Édition du 29 octobre 2024

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Europe

Budget 2025 : la supercherie macroniste va nous coûter très cher !

À peine formé, le gouvernement Barnier a eu la charge de préparer en urgence le budget du pays pour l’année 2025. Dès son arrivée à Matignon, Michel Barnier n’a pas caché sa stupéfaction et son inquiétude face à la situation budgétaire du pays. Avec un déficit révisé à 6,1 % du PIB pour l’année 2024, on est bien loin des 4,4 % prévus initialement par le précédent gouvernement et son ministre de l’Économie, l’inénarrable Bruno Le Maire. Tout ce petit monde s’est tellement lamentablement planté qu’ils ont dissimulé la situation pendant des mois ! Mais il en faudra plus pour que les « élites » françaises ouvrent enfin les yeux et acceptent de changer fondamentalement d’orientation économique. Malgré une (très) légère inflexion, le gouvernement Barnier poursuit assez largement la logique de la politique de l’offre assortie d’une cure drastique d’austérité. Le désastre français est assuré !

22 octobre 2024 | tiré d’elucid.media
https://elucid.media/politique/budget-2025-supercherie-macroniste-couter-tres-cher-francois-boulo

Signe révélateur de la situation budgétaire catastrophique du pays, en septembre dernier, Matignon a refusé aux deux plus hauts responsables de la Commission des finances de l’Assemblée nationale l’accès (pourtant obligatoire) à certains documents budgétaires essentiels. On pourrait en rire si ce n’était pas aussi grave.

L’échec cuisant du macronisme et de la politique de l’offre

Après dix ans de politique économique guidée par Emmanuel Macron (3 ans en tant que ministre de l’Économie sous Hollande, puis 7 ans en tant que Président), le retour à la réalité est brutal. La dette de la France s’élève à plus de 3 000 milliards d’euros (+ 1 000 milliards depuis 2017) et ses intérêts à 52 milliards d’euros. Son déficit budgétaire devrait atteindre les 178 milliards d’euros (au lieu de 128 !) en 2024 ; son déficit du commerce extérieur s’établit à 130 milliards d’euros en 2023 ; sa croissance demeure très faible à 1,1 % en 2023 et 2024, et le chômage (réel) culmine à 10 %. Autrement dit, la France est surendettée, désindustrialisée, amorphe économiquement et toujours rongée par le chômage de masse.

Chapeau l’artiste !

On peut néanmoins reconnaître une chose à Emmanuel Macron : il n’a pas fait dans la demi-mesure. Il a appliqué sa stratégie économique jusqu’au bout des ongles. L’avantage est qu’il est, par conséquent, facile de tirer les leçons de son tragique échec. Quelle était sa philosophie ? Pour l’essentiel, inonder les entreprises (essentiellement les plus grandes) et les contribuables les plus riches d’exonérations sociales et fiscales en tous genres – Crédit impôt compétitivité emploi (CICE), baisse du taux d’impôt sur les sociétés, transformation de l’impôt sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), flat tax, suppression de l’exit tax, etc. –, détruire les protections du droit du travail (Loi El Khomri de 2016, Ordonnances Macron de 2017) et durcir drastiquement les conditions d’accès au droit à l’assurance chômage pour forcer les chômeurs à accepter n’importe quel emploi.

Souvenez-vous, il fallait « libérez les énergies », en langage clair, faire une bonne fois pour toutes une vraie politique de l’offre. Ces réformes, appelées de ses vœux par le MEDEF depuis des années, étaient censées encourager l’investissement, générer une forte croissance et créer des millions d’emplois. Avec un programme pareil, vous savez d’avance que vous allez creuser les inégalités, mais c’était la seule manière – d’après les « experts » en économie défilant sur les médias officiels – de repositionner le pays dans la course face à la concurrence mondiale.

De la casse sociale certes, mais que voulez-vous, c’est le prix à payer ma bonne dame ! Tant pis pour les licenciements abusifs, les burn-out, les expulsions, les dépressions, les divorces, les suicides… Il faut tout sacrifier pour le saint Graal : la croissance. Mais après dix ans d’expérimentation, le résultat est pourtant sans appel : les subventions massives accordées aux entreprises (160 milliards d’euros en 2019) ont vidé les caisses de l’État et creusé le déficit, sans pour autant produire le moindre effet bénéfique sur l’activité. Du grand art !

