au pouvoir, Bolsonaro redoublera les menaces contre la vie des femmes, des Noirs, des LGBT, des autochtones et des immigrés. Se produira une accélération sans précédent de l’escalade répressive contre de la population noire et des populations pauvres de notre pays. Au pouvoir, Bolsonaro représente un danger imminent de suppression des droits démocratiques, déjà limités, en particulier pour les organisations de gauche, les syndicats et les mouvements sociaux. Bolsonaro au pouvoir, c’est le retour des nostalgiques de la dictature (1964-1985), des factieux et des tortionnaires qui seront aux commandes du pouvoir exécutif fédéral.

Jair Bolsonaro s’oppose à la corruption pour gagner des voix, mais ses principaux partisans sont des politiciens corrompus et des hommes d’affaires corrompus. Les vieux renards – membres de la PSDB (Parti de la social-démocratie brésilienne) et ayant utilisé l’alliance avec le PT (Parti des travailleurs) dans les gouvernements (à l’échelle fédérale et des Etats) – embrassent maintenant le capitaine [Bolsonaro était capitaine et a été mis à pied, avant d’initier sa carrière de député fédéral durant 27 ans].

La mission de Bolsonaro est de faire ce que Temer n’a pas réussi à faire : broyer complètement les droits des travailleurs et travailleuses. Pour ce faire, il veut imposer un régime autoritaire afin d’empêcher toute tentative de résistance. En un mot, Jair Bolsonaro est le capitaine qui servira les banquiers et les corrompus pour massacrer la classe ouvrière.

Pour toutes ces raisons : « Jamais lui ! », « La dictature plus jamais ! » « Défendons nos droits ! » Les femmes qui sont descendues dans la rue le 29 septembre [voir l’article publié sur ce site en date du 20 octobre] ont montré et ouvert la voie. Nous sommes la majorité. La classe ouvrière et les opprimé·e·s représentent une force gigantesque. Dans les rues, nous pouvons vaincre le néofascisme, et aussi dans les urnes son principal représentant : J. Bolsonaro. Lors du deuxième tour, nous voterons la liste 13 pour empêcher Jair Bolsonaro d’être élu président.

Nous avons de profondes divergences avec le parti de Lula (PT). Nous sommes une opposition de gauche depuis 13 ans [le PSOL – Parti socialisme et liberté a été créé en juin 2004], entre autres parce que nous nous opposions à la stratégie de conciliation avec les riches, les puissants et les corrompus, les mêmes personnes qui ont frappé en 2016 [avec le coup d’Etat institutionnel contre Dilma Rousseff qui a conduit à sa destitution]. La frustration et le désenchantement ont ouvert la voie à Bolsonaro. Jusqu’à présent, malheureusement, le PT ne semble pas avoir tiré les leçons. Il persiste en commettant les mêmes erreurs.

Lors de ces élections, le Parti des travailleurs a scellé des alliances avec des dirigeants réputés, tels que Renan Calheiros [ministre de la Justice sous le gouvernement de Fernando Enrique Cardoso d’avril 1998 à juillet 1999, puis deux fois président du Sénat de février 2005 à décembre 2007, puis de février 2013 à février 2017, sous accusation pour corruption] et Eunicio de Oliveira [sénateur du Ceará, grand propriétaire, ministre sous le gouvernement Lula en 2004-2005], tous deux membre du PMDB (Parti du mouvement démocratique brésilien).

Dès le premier tour, Haddad a lancé des signaux en direction de la classe dominante, suggérant qu’il maintiendrait l’ajustement structurel [coupes budgétaires, entre autres] et les contre-réformes du programme, bien que selon des modalités plus lentes et moins brutales. Nous avertissons que, dans le contexte actuel de profonde crise sociale et politique, avec une extrême-droite influençant des dizaines de millions de personnes, de nouvelles combinaisons électorales avec la droite pourraient avoir des conséquences encore plus tragiques, ouvrant peut-être les portes à une nouvelle et encore plus dangereuse escalade dans la logique du coup d’Etat.

Cette grave erreur ne peut plus être répétée. Fernando Haddad, lors de ce second tour, doit s’engager publiquement auprès de la classe ouvrière et des couches populaires à annuler toutes les contre-réformes de Michel Temer (président), à refuser d’accepter toutes contre-réformes des retraites qui supprimeraient des droits et à rompre les alliances avec la droite et la bourgeoisie corrompue. En outre, il est nécessaire de défendre un programme qui fasse obstacle à la vague rétrograde de privatisations et les mesures répressives, telle la « loi antiterroriste » promulguée par Dilma Rousseff, ratifiée finalement en mars 2016. Il est également nécessaire de mettre fin aux orgies des banques [les gains obtenus sur les obligations du Trésor et les opérations d’investissements spéculatifs internationaux], de défendre d’une manière déterminée les droits des femmes, des Noirs, des LGBT et des peuples autochtones.

