Édition du 17 décembre 2024

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Bolivie : « Le pays est de nouveau aux mains de l’oligarchie historique »

Entretien avec Fernando Mayorga. Il est sociologue et docteur en sciences politiques de la Faculté latino-américaine des sciences sociales (Flacso). Il expose les traits actuels de la situation bolivienne et du scénario politique à l’approche de l’élection présidentielle du 3 mai 2020.

tiré du site du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA)
https://npa2009.org/actualite/international/bolivie-le-pays-est-de-nouveau-aux-mains-de-loligarchie-historique

L’État plurinational, qui vient d’avoir 14 ans, est-il en danger ?

Modifier l’État plurinational [la nouvelle Constitution politique de l’État plurinational a été adoptée en février 2009] en tant qu’entité constitutionnelle nécessiterait la tenue d’une assemblée constituante et cela ne semble pas possible aujourd’hui. Il est vrai que Carlos Mesa Gisbert [président de la Bolivie d’octobre 2003 à juin 2005 fut vice-président lors du deuxième mandat de Gonzalo Sánchez Lozada du 6 août 2002 au 17 octobre 2003 ; ce dernier dut démissionner suite aux deux massacres de manifestants, en février et en octobre 2003] préfère revenir à la République. Quant à Fernando Camacho [d’extrême droite, avocat, homme d’affaires et président du Comité civique pro Santa Cruz, il a mené les mobilisations contre Morales au nom du « Christ rédempteur »], il est enclin, lui, à parler d’un nouveau fédéralisme. Les nouvelles autorités, post-mai 2020, devront continuer avec l’État plurinational. Mais s’ils ne peuvent pas changer ce nom, il est vrai qu’aujourd’hui le pays est en régression dans ses politiques publiques et est revenu aux mains d’une oligarchie historique.

Comment décririez-vous le gouvernement actuel de la Bolivie ?

En ce moment, le gouvernement de Bolivie est entre les mains de ce qui était l’opposition au MAS, qui est, elle, fragmentée. La présidente Jeanine Áñez fait partie du mouvement Bolivia Dice No qui s’est constitué afin de s’opposer à la candidature de Morales lors des élections d’octobre 2019. C’est un parti qui n’a pas atteint 5 % des voix.

Ceux qui gouvernent actuellement faisaient partie d’une opposition qui, depuis la victoire du MAS aux élections présidentielles de 2005, n’a pas été capable d’articuler une force qui puisse l’affronter. Le seul candidat qui maintient son parti et qui est prêt à se présenter légalement est Carlos Mesa, avec la Comunidad Ciudadana [ses liens avec les États-Unis et les avances faites à Jair Bolsonaro, en 2019, ont été révélés par les câbles diplomatiques révélés par Wikileaks].

C’est pourquoi il existe un curieux paradoxe : le libéral Jorge « Tuto » Quiroga [vice-président sous le deuxième mandat de 1997 à 2001 d’Hugo Banzer qui avait été le général dictateur de 1971 à 1978, Quiroga exerça le mandat de président d’août 2001 à août 2002] sera le candidat présidentiel du Mouvement révolutionnaire nationaliste (MNR). Alors qu’en 2014 il était le candidat du Parti démocrate-chrétien. Il est donc issu du parti dirigé par le général Hugo Banzer, Acción Democrática Nacionalista, un parti de droite affirmé. Un autre qui espère se présenter, mais on ne sait pas encore sous quelle étiquette il le fera, est l’homme d’affaires Samuel Doria Medina [ancien du MNR, il créa en 2004 l’Unidad Nacional] qui a été battu aux élections de 2005 et 2009 [il obtint en 2014, à la tête de la coalition Union démocratique, 24,23 % des suffrages].

Y a-t-il des garanties pour la présentation électorale du MAS aux élections ?

Il y a eu une demande de proscription qui a été rejetée par le Tribunal électoral suprême. Le statut juridique du MAS est intact pour présenter des candidats à tous les postes, dans tout le pays. Il est trop tôt pour élaborer des hypothèses sur le cours que pourraient prendre les événements électoraux. Tout est en mouvement et en changement permanent. Nous devons attendre que les choses se calment au fil des jours et voir ce qu’il advient des candidats.

Mais fin décembre 2019, alors que les sondeurs s’interrogeaient sur l’intention d’Andrónico Rodríguez de se présenter en tête de la liste du MAS, sa candidature obtenait 40 % des intentions de vote. Plus tard, alors qu’Evo Morales s’est installé à Buenos Aires et que les débats concernant les candidats présidentiels ont été plus importants, certains sondeurs ont enquêté sur le vote en faveur du MAS, quel que soit le candidat, les intentions de vote sont restées à hauteur de 40 %. 

Propos recueillis par Fabián Kovacic

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