Édition du 12 novembre 2024

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Environnement

Projet de loi 106 : un maire irréfléchi

Dans un article signé Paule Vermot-Desroches (Le Nouvelliste, 21 août 2016), le scientifique Marc Brullemans, porte-parole du Comité Vigilance Hydrocarbures, dénonce avec raison « l’absence de prise de position de la Ville » de Trois-Rivières sur le projet de loi 106 concernant la politique énergétique du gouvernement et l’exploitation des hydrocarbures

La Ville considère n’avoir rien à dire en dépit de tous les dossiers municipaux touchés par cette loi sur lesquels les intérêts des pétroleux-gazeux auraient priorité : aménagement du territoire, protection de l’eau, tourisme, dévaluation des propriétés, droit d’expropriation... Partout où la fracturation hydraulique est mise en oeuvre, des problèmes surgissent : contamination des aquifères, séismes en zones habituellement non sujettes aux séismes, etc. Quelle importance, pourquoi le conseil trifluvien devrait-il prendre position sur cette loi qui favorise justement la fracturation ? Des déversements de pipelines et des marées noires surviennent un peu partout, pourquoi nous inquiéterions-nous que ça puisse arriver chez nous ? Les pétrolières, avec la complicité des gouvernementeux, en font baver aux citoyens de Gaspé et de Restigouche à propos de la protection de leur eau potable, pourquoi s’en soucier ? Et en quoi nous concerne le règlement bidon sur le prélèvement et la protection des eaux conçu pour favoriser les intérêts pétroliers ?

Ceci rappelle les propos du maire Lévesque (Le Nouvelliste, 26 janvier 2016) par lesquels il accuse les opposants à Énergie Est d’être des citoyens « irréfléchis ». Un collectif d’environ 170 scientifiques, des organisations comme Les Artistes pour la paix, déjà une centaine de municipalités s’y opposent, ainsi que des milliers de citoyens par des manifestations et des pétitions. Des crétins irréfléchis ! Énergie Est ferait augmenter drastiquement l’exploitation des sables bitumineux, l’une des principales causes de GES au monde ; un collectif de 110 scientifiques nord-américains et des prix Nobel en tous genres s’y opposent. Des idiots irréfléchis ! Le maire se prendrait-il pour le seul être réfléchissant en ce monde !

Il n’est pas sans savoir que la majorité des administrateurs de l’Office national de l’énergie (ONÉ) proviennent de l’industrie pétrolière et entretiennent des liens étroits avec celle-ci, que l’ONÉ n’a jamais rien refusé aux pétrolières et que son préjugé favorable envers Énergie Est est connu depuis longtemps. Il sait que se tient actuellement sous l’égide de l’ONÉ une pseudo-consultation sur le projet Énergie Est, et ce, même si le promoteur TransCanada ne remplit pas toutes les conditions requises, dont la traduction française des documents et la production de données concernant la traversée de l’Outaouais.

Le fait que TransCanada ait l’un des pires bilans en matière de sécurité et de déversement ne suffit pas à inquiéter notre maire, qui se dit rassuré à 99.9% (sic). Après tout, les catastrophes pétrolières n’arrivent qu’ailleurs, comme dans la rivière Saskatchewan Nord et dans la rivière Kalamazoo au Michigan, ou à Santa Barbara en Californie et à Sept-Îles près de chez nous, la liste serait trop longue à relater ici, mais ça ne peut surtout pas se produire dans la Saint-Maurice en amont de la prise d’eau potable de Trois-Rivières, nous sommes sous la protection de la pensée magique de notre maire.

Imaginons un déversement à cet endroit, le maire croit peut-être que les touristes s’agglutineraient dans son amphithéâtre situé à proximité pour regarder la nappe pétroleuse s’engouffrer dans le Saint-Laurent à l’embouchure de la rivière et pour en sniffer l’odeur ! Sans compter l’énorme dégât qu’un tel déversement provoquerait sur les berges de l’île Saint-Quentin, autre lieu récréo-touristique important de Trois-Rivières.

Ce risque d’une catastrophe économique autant qu’écologique ne devrait-il pas préoccuper nos élus trifluviens plutôt que de les laisser indifférents ? Mais bien sûr, ceux qui s’en inquiètent sont des citoyens irréfléchis !
Par son déni des faits et son mépris des citoyens, le maire Lévesque démontre encore une fois son ignorance et son aveuglement volontaire, simplement pour ramasser des miettes d’hypothétiques emplois et redevances.

M. Brullemans a raison de dire « … que les prix gagnés [par la municipalité de Trois-Rivières] pour l’environnement, ce n’est que de la poudre aux yeux. Lorsqu’il est question de se positionner là où ça compte vraiment, pour le futur, on est probablement la Ville la moins verte au Québec. ».

Robert Duchesne, Trois-Rivières

Mots-clés : Environnement Québec

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