C’est qu’il s’agit ici d’un projet des plus préoccupants pour l’avenir du système public de santé. Nous en déclinerons, ci-contre, les grandes lignes et ses possibles conséquences pour la population, les travailleurs ainsi que pour les organisations syndicales. Lors du Conseil confédéral (instance CSN décisionnelle entre les Congrès) des 25, 26 et 27 septembre, il a été décidé que la priorité serait de faire obstacle à ce projet de loi et de mobiliser les syndicats face à cette nouvelle restructuration dans le domaine de 13 santé et des services sociaux. Donc, un appel vibrant à la mobilisation et à la création de fronts de luttes et alliances les plus larqes possibles.
Le projet de loi 10
l.e ministre souhaite que la loi entre en vigueur dès le 1er avril 2015.
Selon Éric Lévesque, conseiller à la CSN, la loi 10 modifie en fait 3 lois (pas seulement : la LSSSS). Elle modifie U-O, 1 (l’ancien projet de loi 30 sur les accréditations) dites Loi sur les unités de négociation du secteur des affaires sociales) et la loi sur les RI-RTF.
Fusions d’établissements
Ce projet de loi fait plus de 70 pages et nous nous limiterons à en souligner les principaux éléments Ainsi, les agences de santé sont appelées à disparaître pour ne laisser que deux paliers, soit le Ministère lui-même et de nouvelles entités appelées “centres intégrés de santé et de services sociaux » (CISSS). Hormis Montréal, il y aurait un CISSS par région, soit un pour couvrir la Montérégie, un pour Lanaudière, un autre pour Chaudière-Apalaches, etc. Seul Montréal comporterait 5 CISSS dont le nôtre se déclinerait comme suit :
– Agence de la santé et des services sociaux de Montréal
– Centre de santé et de services sociaux du Coeur-de-l’Île
– Centre de santé et de services sociaux Jeanne-Mance
– La corporation du centre de réadaptation Luc-Bruneau
– Institut Raymond-Dewar
– l’hôpital chinois de Montréal
– Institut universitaire de gériatrie de Montréal
– Centre de réadaptation en dépendance de Montréal
Cet établissement serait alors appellé CISSS du sud-est-de-l’Ile-de-Montréal
Pouvoirs du ministre
De plus, cette loi conférerait au ministre de la santé des pouvoirs sans précédent. Ainsi, celui-ci pourrait :
– Décider des enveloppes budgétaires des établissements
– Nommer les directions d’établissement (directeurs et directeurs adjoints) et fixerait leur salaire
– Nommerait les membres des conseils d’administration des établissements . Les cooptations ainsi que les élections disparaîtraient ; ainsi, il n’y aurait plus de representants de la population ni des usagers élus. Ceux-ci seraient nommés par le ministre à partir d’une liste fournie au ministère par le comité des usaqers
– Les membres de ces conseils d’administration ne seraient plus bénévoles mais recevraient une rémunération, elle aussi fixée par le ministre
– Ces mêmes conseils d’administration ne seraient plus d’ordre public. Seule une assernolée annuelle serait alors accessible au public
– Le ministre s’accapare aussi de vaste pans des pouvoirs décisionnels dévolus aux présentes agences ce santé et de services sociaux
– Le ministre peut aussi, lorsqu’il le juge pertinent, de poursuivre ou de réaliser d’autres fusions d’établissements
– Le ministre peut aussi dicter des règles de gestion et d’organisation aux directions d’établissement
– Le ministre, s’il le juge nécessaire, mettre en tutelle toute organisation ou établissement durant 180 jours et la prolonger d’autant s’il le juge nécessaire
Les conseils d’administration
– Enfin, comme on l’a vu plus tôt dans mon dernier message, il n’y a plus de cooptations ni d’élection : tous les membres du CA sont désormais nommés. 7 membres proviennent du réseau, et 7 autres membres sont indépendants. Le DG provient des membres indépendants.
– Le CA devient donc ni plus ni moins une équipe d’exécutants, dont les fonctions seront d’organiser les services, et de répartir les ressources humaines, matérielles et financières.
– Le MSSS fixera les salaires des DG et (tenez-vous bien) ... des membres du CA. Eh oui. être membres du CA ne sera plus une activité volontaire, mais une job rémunérée !
