Pas besoin d’être grand clerc pour savoir que les finances publiques allaient être « durement frappées » par la pandémie de la COVID-19.Dans son Portrait de la situation financière et économique présenté le vendredi 19 juin 2020, le ministre des Finances, Éric Girard, nous donne l’état de la situation : le déficit prévu pour la présente année va s’élever à 14,9 milliards de dollars. Elle est donc très loin de nous cette journée où le ministre des Finances envisageait, le 10 mars dernier, une croissance économique rapide du Québec et un surplus budgétaire de plusieurs milliards de dollars. Il n’avait pas anticipé que la dialectique économique peut osciller, du jour au lendemain, sans crier gare, entre l’abondance et la… rareté.
Le déficit anticipé pour la présente année, qui se situe autour de 15 milliards de dollars, comprend une provision de 4 milliards en vue de la deuxième vague de la pandémie qui nous attend au cours des prochains mois. Pour combler les pertes anticipées pour la présente année, le gouvernement va recourir à la totalité de sa réserve de stabilisation. L’équilibre budgétaire est prévu dans cinq ans et le ministre Girard table sur le retour à une croissance économique de 6 % d’ici décembre 2021 pour y arriver. Le ministre Girard promet à ce sujet que : « L’atteinte de cet objectif (l’équilibre budgétaire Y.P.) ne se fera pas au détriment des services publics ou par une hausse du fardeau fiscal des Québécois. »
Lors de sa conférence de presse du 19 juin 2020, le ministre Girard a parlé de la présente ronde de négociation dans les secteurs public et parapublic. Il a précisé que les « 800 millions et plus de primes d’incitatifs au travail durant la COVID […] vont devenir permanentes ». Il a aussi mentionné qu’il y a dans le document Portrait de la situation économique et financière 2020-2021 « un encadré sur la négociation dans le secteur public. » À ce sujet, il a ajouté que « Les offres sont là. Le Québec a présentement la capacité de supporter ces offres-là. »
Nous avons eu la curiosité d’aller consulter cet encadré. Quiconque veut partager notre lecture en arrivera à la conclusion que le ministre des Finances utilise la menace en vue de contraindre les « représentants syndicaux des secteurs public et parapublic » à prendre l’offre salariale gouvernementale présentement sur la table. Le dernier paragraphe de cet encadré est très explicite à ce sujet : « En raison de circonstances exceptionnelles, la capacité gouvernementale de maintenir cette proposition pourrait évoluer rapidement. »
Négocier sous le coup de la menace
Bref, l’offre gouvernementale présentement sur la table est à prendre ou à laisser. Autrement dit, si vous ne l’acceptez pas, attendez-vous à une offre moins élevée.
C’est ce qui s’appelle une menace directe et explicite de la part du gouvernement Legault aux "représentants syndicaux" en pleine négociation.
Annexe 1
Encadré intitulé : « Les offres salariales du gouvernement aux représentants syndicaux des secteurs public et parapublic ». Extrait. Page D. 18
« Dans le cadre des négociations pour le renouvellement des conventions collectives des employés de l’État, le ministre responsable de l’Administration gouvernementale et président du Conseil du trésor a présenté, entre le 19 et le 22 mai 2020, des propositions d’entente de principe aux représentants syndicaux des secteurs public et parapublic.
– Les ententes conclues avec la plupart des employés de l’État pour la période 2015-2020 sont venues à échéance le 31 mars 2020.
Dans le contexte particulier de la pandémie de COVID-19, le gouvernement a révisé sa proposition en ramenant la période couverte par le prochain renouvellement de cinq à trois ans.
Le gouvernement offre des paramètres salariaux de 5,00 % sur trois ans. Cette hausse est supérieure à la variation prévue de l’IPC pour la même période, qui totalise 4,30 %.
L’offre contient également le versement de montants forfaitaires de 1 000 $ en 2019-2020 et de 600 $ en 2020-2021.
Certaines mesures sectorielles et des bonifications à l’intérieur des forums de discussion dédiés aux groupes prioritaires sont également prévues.
L’ensemble de ces éléments sont inclus dans le cadre financier du budget 2020-2021 et représentent une augmentation totale de 6,00 % de la masse salariale sur trois ans.
En raison de circonstances exceptionnelles, la capacité gouvernementale de maintenir cette proposition pourrait évoluer rapidement. »
http://www.budget.finances.gouv.qc.ca/budget/portrait_juin2020/fr/documents/Portrait_financier_QC_Juin2020.pdf . Consulté le 19 juin 2020.
http://www.assnat.qc.ca/fr/actualites-salle-presse/conferences-points-presse/ConferencePointPresse-62515.html . Consulté le 19 juin 2020.
https://www.ledevoir.com/politique/quebec/581153/mise-a-jour-economique-du-quebec-vendredi-19-juin-2020 . Consulté le 19 juin 2020.
http://www.budget.finances.gouv.qc.ca/budget/portrait_juin2020/fr/documents/Communique.pdf . Consulté le 19 juin 2020.
Yvan Perrier
19 juin 2020
12h30
yvan_perrier@hotmail.com
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