De plus, il est nécessaire d’ouvrir toutes les archives de la dictature et de juger les tortionnaires et les meurtriers du régime militaire. Ils ne peuvent rester impunis et utiliser les élections pour revenir au pouvoir. Avec les travailleurs et travailleuses organisés et mobilisés, il est possible de défaire les mesures issues du coup d’Etat et de vaincre l’extrême droite. La « gouvernabilité » doit être garantie par la force présente dans la rue et non par des accords trompeurs avec la fraction parlementaire patronale et corrompue qui domine le Congrès national.

Au premier tour, nous avons fièrement construit la candidature de Guilherme Boulos : avec le PSOL, le PCB­-Parti communiste brésilien, le MTST-Mouvement des travailleurs sans toit et l’APIB-Articulação dos Povos Indígenas do Brasil. Nous avons présenté un programme anticapitaliste visant à construire un Brésil pour et par les travailleurs et travailleuses, pour et par les opprimé·e·s et les jeunes, sans alliances avec la droite et la bourgeoisie. Nous combattons et nous continuerons à combattre le fascisme de toutes nos forces. Le projet visant à renforcer une nouvelle alternative de gauche n’a pas pris fin le dimanche 7 octobre. Après le précieux mouvement-campagne qui a pris son essor, nous poursuivrons la bataille pour la réorganisation de la gauche.

Nous sommes le PSOL et nous construisons une stratégie socialiste et révolutionnaire pour le Brésil. Nous voterons Haddad (PT) le 28 octobre afin de vaincre Bolsonaro. Nous mènerons une forte campagne dans la rue, sans compter nos efforts, en dialoguant avec les travailleurs et travailleuses, avec les jeunes et les opprimé·e·s, non seulement pour empêcher la victoire de l’extrême droite néofasciste, mais également pour préparer et construire les luttes urgentes de demain. (7 octobre 2018 ; éditorial publié sur le site Esquerda online ; traduction A l’Encontre)


#EleNão.

Pour vaincre Bolsonaro et défendre les droits, le PSOL soutient au second tour le vote pour Fernando Haddad et Manuela D’Ávila

Par Commission exécutive du PSOL (Parti Socialisme et Liberté)

Les élections du premier tour ont fini par maintenir la même situation d’instabilité et de polarisation provoquée par le coup d’Etat institutionnel d’août 2016 [qui a conduit à la destitution de Dilma Rousseff et le transfert du mandat présidentiel à Michel Temer, ex-vice-président qui faisait partie du ticket présidentiel de Dilma Rousseff en octobre 2014], qui a approfondi la crise économique et sociale qui était en train de se développer. Il a également approfondi une crise de représentation politique d’une telle ampleur qu’elle a créé les conditions pour l’émergence d’une candidature d’extrême droite qui est arrivée au second tour des élections avec le soutien d’une partie considérable des classes dominantes. L’élection a frappé durement différents « caciques » politiques, permettant à l’extrême-droite de capitaliser la rage sociale contre le système.

Le second tour (vote le 28 octobre) est la continuité de la lutte contre le fascisme et le coup de 2016. La tâche centrale du moment présent est donc de vaincre Jair Bolsonaro. Sa défaite ouvre la possibilité de bloquer l’agenda initié par Temer, de garantir la souveraineté nationale et de réunir les conditions pour continuer à défendre les conquêtes démocratiques face à l’autoritarisme. Pour cela, le PSOL soutiendra désormais la candidature de Fernando Haddad et de Manuela tout en maintenant les divergences politiques et en préservant notre indépendance. Nous appelons tous nos militants à descendre dans les rues pour continuer à dire haut et fort « #Ele não » (lui non).

Le PSOL et l’alliance que nous avons formée au premier tour autour de la candidature de Guilherme Boulos et Sonia Guajajara, avec les mouvements sociaux, le PCB (Parti communiste brésilien), des intellectuels et des artistes, continueront à défendre la dignité du peuple brésilien contre les inégalités et les privilèges. Cette candidature marque le début d’un nouveau cycle dans la gauche brésilienne et le PSOL est fier d’avoir été le creuset de cette alliance et d’avoir stimulé cette construction. Pour cela nous continuerons à défendre les causes qu’aucune autre candidature n’a eu le courage de défendre.

