tiré de : [CADTM-INFO] BULLETIN ÉLECTRONIQUE - Jeudi 1er juin 2017 11 mai par ATTAC/CADTM Maroc
Il s’est déroulé dans un grand enthousiasme. Les débats ont été approfondis et ont contribué à une compréhension perspicace de la situation internationale caractérisée par la crise du système capitaliste avec ses dimensions économiques, environnementales, et sociales, qui nourrit les guerres et le racisme, préjudiciable aux acquis des salarié-e-s et des couches populaires. Les congressistes ont également abordé les caractéristiques de la situation au Maroc et ont souligné sa forte dépendance et le contrôle accru des institutions financières internationales sur son économie et ses ressources. Le pays est également soumis au système de la dette et aux mécanismes du libre-échange qui sont les outils de la nouvelle domination coloniale. Les discussions sur la situation internationale et nationale ont fait ressortir les éléments suivants :
L’aggravation de la crise économique et politique du capitalisme, l’intensification de la concurrence entre les puissances impérialistes, la montée de l’extrême droite comme expression de la crise des projets qui ont essayé de résoudre les contradictions du capitalisme à travers des institutions supra-nationales (Union européenne) ou des accords commerciaux et des alliances militaires, le militarisme croissant de l’impérialisme qui a éclaté dans de nombreuses régions du monde (Moyen-Orient, Asie de l’Est, Amérique latine) pour partager les zones d’influence et les marchés et accaparer les matières premières et les surfaces agricoles utiles, tout cela cause des millions de victimes (morts, blessés et déplacés) et une terrible dévastation environnementale. Les forces contre-révolutionnaires dans la région arabe ont repris l’initiative et continuent de bafouer les aspirations des peuples pour la liberté et la justice. De nombreux pays connaissent une montée de la droite fasciste et raciste comme sortie barbare de la crise du capitalisme et de la démocratie bourgeoise. Les résistances populaires dans de nombreuses régions du monde restent défensives, mais avec l’implication large des jeunes et des femmes, elles peuvent être un point de départ pour changer le rapport de force actuel au profit des exploité-e-s dans une perspective progressiste.
Au niveau national, la politique économique et sociale vise à servir le capital local et étranger, sous la domination d’un régime autoritaire et d’une démocratie de façade. Une minorité contrôle les principales richesses économiques du pays, alors que des millions de citoyens et citoyennes vivent sous le seuil de pauvreté, que le chômage et la précarité écrasent les aspirations de millions de jeunes et de femmes, que la catastrophe environnementale menace les ressources naturelles du pays, et que l’appauvrissement de la petite paysannerie et des villageois s’accentue par le développement du grand capital agricole qui s’approprie les terres agricoles, les ressources en eau et l’infrastructure nécessaire à la production agricole.
Les services publics sont devenus des marchandises au profit des capitalistes. Les secteurs de l’éducation et de la santé sont privés de ressources financières et du personnel nécessaires pour répondre aux besoins croissants, et leurs établissements, comme d’autres institutions publiques, sont devenus des lieux répugnants. L’État s’apprête également à démanteler ce qui reste du secteur public et à le confier au secteur privé sous couvert de partenariats public privé (PPP). Parallèlement l’endettement du pays continue de croître, ce qui entraîne un contrôle accru des ressources du pays par le capital étranger au service de sa stratégie.
Cette situation a stimulé de nombreuses luttes liées à la propriété foncière (luttes des femmes pour leurs droits sur les terres collectives) et à la marginalisation régionale et de nombreuses luttes ouvrières contre la précarité de l’emploi et les conditions de travail (luttes des ouvriers des services de l’autoroute, luttes dans les mines, etc.). Les organisations de lutte devraient consolider l’unification de ces mobilisations dans un programme de lutte central pour la justice sociale et environnementale et la redistribution de la richesse.
La région du Rif au nord du Maroc constitue un clair exemple des effets destructeurs des politiques économiques et sociales en vigueur. La majeure partie du tissu industriel a été démantelée. Les zones côtières et forestières ont été accaparées par tous les moyens possibles. L’émigration a été fermée aux jeunes de la région, et les cultures des petits paysans détruites. En retour, des structures d’accueil touristique sont construites pour les étrangers et les riches, au milieu d’un océan de misère et d’horizons obstrués.
