Pour sûr, la réussite de Sabsa mérite d’être pleinement et hautement célébrée ! C’est la victoire de David contre Goliath, le triomphe du courage et du gros bon sens sur un autocratisme libéral patenté et des mesures d’austérité aussi désincarnées que sans bon sens. Qui plus est, cette victoire est la preuve, s’il en fallait, que la lutte politico-sociale paye et qu’elle est de loin préférable au repli sur soi, à l’inaction culpabilisante et à la victimisation tous azimuts. Et cela, la clientèle de Sabsa, les élu-es de l’opposition, les contribuables, les organismes communautaires, les syndicats, les médias complices, tous l’avaient bien compris qui ont appuyé sans réserve la cause de la coopérative, chacun selon ses moyens. Par ailleurs, il faut se réjouir ici de la performance de la plate-forme de socio-financement La Ruche, qui aura permis d’accumuler quelque 900 dons allant de 5$ à 130, 000$ pour atteindre la cible. « Une première » selon son président Simon Poitras, qui parle de de « grande démonstration positive de construction collective ».
N’empêche, il en faudra plus, beaucoup plus, en matière de mobilisation et d’actions populaires et politiques, pour que les victoires à la Sabsa deviennent la norme et non l’exception. En effet, comment oublier que derrière les quelques gains arrachés de haute lutte ici et là (Sabsa, nouvelles conventions du SCFP, FIIQ, etc.), se profile l’ombre d’un navire amiral, la Santé, qui dégouline et craque de partout ? Un système public et universel, naguère aussi large et solide qu’un glacier, qui s’envase et s’empêtre de plus en plus sur les hauts fonds du privé et de l’austérité ? Qu’on pense, ici, aux 242 M $ de nouvelles compressions (s’ajoutant aux précédents 670 M $) qui se traduiront inexorablement par une dramatique surcharge de pression (surtout cet été), chez un personnel hospitalier exsangue et au bord de la crise de nerfs… Et ce, dans des hôpitaux où l’attente aux urgences atteint maintenant des records nationaux et où les soins spécialisés et les chirurgies deviennent toujours plus difficilement accessibles…
Et que dire du reste ? Je pense ici aux CHSLD et aux CLSC tournés en ridicule et dépossédés de leur personnel et de leurs moyens financiers, aux Centres Jeunesse assis sur des volcans, aux groupes communautaires éternellement à court d’argent, à ces médecins qui honorent la profession en surfacturant et en défiant la loi de l’aide médicale à mourir au CUSM, aux soins à domicile toujours insuffisants, à la recherche médicale oubliée, au Plan d’Action Santé Mentale (PASM) laissé sur la touche, bref, la liste des griefs est longue…
Heureusement, par-delà ce paysage dévasté, il y aura eu le bon travail des élu-es des partis d’opposition, les Lamarre, Maltais et Lisée (P.Q.), Paradis (CAQ), David et Khadir (Q.S.). Et il faut aussi prendre bonne note de la promesse électorale de Véronique Hivon (P.Q.), de s’engager (si élue) à rendre accessible la psychothérapie pour tout le monde. Que voilà une promesse aussi rafraichissante que sensée et porteuse d’espoir !
Enfin, à l’instar de Sabsa, la population du Québec devra nécessairement réapprendre à ne compter que sur ses propres forces.
Pour « guérir » la Santé et se guérir des libéraux !
Gilles Simard, pair aidant en santé mentale.