Édition du 24 septembre 2024

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Amérique centrale et du sud

Domination coloniale

Couvre-feu à la Martinique : une répression coloniale pour étouffer la colère contre la vie chère

A la Martinique, la mobilisation contre la vie chère se poursuit et monte en intensité, tout comme la répression d’État, alors qu’un couvre-feu a été décrété dans certains quartiers de Fort-de-France. Une répression dans la pure tradition coloniale française.

19 septembre 2024 | tiré du site de Révolution permanente
https://www.revolutionpermanente.fr/Couvre-feu-a-la-Martinique-une-repression-coloniale-pour-etouffer-la-colere-contre-la-vie-chere

A la Martinique, la mobilisation contre la vie chère se poursuit et monte en intensité, tout comme la répression de l’État français qui vient de décréter un couvre-feu dans certains quartiers de Fort-de-France. Un pas qui ouvre la voie à la radicalisation du mouvement.

Mercredi, l’État français a décrété un couvre-feu dans certains quartiers de Fort-de-France et au Lamentin à la Martinique, alors que le mouvement contre la vie chère bat son plein. « J’ai demandé aux forces de sécurité intérieure de saturer les axes routiers et les ronds-points de leur présence et de procéder à un maximum d’interpellations » a déclaré le préfet Jean-Christophe Bouvier, en annonçant l’arrivée de troupes en plus de la centaine de gendarmes déjà venus renforcer le dispositif répressif sur l’île. Tout cela marque un net saut dans la répression coloniale qui s’exerce depuis le début du mouvement de contestation de la vie chère, avec des arrestations et des interventions policières brutales pour démanteler les barrages.

Cette répression est l’expression de la peur de l’Etat et de la bourgeoisie de l’île d’une radicalisation et d’une généralisation du mouvement. Mardi soir, un McDonald a été incendié et un hypermarché Carrefour a été envahi. Depuis début septembre, les attaques de commerces et les incendies de véhicules se multiplient. Ces actions témoignent de la colère face à la vie chère - les prix alimentaires sont 40% supérieurs à l’Hexagone - mais aussi face au mépris des autorités et des grands groupes de la grande distribution depuis le début de la mobilisation. Face à la colère, la France répond par le couvre-feu comme elle l’a toujours fait dans ses colonies, où elle oppose aux mouvements de contestation des attaques brutales pour empêcher toute remise en cause de son autorité.

Les grands groupes de la distribution, profiteurs de la misère coloniale

L’écart flagrant entre les prix alimentaires en Martinique et en France, une tendance qui frappe l’ensemble des colonies françaises, est d’autant plus visible à l’heure d’une inflation violente, alors qu’un Martiniquais sur quatre vit sous le seuil de pauvreté. Une situation impossible qui a conduit à l’ultimatum du Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens (RPPRAC), lancé le 1er juillet, exigeant que les prix des produits alimentaires en Martinique soient alignés sur ceux de l’Hexagone à partir du 1er septembre. La grande distribution a attendu plus de 50 jours pour répondre au communiqué, pour nier tout simplement sa responsabilité dans la hausse des prix.

La date passée, des centaines de manifestants entament des blocages du port de Fort-de-France, et sont rapidement réprimés par l’État français qui craint la généralisation de cette colère contre son ordre colonial. L’une des figures du mouvement, le président du RPPRAC Rodrigue Petitot, est arrêté, suscitant la mobilisation des dockers pour exiger sa libération. Il a depuis été relâché, mais les revendications restent lettre morte. Jeudi 12 septembre, les représentants du Rassemblement pour la Protection des Peuples et des Ressources Afro-Caribéennes (RPPRAC) ont quitté les négociations avec la préfecture au bout de cinq minutes car le préfet a refusé de retransmettre les échanges en direct.

Les prix exorbitants en Martinique profitent avant tout aux grands groupes de la distribution, notamment celui de Bernard Hayot, dont le chiffre d’affaires s’élevait en 2021 à 3 milliards d’euros. Le Groupe Bernard Hayot a été fondé grâce au capital familial accumulé grâce à l’exploitation du sucre par l’esclavage, puis de l’indemnisation versée par l’État lors de la libération des esclaves en 1849. Aujourd’hui, l’économie de comptoir de la Martinique profite à une poignée de grands groupes, qui comptent sur les blindés de la gendarmerie et la main ferme de la puissance coloniale pour maintenir leurs marges.

Alors que la colère augmente, l’État tente un semblant de négociation, annonçant une deuxième table ronde avec la proposition d’ « une baisse de 20 % en moyenne du prix » de 2.500 produits de première nécessité. Des propositions cosmétiques et insultantes face aux revendications des habitants pour feinter une ouverture au moment où la répression passe un cap.

L’instauration du couvre-feu en Martinique fait écho à la situation en Kanaky, où le GIGN vient de tuer deux jeunes kanak. Le couvre-feu y est renforcé à l’approche de la mobilisation du 24 septembre, date anniversaire de la colonisation de l’île par la France, qui prend une teinte particulière après le déchaînement de violence colonial face à un peuple qui revendique son indépendance.
Couvre-feu, déploiement de blindés et de troupes spéciales, l’impérialisme doit montrer les muscles dans son empire colonial où les contestations se multiplient ces dernières années. Face à cette déferlante répressive, le mouvement ouvrier de l’Hexagone doit dénoncer avec force la mise en place du couvre-feu en Martinique et la répression que l’Etat français déploie sur les cinq continents contre ceux qu’il exploite et qu’il affame.

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