La mort du jeune Mohsen Fikri, broyé dans une benne de poubelle a été l’étincelle qui a fait exploser les mobilisations contre ce modèle de développement en crise. Leur persistance témoigne du potentiel des masses à résister et les perspectives de leur développement sont grandes car elles reposent sur une forte combativité et des formes de démocratie directe, de masse et participative que sont les coordinations du mouvement populaire.
Le congrès national d’ATTAC CADTM Maroc salue les luttes des salariés contre la précarité du travail et les violations des libertés syndicales dans les usines, les domaines agricoles et le secteur des services, ainsi que les luttes des mouvements des diplômés chômeurs, de l’environnement et des femmes contre toute forme d’oppression, d’exclusion et de discrimination. Le congrès de notre association salue les luttes de toutes les victimes du système de la dette et des mécanismes de libre-échange dans le pays, en particulier dans la région du Rif, et :
– Affirme sa solidarité avec les luttes menées par les citoyens contre les politiques d’appauvrissement et de marginalisation, en particulier la longue lutte des populations du Rif ;
– Condamne la répression des luttes populaires, ouvrières, et de jeunes pour une vie décente, et appelle à la libération de tous les détenus politiques, des droits humains et des mouvements sociaux et de protestation ;
– Réclame des services publics gratuits pour tous et toutes financés par une taxe progressive sur la richesse et les bénéfices, et la nationalisation sous contrôle populaire des secteurs qui ont été privatisés ;
– Demande l’arrêt des accords de libre-échange avec l’Union européenne et les États-Unis qui ne servent que les intérêts du grand capital.
– S’oppose fermement au rôle de mandataire que joue le Maroc en Afrique, sous couvert de coopération Sud-Sud, au bénéfice du grand capitalisme mondial et local ;
– Condamne l’asservissement des marocains par le système de la dette qui hypothèque l’avenir des générations futures, demande la suspension du remboursement du service de la dette publique et la réalisation d’un audit citoyen de cette dette pour identifier les parties odieuses, illégitimes et illégales et exiger leur annulation ;
– Dénonce le rôle de gendarme que joue le Maroc aux frontières du sud de l’Europe, et les politiques répressives contre les migrants. Il appelle au respect des droits et de la dignité des migrant-e-s et tout particulièrement des réfugiés syriens victimes du régime criminel de Bachar El Assad et des forces impérialistes et réactionnaires qui interviennent dans la région ;
– Déplore la politique environnementale poursuivie, qui sert les intérêts des grands capitalistes et condamne l’accaparement de ressources naturelles et la poursuite de leur gestion dans la logique du marché capitaliste ;
– Dénonce le déni de renouveler le récépissé de notre association pour une existence légale et les harcèlements qu’elle subit et renouvelle sa solidarité avec toutes les organisations qui souffrent de l’arbitraire des autorités ;
– Condamne l’intervention impérialiste (américaine, russe et européenne) et celle des régimes réactionnaires (les émirats du Golfe, de l’Iran et de la Turquie), pour mater les révolutions populaires dans le sang, dans une tentative désespérée de freiner les aspirations émancipatrices et progressistes dans cette région ;
– Salue les luttes du peuple palestinien et apporte toute sa solidarité avec les prisonniers palestiniens en grève de faim, condamne l’arrogance sioniste et dénonce la normalisation avec ce régime raciste ;
– Condamne l’intervention impérialiste sur le continent africain, pour accaparer ses ressources minérales, énergétiques et agricoles et se partager ses marchés, au prix de guerres et du déplacement de millions de personnes ;
– Appelle toutes les forces de lutte progressistes à unir les luttes contre les politiques libérales afin de créer le rapport de force nécessaire pour stopper l’offensive contre les acquis populaires.
Le congrès, qui se termine aujourd’hui à Casablanca, salue toutes les organisations politiques, syndicales, sociales, de droits de l’homme et les mouvements de lutte populaire qui ont assisté à notre congrès pour leur présence et leur soutien. Il renouvelle son engagement à continuer la lutte pour un autre Maroc qui est possible et nécessaire pour vivre dans la dignité.
Le sixième congrès national
07 mai 2017
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