Édition du 17 décembre 2024

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Politique d’austérité

Rapport Godbout : poursuite de la révolution tarifaire sous vernis progressif

Luc Godbout frappe encore. Après avoir préparé le terrain à Raymond Bachand il y a maintenant cinq ans pour l’instauration de la révolution tarifaire, il revient à la charge. Le rapport déposé hier est clair : les Québécois et les Québécoises pourraient avoir droit à 3,4 milliards $ de baisses d’impôt et à l’annulation de la très impopulaire contribution santé. En contrepartie toutefois, ils devront payer plus de taxes et absorber d’importantes hausses de tarifs.

Tiré du site de l’IRIS.

Bien que le réputé fiscaliste se targue d’opérer une opération à somme nulle, sa véritable intention reste la même : transformer le système fiscal québécois en réduisant l’importance de l’impôt comme outil de redistribution de la richesse. L’équité est la grande absente de ce rapport même si cette valeur figurait pourtant au cœur du mandat confié à M. Godbout.

Marginaliser l’impôt

Plusieurs mesures comprises dans le rapport sont pourtant intéressantes. Pensons à la majoration du montant personnel de base, à la bonification du crédit d’impôt pour solidarité ou encore à la création de neuf paliers d’imposition. Pourtant, une analyse complète du rapport révèle – sous la mince couche de vernis progressif – une proposition de réforme fiscale socialement régressive.

D’un côté il y aura des gagnants : les contribuables à haut revenu.

De l’autre, des perdants : tous les autres.

C’est dommage, puisque le rapport Godbout contient des mesures attendues depuis longtemps pour favoriser la progressivité de l’impôt. Malheureusement, l’augmentation tous azimuts de taxes et de tarifs viendra rapidement annuler tout allégement fiscal dont pourrait bénéficier la classe moyenne et les plus démunis.

En voici quelques exemples :
 
 Augmentation de la TVQ à 11 %.

 Hausse des tarifs d’Hydro-Québec.

 Hausse des taxes sur l’essence.

 Fin de l’exemption de taxe de vente sur les livres, les couches et certains produits d’alimentation.

 Etc.

Le rapport Godbout affirme que les moins nanti.e.s seront protégés contre les hausses de taxes à travers la bonification du crédit de solidarité. Une étude publiée à l’automne par l’IRIS montre pourtant l’échec d’une telle approche. Contrairement aux prétentions de M. Godbout, le crédit d’impôt de solidarité est loin d’avoir épargné aux moins fortuné.e.s une augmentation de leur contribution fiscale. Il s’agit d’une mesure intéressante, mais qui s’est avérée insuffisante. Rien ne porte donc à croire que cela fonctionnera dorénavant.

Favoriser la surépargne des entreprises

Le rapport Godbout propose de réduire le taux d’imposition des grandes entreprises de 1,9%, ce qui placerait le Québec au sommet de la liste des provinces les plus clémentes envers celles-ci. Si les recommandations du rapport devaient être adoptées, cela reviendrait à réduire encore plus leur contribution fiscale, déjà bien trop faible. Bien qu’ils bénéficient déjà des infrastructures et des services publics, il semble que M. Godbout préfère répondre aux demandes des lobbys d’affaires que de les faire contribuer leur juste part.

De plus, les modifications proposées à la fiscalité des entreprises ne prennent aucunement en considération la donnée principale des dernières années, à savoir une accumulation impressionnante des liquidités dans les coffres des entreprises. Une étude récente de l’IRIS démontrait justement que baisser les impôts des grandes entreprises pour les encourager à investir dans l’économie ne fonctionnait pas. Plutôt que de répondre à cette situation qui prive le gouvernement et l’économie de ressources importantes, M. Godbout a choisi d’en accélérer le processus.

Écofiscalité : faire payer les pauvres

De plus, la partie du rapport qui porte sur l’écofiscalité repose essentiellement sur une augmentation des tarifs d’Hydro-Québec. En raison du caractère largement non compressible des dépenses d’électricité des ménages, la hausse tarifaire ne conduira pas à une diminution de la consommation d’énergie mais simplement à une hausse des dépenses pour les Québécois et Québécoises.

En somme, M. Godbout a beau rôle en jouant sur deux tableaux, et en nous présentant un rapport sous forme de budget équilibré. D’un côté il propose un système d’impôt plus progressif à 9 paliers, mais de l’autre il tente de faire disparaître ce système sous une augmentation substantielle de taxes et de tarifs régressifs. Malheureusement pour lui (et pour nous), le gouvernement pourra bien choisir de ne retenir que les mesures qui lui plaisent. Il est fort à parier alors que nous aurons des taxes sans les neuf nouveaux paliers d’impôt et des tarifs sans compensation suffisante. Ce que nous obtiendrons certainement toutefois, c’est la poursuite de la transformation de notre système fiscal. L’héritage que M. Godbout est en train de léguer sous couvert d’efficacité est un Québec plus inégalitaire.

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