La stratégie patronale : stratégie pensée ou à la ‘va comme je te pousse’ ?
Lutte Commune, rencontre de personnes syndicalistes de gauche en mode réflexion, a tenu une fin de semaine de formation début février dont une session sur le Front commun. Des éléments de réponses ont été apportés à cette question. La stratégie à la ‘va comme je te pousse’ comptait des adeptes.
À la ‘va comme je te pousse’ signifie que le gouvernement ne sait pas ce qu’il veut, improvise et s’ajuste en fonction des événements.
C’est sous-estimer le gouvernement caquiste de penser cela.
La négo a été préparée avec soin. Le cadre financier est clairement mis sur la table. C’est le même que les négos précédentes. C’est le même que recommande l’Organisation Mondiale du Commerce soit la barre du 2%. Le gouvernement a les coffres plein d’argent. Qu’importe. Il faut suivre les recommandations du capitalisme mondial. Ensuite il propose une division entre les membres pour mieux faire passer son cadre soit favoriser les jeunes professeurs et les personnes préposées aux bénéficiaires. Basta le reste du personnel de la fonction publique. De quoi susciter la grogne entre les personnes salariées. Et le gouvernement de sourire... Et enfin il tente de créer son propre rapport de force en innovant avec les Forums. Réunir des partenaires pour discuter de trois points précis, c’est créer un rapport de force plus grand en lien avec les partenaires civils ; tout comme les syndicats tentent de le faire avec les personnes usagères, leurs familles et la population en général. C’est un projet innovant.. oh que oui... mais sur le dos des travailleurs et travailleuses de la fonction publique.
Ne pas voir cette stratégie super réfléchie c’est d’abord ne pas en faire l’analyse et c’est surtout sous-estimer ce gouvernement et lui accorder la chance du coureur. C’est un aveuglement certain dont la gauche n’est pas exclue.
Et le front commun dans tout cela ?
Ce sont les directions syndicales qui vont à la va comme je te pousse. Elles abordent les négos en ordre dispersé : pas de revendications communes, pas de plan d’action commun quand il y a plan d’action. C’est à qui s’arrachera le maigre surplus que laisse miroiter Dubé (reste environ 1% pour arriver à 2% par année avec les offres patronales).
Mais, voyez-vous : on peut se poser la question : un front commun ça fait le jeu du gouvernement. C’est dans le discours actuel des directions.
Un front commun c’est d’abord la centralisation des offres, des actions du personnel de la fonction publique. C’est le rapport de force de 500,000 travailleurs et travailleuses qui parlent d’une même voix. Et cela ferait le jeu du gouvernement ? Wake up s’il vous plaît. C’est affronter le gouvernement en ordre dispersé qui affaiblit les négos.
Il faut changer la stratégie : il y a eu plusieurs fronts communs et on n’a rien gagné. Posons-nous la question pourquoi ? La négo de 2015 était bien partie, la mobilisation était présente sur les lignes de piquetage et surtout, surtout, la population était en soutien. Rien au bout du compte. Qui a signé l’entente ? Qui s’est situé dans le cadre du 2.5 du gouvernement libéral ? Les directions syndicales qui ont refusé d’aller au front.
À la rencontre de Lutte Commune, les militants et militantes présentEs ont insisté pour partir de la base, pour tenir compte des gens qui travaillent pour organiser des actions sur place. Il faut certes travailler à la base. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Les fronts communs n’ont rien donné non pas à cause de leur pertinence mais à cause du contrôle des directions syndicales. Il faut tirer au clair ce bilan. Être précis sur le rôle des directions syndicales et les dénoncer. Il faut démocratiser la centralisation de la négo en créant des fronts communs intersyndicaux à la base, démocratiquement et régionalement coordonnés et réseautés nationalement. Créer un vrai rapport de force de 500,000 personnes des services publics c’est créer un vrai et nécessaire front commun dans les luttes, dans l’action et autour de revendications claires.
Le résultat de l’actuelle négo risque fort d’être décevant : pas plus de 2% par année, division entre les professions dans les rangs syndicaux, convention de cinq ans, perte sur les absences maladies car un des forums en a fait sa thématique et le gouvernement tient à des retours rapides au travail pour soit-disant mieux faire l’intégration, bouleversement dans les horaires de travail dans les CHSLD pour combler le manque de personnel (là aussi un des thèmes des forums) et la réussite scolaire ( aussi thématique d’un forum) risque fort de se résumer à des investissements dans les infrastructures après le démantèlement en règle qu’apportera la loi 40.
Un bilan clair devra être fait de cette négo. Il faut en finir avec l’accumulation des défaites et passer à une vraie offensive. Il faut que la gauche passe en mode réflexion et analyse.
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