Pour ce qui est des inégalités, sans surprise, elles ont explosé comme le montrent l’évolution du taux de pauvreté (près de 15 %) et l’indice de Gini (0,294 en 2022) qui atteignent des niveaux historiques, parmi les plus élevés. Dans le même temps, les grandes entreprises ont réalisé des bénéfices records (153,6 milliards d’euros pour le CAC 40 en 2023) etle patrimoine des plus grandes fortunes s’est considérablement accru. La France court à sa ruine, mais qu’importe ! Champagne pour les ultra-riches !

Le mensonge de la réduction du chômage

Ce bilan accablant pour Macron est implacable. Il n’est d’ailleurs nullement contesté… si ce n’est sur un seul point précis : le chômage. C’est l’ultime argument de la macronie pour justifier sa politique. Le taux du chômage aurait été ramené à 7,5 %, soit un niveau jamais atteint depuis 40 ans. Il suffit pourtant de creuser un peu pour s’apercevoir que la promotion à outrance de cet indicateur économique relève d’une supercherie.

En se basant sur les chiffres de France Travail et non sur la définition du Bureau international du travail (BIT), le chômage atteint 10 % de la population, soit un actif sur cinq. Surtout, derrière l’apparence d’une relative bonne dynamique du marché de l’emploi se cachent des mesures court-termistes et très coûteuses. Depuis 2018, la moitié de la baisse du chômage s’explique par la création de 800 000 emplois aidés financés par des fonds publics, et l’autre moitié est constituée d’emploi salariés et non-salariés à faible valeur ajoutée (et à faible rémunération).

La politique macroniste a certes créé des emplois, mais de « mauvais » emplois. En atteste la baisse historique du taux de productivité sur la période. Alors que la productivité d’une heure travaillée n’avait cessé d’augmenter de manière constante (période de crise économique ou non) de 1990 à fin 2018, elle s’est mise brutalement à chuter à compter de l’année 2019.

Penser l’activité du marché de l’emploi uniquement en termes de taux de chômage revient à n’appréhender l’économie que d’un point de vue quantitatif, et non qualitatif. Pour le dire de manière schématique, multiplier les petits boulots de livreurs à domicile ne compense pas la perte des emplois d’ingénieurs et d’ouvriers qualifiés dans l’industrie… La classe dirigeante française a visiblement un peu de mal à comprendre ce principe de base.

Contrairement à ce que prétendent les macronistes, ils n’ont pas réindustrialisé le pays, ils ont remplacé des emplois à haute valeur ajoutée par des emplois précaires. C’est du génie ! Si l’on prend le temps d’y réfléchir, créer des millions d’emplois avec une croissance aussi faible ne pouvait que cacher quelque chose. On sait quoi désormais. Certes on travaille plus, mais chaque nouvelle heure travaillée produit moins que les autres heures. Le pays ne s’enrichit pas, il se précarise !

Budget 2025 : pourquoi changer quand ça ne marche pas ?

C’est dans ce marasme économique, qui vaut à la France de faire l’objet d’une procédure pour déficit excessif de la part de la Commission européenne, que le budget 2025 a été préparé dans l’urgence. En substance, il est prévu de réaliser 60 milliards d’euros d’économies, dont 40 par des réductions de dépense publique (20 Md€ dans les administrations centrales, 15 Md€ dans la Sécurité sociale et 5 Md€ dans les collectivités locales) et 20 par une augmentation des recettes fiscales. L’objectif est de ramener le déficit public à 5 % du PIB, ce qui demeure supérieur de 2 points par rapport à la fameuse limite des 3 %… C’est dire l’ampleur de la dérive budgétaire de la gestion macroniste !

N’est-ce pas ces gens-là qu’on nous présentait comme sérieux contre les « irresponsables extrêmes » ? Après des années passées à dilapider l’argent public par des subventions aux entreprises qui n’auront servi qu’à enrichir les plus riches, le tout financé par de l’endettement, nos « élites » et surtout l’Union européenne ont décidé qu’il était désormais temps pour les Français de passer à la caisse. Il faut dire aussi que les marchés financiers ont depuis quelques mois significativement rehaussé leurs taux de financement pour la France.

Voici venu le temps de l’austérité, la vraie cette fois. Non seulement ça va saigner, mais ça va durer aussi, au moins jusqu’en 2029 ! Peu importe que les mesures de rigueur budgétaires aient partout fait la démonstration de leur inefficacité. Remettre en question la politique de l’offre et les aides publiques aux entreprises ? Certainement pas ! On ne va tout de même pas changer une méthode qui ne marche pas !

