Édition du 19 novembre 2024

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Environnement

Quelques milliers de litres ? Imaginez une rupture de pipeline !

St-Dominique, le 18 janvier 2015

Jeudi matin, à Longueuil, 28 000 litres (l’équivalent d’une demi-citerne) de diesel se sont retrouvés dans le fleuve Saint-Laurent et quelques milliers de litres dans le réseau d’eau potable de la ville. Résultat : on demande à tous les citoyens de ne plus consommer l’eau du robinet. Près de 390 000 citoyens privés d’eau potable pour quelques milliers de litres de diesel. Les autorités ne savent pas combien de temps durera cette privation. Il faut nettoyer le système de distribution public et ensuite celui des résidences privées.

Maintenant, imaginez la rupture d’un éventuel pipeline qui transporterait 1,1 million de barils de pétrole par jour et qui déverserait pendant quelques minutes son contenu dans la rivière des Outaouais, en amont de la prise d’eau de la ville de Montréal. Catastrophe ! Des millions de citoyens privés d’eau potable. Pour combien de temps ? Autre bonne question, car le pétrole brut est beaucoup plus difficile à nettoyer que le diesel. Parlez-en aux résidents des environs de la rivière Kalamazoo au Michigan ou, plus près de nous, aux résidents riverains de la rivière Chaudière, polluée par le déraillement du train de Lac-Mégantic il y a un an et demi.

Je fais ici allusion au pipeline que la compagnie TransCanada veut construire au Québec afin d’exporter du pétrole issu des sables bitumineux de l’Alberta. Malgré toutes les bonnes intentions du monde, personne ni rien n’est à l’abri d’une erreur humaine ou technique. Les risques sont minimes, mais quand même bien réelles, qu’un incident malheureux se produise. Et que dire des catastrophes naturelles éventuelles ? Glissement de terrain, tremblement de terre, même faible…

Dans un avenir rapproché, cette compagnie va tenter par tous les moyens de nous convaincre du bien-fondé de son insensé projet de construction d’un pipeline. C’est bon pour l’économie, ça crée des emplois, c’est la façon la plus sécuritaire de faire voyager le pétrole, c’est pratiquement sans risque, ils auront les meilleures techniques au monde pour inspecter leurs tuyaux, etc. Des personnalités connues viendront sur la scène publique pour nous convaincre de la véracité de ces affirmations. On en fera peut-être même un enjeu électoral pour l’automne prochain au fédéral !

Mais dans tout cela, jamais on nous dira que des catastrophes, quoique de probabilité statistiquement faible, sont quand même prévisibles. De l’aveu même de la compagnie, des fuites de moins de 1,5 % sont difficiles à détecter ; 1,5 % de 1,1 million de barils, c’est énormément plus que quelques litres de diesel. De plus, on ne sait pas comment intervenir s’il y a de la glace dans les environs du déversement… Est-ce que ça se produira dans un an, deux, dix, vingt ou cinquante ans ? Peu importe, ça va arriver, et ce jour-là, on nous dira qu’on est désolé et qu’on fait du mieux pour réparer… en nous faisant payer la facture bien évidemment, comme à Lac-Mégantic.

Jacques Tétreault

Jacques Tétreault

Enseignant au CFM (Centre de formation des Maskoutains) et président du Comité des Citoyens et Citoyennes pour la Protection de l’Environnement Maskoutain (CCCPEM). Il est aussi coordonnateur général adjoint du Réseau Vigilance Hydrocarbures Québec.

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