Nous serons dans la campagne pour battre Jair Bolsonaro et élire Haddad et Manuela D’Avila pour défendre la souveraineté nationale et les droits de la majorité de notre peuple. Nous serons dans la rue et devant les urnes pour exiger l’abrogation de toutes les mesures du gouvernement Temer, contre la réforme des retraites, la réforme du travail, la fin des massacres contre la population noire, la fin des violences contre la communauté LGBT, la démilitarisation de la police, la légalisation des drogues, la démarcation des terres indigènes et des « quilombolas » (terre des descendants des esclaves noirs qui ont échappé à leurs propriétaires), la déforestation zéro, et la défense des droits des femmes et de toutes leurs demandes ; de l’égalité salariale à la lutte contre les diverses expressions (harcèlement, violence..) du machisme, la légalisation de l’avortement.

De plus nous n’abandonnerons pas le combat pour notre souveraineté énergétique [face aux privatisations massives] avec la défense du Présal [les ressources pétrolières se situant en grande profondeur, sous une couche de sel], de Petrobras et d’Electrobras, dans la perspective d’une transition du modèle énergétique en place et de celui régissant l’organisation des transports, de la mobilité.

Le PSOL comprend que la lutte pour vaincre Jair Bolsonaro au second tour revient à défendre et à élargir les droits et non pas à les négocier. Nous continuerons à affronter les privilèges et à lutter pour que le peuple occupe le centre des décisions à prendre. Ce n’est qu’ainsi qu’il sera possible de garantir un cycle d’espoir, de justice, d’égalité et de souveraineté au Brésil.

Nous demandons à nos militants de construire de larges comités pour le « EleNão ». L’exemple des femmes qui sont descendues dans les rues le 29 septembre dernier nous inspire et nous renforce pour que de nouvelles manifestations de masse aient lieu pour vaincre l’extrême-droite. Nous participerons pleinement à la campagne pour mener Fernando Haddad et Manuela D’Avila à la victoire afin que la volonté du peuple soit respectée. Là où il y aura un second tour pour les gouvernements des Etats, nous demandons à nos militant·e·s d’appuyer des candidatures qui s’opposent au projet de Bolsonaro. Dans chaque Etat les instances locales du PSOL définiront les moyens de contribuer activement à la mobilisation populaire pour surmonter le retard, en priorisant la construction d’espaces pluriels qui intègrent toutes celles et ceux qui défendent la démocratie, tout en maintenant nos principes et la cohérence qui représente le caractère politique du PSOL.

Nous continuerons dans les rues, ensemble, sans crainte, pour changer le Brésil. Ele Não-Lui non. (São Paulo, 8 octobre 2018 ; traduction A l’Encontre)


Bolsonaro n’est pas imbattable

Par Valério Arcary

Rien n’est perdu. Le second tour est une nouvelle élection. Les tournants sont possibles et beaucoup se sont déjà produits. Donc : sérénité et fermeté. Nous avons « gagné du temps » le 7 octobre ; la victoire de Bolsonaro était proche, c’est vrai. Mais il reste de réelles possibilités. Tout dépendra, comme dans toute lutte difficile mais pas encore conclue, de notre stratégie et de notre disposition à agir.

Cela dit, deux observations très rapides.

Jair Bolsonaro fut grandement sous-estimé. Il a chevauché une vague électorale impétueuse, un mouvement sismique profond. Ce n’est pas vrai, cependant, que c’était une réelle surprise. Soyons sérieux, ça ne l’était pas. De fait, c’était prévisible depuis longtemps, au moins depuis un an et de manière plus que probable depuis le coup de poignard [le 6 septembre 2018]. Et cela a montré que la politique et les événements comptent. La politique n’est pas qu’un discours, même si ce qui est dit et proposé est important. D’autant plus que le Brésil d’aujourd’hui n’est plus le même qu’il y a trente ans. Il est plus urbanisé et éduqué. Mais les préférences politiques, dans une société fracturée comme le Brésil, répondent à des alignements de classe, qui sont à leur tour déterminés par l’expérience pratique. Les idées comptent, mais ces deux éléments – les intérêts et la vie « vécue » – en constituent un élément clé.

L’immense majorité des masses laborieuses brésiliennes, par conséquent de la population en général, ne se définit pas, au plan politique, comme de gauche ou de droite, au même titre que chez nos voisins uruguayens ou argentins, plus politisés. Cela n’autorise pas la conclusion qu’il est indifférent de savoir que Jair Bolsonaro est un néofasciste, comme certains l’affirment, obstinément, dans la gauche. Car cela – sa caractérisation – nous aide à comprendre quels sont les flancs les plus fragiles de Bolsonaro où nous devons frapper.

Le noyau dur du vote néofasciste est la petite bourgeoisie, mais son actuelle audience est beaucoup plus large. Un vote de 46% n’est possible qu’avec le soutien, à l’échelle de dizaines de millions de personnes, de secteurs populaires. Ce que le vote du 7 octobre a révélé tout d’abord, c’est la force du camp social et politique qui est descendu dans les rues entre 2015 et 2016 et qui a abouti à la destitution de Dilma Rousseff en août 2016, qui a créé une situation mettant sur la défensive les travailleurs et travailleuses aussi bien que les couches populaires.

