Tiré de multinationales.org
Les entreprises du CAC40 ont distribué en 2016 la somme record de 56 milliards d’euros en dividendes et rachat d’actions. Un chiffre en nette hausse par rapport à 2015, où il n’était « que » de 43 milliards. En moyenne, les grandes entreprises françaises ont redistribué 57% de de leurs bénéfices aux actionnaires en 2016, contre 51% en 2015.
Trois entreprises seulement représentent les deux tiers des montants redistribués aux actionnaires : Sanofi et Total, les deux principales capitalisations boursières françaises, mais aussi Vivendi, qui a débloqué un dividende exceptionnel de 3,8 milliards d’euros en plus de ses dividendes « normaux » de 5,8 milliards. Dans le cas de Vivendi, ces chiffres sont le résultat de l’arrivée de Vincent Bolloré, qui a pour habitude de ponctionner la trésorerie des firmes dont il prend le contrôle pour lui faire servir ses propres intérêts [1].
Comme le rappelle Novethic, Sanofi (6,7 milliards de dividendes en 2016) est exposée quant à elle à des affaires de sécurité sanitaire comme celle de la Dépakine (lire notre article) qui pourraient lui coûter plusieurs dizaines de milliards d’euros pour indemniser les victimes.
Quant à Total (5,9 milliards), les dividendes distribués chaque année représentent autant de paris sur la perpétuation de l’extraction de pétrole et de gaz malgré leur rôle dans la crise climatique. C’est aussi autant d’argent qui ne sera pas consacré à une véritable transformation de son modèle commercial pour répondre aux exigences de la transition énergétique (sur ce point, voir notre récent rapport Total : une stratégie climat en trompe-l’oeil).
Déséquilibre
Comme chaque année, de nombreux commentateurs ont souligné les risques intrinsèques à l’explosion des dividendes, au détriment notamment des investissements qui assurent la pérennité à long terme des firmes. Selon les calculs de Christian Chavagneux pour Alternatives économiques, les entreprises non financières françaises ont distribué en 2016 deux fois plus de dividendes qu’elles n’ont consacré à l’investissement - une proportion inversée par rapport aux années 1980. Contrairement à un argument parfois invoqué, ces dividendes ne contribuent que très modérément à entretenir la prospérité de l’économie et de la société française dans son ensemble, au vu de la faible taxation du capital et du fait que plus de 50% des actionnaires du CAC40 sont étrangers.
La hausse ininterrompue des dividendes illustre donc une nouvelle fois la manière dont les entreprises sont de plus en plus gérées uniquement pour leurs actionnaires, au détriment de leur stratégie industrielle (investissements) et de leurs travailleurs (salaires), sans parler de la problématique de la prise en compte de leurs coûts sociaux et environnementaux, qu’illustrent chacune à leur manière les exemples de Total et Sanofi.
Si, comme le rappelle Libération, les investissements et la part des salaires sont eux aussi repartis à la hausse, les profits générés par les entreprises restent très majoritairement consacrés à la rémunération du capital et des actionnaires. Malgré leurs beaux discours sur le besoin d’investir, les fonds financiers comme Blackrock continuent à prioriser la distribution de dividendes. Plusieurs entreprises, dont EDF, doivent même s’endetter sur les marchés pour distribuer des dividendes, dont le premier bénéficiaire est en l’occurrence l’État actionnaire...
Le record historique de distributions de dividendes par les sociétés du CAC40 s’établit à 57,1 milliards d’euros. C’était en 2007, juste avant la crise financière globale.
Note