Au programme deséconomies budgétaires pour la seule année 2025 – qui pourrait encore réserver de mauvaises surprises dans les jours et semaines à venir –, le gouvernement a prévu notamment la suppression de 4 000 postes dans l’éducation nationale, un report pour 6 mois des revalorisations des pensions de retraite, la baisse du montant de prise en charge des consultations de médecin et sage-femme de 70 % à 60 %, la baisse du plafond d’indemnisation des arrêts maladie, un doublement de la taxe sur l’électricité, un quadruplement de la TVA sur les abonnements au gaz et à l’électricité, une remise en cause d’une partie des aides à l’apprentissage, un rabotage des aides à la rénovation thermique, un malus fortement durci sur les véhicules polluants ou lourds… Malgré la saignée, il n’est même pas dit que l’objectif de 5 % du déficit soit atteint !

Certes, le gouvernement Barnier a aussi décidé d’augmenter les impôts pour les plus riches par une augmentation de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et par un relèvement exceptionnel et temporaire de la taxation des entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard d’euros (environ 400 entreprises). C’est assez pour déclencher une levée de boucliers dans le camp de la macronie, dont la défense des ultra-riches confine à l’obsession. Mais soyons clairs, ces hausses d’impôts sont ridiculement faibles (20 Md€) comparées aux immenses cadeaux faits sur les dix dernières années.

S’agissant de la taxation des hauts revenus, il s’agit uniquement d’instaurer un taux d’imposition minimal de 20 % – ce qui devrait rapporter 2 milliards d’euros. On rappelle que ces foyers les plus fortunés sont censés être assujettis au taux de 45 % sur le gros de leurs revenus (1)… on en reste à des années-lumière ! Ces mesures présentées au nom de la « justice fiscale » relèvent bien plus du symbole que d’une vraie volonté de réduire les inégalités. En bon politicien – ce que n’est pas Macron –, Michel Barnier essaie de donner l’illusion qu’il demande des efforts « justes » et « équilibrés » à tout le monde. Mais sur le fond, il n’y a aucun changement d’orientation économique.

L’incompétence et la traitrise de la classe dirigeante française

Il est facile d’anticiper l’avenir : réduire les dépenses publiques, c’est inéluctablement réduire l’activité économique et diminuer les recettes fiscales. Ce programme de rigueur budgétaire risque surtout de pénaliser la croissance, voire de provoquer une récession avec à la clé des faillites d’entreprises, des suppressions d’emplois et des pertes de savoir-faire, poursuivant la destruction durable du tissu économique du pays.

L’économiste Anne-Laure Delatte évalue que le budget 2025 coûtera 0,6 point de croissance. La thérapie de choc risque fort d’accoucher d’économies tout à fait dérisoires, tout en approfondissant le délabrement des infrastructures et des services publics. Si vous ajoutez à cela que les intérêts de la dette vont bientôt représenter le premier poste de dépense de l’État en atteignant plus de 72 milliards d’euros en 2027, l’étau se resserre dangereusement...

À court terme, la gravité de la situation commanderait de remettre en cause une large partie des subventions accordées aux plus grandes entreprises du pays (au moins 40, voire 60 milliards d’euros) dont les bénéfices ont explosé sur les deux dernières décennies (153 milliards en 2023 pour le CAC 40contre 37 milliards en 2003) plutôt que de demander des sacrifices aux Français.

À plus long terme, l’approche uniquement budgétaire ne sauvera pas durablement l’économie française. Il est impératif de sortir de la logique purement comptable de nos dirigeants pour repartir des besoins réels de l’économie, avec pour priorité de redresser notre système éducatif et de réintroduire du protectionnisme pour soutenir la compétitivité de nos entreprises. En la matière, les mots ne suffisent pas. Il faudrait assumer l’interventionnisme de l’État pour donner de réels moyens aux services publics essentiels et protéger le marché intérieur de la concurrence étrangère déloyale. Cela nécessiterait très concrètement d’agir sur les structures économiques, et en particulier l’euro et le marché unique européen, pour enfin retrouver notre souveraineté industrielle perdue.

Cela fait deux conditions : rompre avec les règles actuelles de l’Union européenne et nourrir une vraie volonté de réindustrialiser le pays. Or, ces deux conditions font manifestement défaut à notre caste dirigeante. Dernière preuve en date ? Le gouvernement a officiellement décidé de ne pas s’opposer à la vente du Doliprane par Sanofi (gavée de subventions publiques) au fonds d’investissement américain CD&R. Mais attention ! Des garanties vont être exigées pour que les emplois soient maintenus en France, nous assurent solennellement nos dirigeants. Cela ne vous rappelle rien ? Les mêmes promesses avaient été faites lors de la vente d’Alstom énergie avec le résultat que l’on connaît.

Bienvenue dans une histoire sans fin...

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