Les événements du vendredi 4 mai à Victoriaville ont été trop graves pour que ce qui s ’est passé ce jour là ne soit considéré, rétrospectivement, que comme un fait divers. La répression policière n ’attendait que la provocation de ’casseurs ’ pour trouver une justification au déploiement d ’une brutalité dont on ne peut écarter la préméditation. La présence, auprès de la SQ, du SCRS (Service canadien du renseignement de sécurité) à la manifestation de Victoriaville (cf le Journal de Montréal, 6 mai 2012) suscite aussi de sérieuses interrogations, notamment en considération de faits antérieurs bien documentés, relatifs à cette agence, ainsi qu ’aux autres agences répressives de l ’État fédéral.
Ces événements de Victoriaville, d ’une gravité inégalée, ne sont pas isolés : ils constituent un tournant majeur dans une crise, dont les effets sont directement observables, entre autres des gains politiques au bénéfice du PLQ, mais dont les stratégies sous-jacentes restent à documenter.
L ’ampleur des incidents qui se sont produits depuis trois mois, soit depuis le début de la mobilisation étudiante, avec des dizaines de blessés (manifestants et policiers) et des centaines d ’arrestations (dont la grande majorité résulte de la simple présence sur les lieux d ’une manifestation ’illégale ’), la répression judiciaire du mouvement étudiant sous forme d ’injonctions, tout cela a les apparences d ’une ’Crise d ’octobre ’ de basse intensité, avec des moyens actualisés, dans un contexte où le gouvernement ’provincial ’ du PLQ, pas plus que son appareil de rechange (la CAQ), ne sont en mesure de garantir la préservation des intérêts des groupes socioéconomiques dominants à la direction de l ’État québécois. La perspective d ’une possible élection du Parti québécois n ’a peut-être pas maintenu les agences fédérales dans un attentisme de réserve.
Sur le théâtre politique et médiatique, on a vu s ’agiter des acteurs, en déficit de légitimité politique ou morale, animés par une obsession radicale, celle de vaincre et humilier la jeunesse étudiante, massivement victime d ’une stigmatisation politique et d ’une répression policière qui marquera cette génération dans sa mémoire historique.
Le caractère répétitif et amplifié de cette répression brutale du mouvement étudiant ainsi que de certaines composantes du mouvement populaire, répression conjointe à des provocations également répétées et inquiétantes de ’casseurs ’, cela suscite d ’incontournables questions, posées par un nombre croissant de citoyens, et auxquelles des réponses documentées et fiables doivent être apportées, faute de quoi se propageront des rumeurs circulant déjà dans le monde social et virtuel, mais on verra aussi s ’amplifier le doute et l ’inquiétude sur la qualité voire l ’existence de notre démocratie.
C ’est pourquoi, dans la nécessaire préservation de cette fragile et incomplète démocratie, et avant même la fin de la ’crise étudiante ’, il importe de mettre en ’uvre une Enquête publique sur la répression du mouvement social et étudiant du Québec, en cette année 2012 !
Conjointement à cette requête, il serait nécessaire, pour contribuer à la paix sociale, de solliciter l ’amnistie de tous les manifestants arrêtés et inculpés pour leur simple présence sur les lieux d ’une manifestation.