Mais les élections ont également montré que les forces politiques qui ont soutenu le gouvernement Michel Temer se sont effondrées. Jair Bolsonaro défend le programme du gouvernement Temer, mais strictement avec des méthodes sauvages. Il affirme qu’il est nécessaire de mettre fin aux programmes sociaux impliquant un transfert tels que Bolsa Familia. [Le nombre de bénéficiaires de la Bourse Famille a diminué sous Dilma Rousseff, sur la « proposition » du ministre des Finances Joaquim Lévy en 2015 ; une réduction s’est encore faite en septembre 2016 sous la présidence de Michel Temer, ce qui a provoqué une montée de l’extrême pauvreté, estimée par l’IBGE de 11% durant la seule année 2017. A cela s’ajoutent un creusement des inégalités et une baisse de la scolarisation car la réception de la Bourse famille était liée à une condition : la scolarisation des enfants. En juin 2018, le montant pour un bénéficiaire était de 41 reais (R$) jusqu’à un maximum de 205 R$ par famille, soit 54 CHF. Quelques 13,4 millions la reçoivent.] Bolsonaro affirme qu’il veut empêcher toute réforme agraire et urbaine. Il prétend privatiser tout ce qui est possible. Tout cela implique que, selon lui, il y a trop de droits sociaux et que les personnes doivent être prêtes à perdre leurs droits afin que les investissements reprennent.

L’élection a également révélé qu’une partie des masses populaires, en particulier dans le Nord-Est, maintient une référence dans le lulisme et dans le PT, en raison du souvenir de quelques réformes sociales au cours des années de croissance économique [la récession s’est déclenchée dès 2014 et s’est accentuée fortement en 2015 et 2016…].

Les fractions les plus larges de la bourgeoisie seront désormais avec Bolsonaro au second tour. Mais la stratégie du noyau dur de la bourgeoisie est déjà définie. Il maintiendra une position ambiguë pour faire en sorte que Fernando Haddad reprenne la politique économique qui répond à leurs intérêts : ajustement budgétaire, réforme des retraites, etc. Et faire adopter à Bolsonaro une orientation de concertation institutionnelle des relations de pouvoir, en acceptant des négociations qui garantissent la sous-traitance de postes clefs du gouvernement à des techniciens de confiance.

Ainsi, la plus grande erreur de Haddad serait de céder à la pression bourgeoise. Ce serait une erreur politique, mais aussi une erreur électorale. Le vote pour Haddad, Ciro Gomes, Boulos pourrait atteindre 42%. Il n’est pas du tout évident que tous les suffrages de Ciro Gomes (Parti travailliste démocratique) puissent être transférés vers F. Haddad. Un transfert « total » ne se produit jamais. Une partie des 1% attribués à Marina Silva (REDE, écologiste) pourrait également être attirée en direction de F. Haddad. Ainsi que des fractions des suffrages de la classe moyenne en faveur d’autres candidats. Car bien qu’ils aient été repoussés par le PT, la figure de Haddad suscite moins d’hostilité et, surtout, ils craignent le danger d’un fasciste à la présidence.

Néanmoins, défendre une ligne de classe est la clé pour conserver les votes obtenus par le PT au premier tour et pour s’étendre. Le moment est venu de mettre la classe ouvrière en mouvement. Il est temps pour les syndicats, les mouvements populaires et aussi le mouvement étudiant. Ainsi que pour les mouvements féministes qui ont construit #Elenão et sont l’embryon du mouvement antifasciste. Car, en plus de la télévision [débat entre Haddad et Bolsonaro], il va falloir que des forces se mobilisent dans les rues. « Beaucoup de force » signifie : aller au-delà du million qui a déjà manifesté le 29 septembre. Il faut aussi s’adresser au camp de l’abstention et du vote nul et blanc qui totalise 29%. La tendance est à ce que cette fraction des électeurs et des électrices inscrites se réduise. Extirper des votes en faveur de Bolsonaro dans les classes populaires – bien que cela soit très difficile – serait également nécessaire. Des alliés importants dans ce conflit seront les secteurs lucides de l’Eglise catholique [étant donné les rangs évangélistes qui ont massivement soutenu Jair Bolsonaro]. (Article publié le 9 octobre 2018 sur le site Esquerda online ; traduction A l’Encontre)

Valério Arcary est actif dans le courant Resistencia qui fait partie du PSOL. Il est éditorialiste du site Esquerda online. Professeur émérite de l’Institut Fédéral d’Education, de Science et de Technologie-IFSP. Docteur en histoire.

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