– Autre « particularité » : l’ensemble des travaux du CA ne sera plus public. Il n’y aura qu’une seule assemblée publique par année.
Les conséquences appréhendées du projet de loi 10
1) L.a taille décuplée des établissements découlant de la fusion de CSSS et d’autres types d’établissement risque de nous entraîner dans des monstres organisationnels alors que les structures CSSS présente déjà des défis énormes pour les administrations et les organisations syndicales.
2) Le nouveau régime imposé au conseils d’administration représente une perte au niveau de la transparence de ; nos institutions et de la participation citoyenne. Ces nouvelles dispositions s’inscrivent dans une perspective centralisatrice des pouvoirs décisionnels qui ont commencé sous le gouvernement Charest dans le cadre de la « réingénérie » de l’État.
3) Enfin, toute cette énième restructuration du secteur de la santé et services sociaux s’accompagne de nouvelles coupes budgétaires dont 87 millions à Montréal.
4) Pour ce qui est des organisations syndicales, même si celles-ci ne sont pas visées par le projet de loi, elles devront s’ajuster à ces nouvelles réalités advenant qu’elles se concrétisent. Qui dit fusion d’établissement dit nouvelle période de vote au niveau des accréditations, restructuration des organisations syndicales, élections syndicales, réaménagement de l’article 7, nouvelle juridiction syndicale et sa négociation, etc,
Ainsi, ce projet de loi n’est pas sans conséquence pour l’ensemble de la société québécoise. Le ministre a beau prétendre qu’il s’agit là d’une volonté d’améliorer le fonctionnement du système de la santé et services sociaux et d’en offrir un meilleur accès à la population, nous n’en croyons rien. La réforme Couillard, poursuivie par Yves Bolduc n’a donné aucun résultat escompté, au contraire. Les chiffres et les observations des acteurs des services publics ne manquent pas à ce chapitre, à commencer par les derniers rapports de la Protectrice du citoyen et du Vérificateur général du Québec. C’est pourquoi le Conseil fédéral, invité par la CSN, a adopté une résolution à l’effet de faire adopter rapidement un plan d’action afin d’empêcher l’adoption d’une telle loi par l’Assemblée Nationale.
Résolution du conseil 30 septembre 2014
Hôtel Universel, Rivière-du-Loup
Proposition adoptée au conseil fédéral extraordinaire le 30 septembre 2014
Que le conseil fédéral rejette avec vigueur le projet de loi 10 tant dans son contenu que sur la forme, considérant notamment :
– l’absence de solution concrète pour i amélioration et l’accessibilité des services de santé et sociaux offerts à la population, le financement, la gestion et la gouvernance ;
– le pouvoir accru du politique sur l’ensemble de la gestion du réseau de la santé et des services sociaux ;
– l’absence d’une démocratisation citoyenne au sein du réseau de la santé et des services sociaux ;
– l’absence de consultation notamment auprès des organismes du réseau de la santé et des services sociaux ;
– les effets néfastes sur les conditions de vie et de travail des travailleuses et travailleurs du réseau et sur les services offerts à la population.
Que le conseil fédéral mandate la Fédération à élaborer un plan d’action musclé afin de contrer le projet de loi 10 et présenter rapidement ce plan d’action aux syndicats.
Ce plan d’action doit viser notamment à sensibiliser et mobiliser nos membres, ainsi que la population.
Pour nos membres, le plan d’action doit tenir compte des liens à faire entre le projet de loi 10 et notre négociation. Pour la population il faut que le : plan d’action vise à les sensibiliser sur les effets dévastateurs sur la qualité et l’accessibilité aux services offerts à la population.
Que ce plan d’action tienne compte de l’offensive du gouvernement quant au démantèlement sauvage du réseau de la santé et des services sociaux, ainsi que de notre prochaine négociation.
Que la Fédération travaille à développer la solidarité et l’unité la plus large possible dans l’atteinte de notre objectif de contre le projet de loi 10.
Que la Fédération interpelle les instances confédérales appropriées pour solliciter leur collaboration dans la mise en œuvre de ce plan d’action.
Suite à la volonté du Conseil fédéral, il a eté décidé qu’une instance spéciale devrait se tenir rapidement en vue d’élaborer un tel plan d’action et d’en débattre.
Ainsi, le 17 octobre prochain se tiendra un tel conseil spécial à Montréal.