Édition du 17 décembre 2024

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Négociation dans les secteurs public et parapublic : Le moment de vérité approche à grand pas…

Nous sommes déjà dans le deuxième mois de l’année 2021. Le « temps des fêtes » est derrière nous et nous approchons à grands pas du jour de la Saint-Valentin, ce jour de l’année qui est souvent celui des belles déclarations et des grandes vérités dans les « couples ». Place à un commentaire autour de certains aspects de la vie politique et de la vie syndicale. Les politicienNEs vont-elles et vont-ils commencer à manifester d’authentiques signes de reconnaissance et de valorisation -autrement dit, montrer de vrais signes d’amour- pour ces 550 000 à 560 000 salariéEs syndiquéEs qui sont à environ 75% des femmes ?

Reprise des travaux parlementaires

Le mardi 2 février, nous avons assisté à la reprise des travaux parlementaires à l’Assemblée nationale à Québec. En temps normal, les médias se seraient emparés de cet événement pour noircir leurs colonnes ou meubler du temps d’antenne à la télévision ou à la radio. Hélas, nous ne sommes pas en temps normal. Nous traversons un moment qui est outrageusement dominé par le virus COVID-19.

Coïncidence ou non, c’est cette fameuse journée du 2 février 2021 que le premier ministre du Québec a choisi pour nous annoncer des mesures d’assouplissement en lien avec le couvre-feu et le confinement à domicile. Il faut rappeler ici qu’en cette période trouble le premier ministre en exercice a droit à une couverture médiatique qui en fait jalouser plusieurs du côté des leaders ou des porte-parole des partis politiques de l’opposition. Le premier ministre va chercher une couverture qui fait ombrage à ses vis-à-vis de l’opposition. Un tantinet opportuniste, François Legault sait que l’échéance électorale approche. Nous sommes à vingt mois du prochain scrutin général au Québec.

François Legault a besoin de garder sur lui les stylos et les micros des journalistes et les projecteurs de la télévision. Il a besoin aussi que les journalistes écrivent sur les sujets qu’il choisit pour montrer à la population qu’il prend les décisions qu’elle souhaite entendre à ce moment-ci. Et c’est ce qu’il parvient à faire avec, reconnaissons-le, une habileté certaine. Ceci a pour effet de déstabiliser les leaders (ou porte-parole) des autres formations politiques présentes à l’Assemblée nationale.

Pour attirer l’attention sur elle, la cheffe du Parti libéral du Québec, madame Dominique Anglade, veut que son parti adopte une Charte des régions et elle nomme Gaétan Barrette à titre de critique de la Présidente du Conseil du trésor. Jusqu’à maintenant, celui qui a déjà été Président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, ex-candidat de la Coalition Avenir Québec et ex-ministre de la Santé et des services sociaux a démontré qu’il s’intéressait quasiment uniquement à un seul sujet : les intérêts corporatistes des médecins spécialistes, des généralistes et de certaines infirmières.

Pour les autres salariéEs syndiquéEs, il ne semble pas y avoir, dans la carrière de Gaétan Barrette, de trop nombreuses déclarations de solidarité pour ce personnel de première ligne qui est scandaleusement sous-rémunéré et dangereusement surexposé en ce moment dans les établissements de santé et des services sociaux et de l’éducation. Les 550 000 à 560 000 salariéEs syndiquéEs des secteurs public et parapublic, qui sont à environ 75% des femmes, ne disposent d’aucun véritable appui du côté des partis politiques de l’opposition.

Elles et ils sont toujours seules et seuls dans la défense de leurs revendications et l’exercice de leurs moyens de pression. Peut-on parler d’un manque de solidarité à leur endroit de la part des membres de la classe politique (membres du gouvernement et leaders ou porte-parole des partis politiques de l’opposition) ? Ma réponse à cette question est indubitablement « Oui ». Manque de valorisation et manque d’amour également. Peu, trop peu est fait pour protéger les membres de ce personnel qui est atteint de la COVID-19 en trop grand nombre.

Vote sur les moyens de pression

Cela fait maintenant plus de dix mois que les contrats de travail dans les secteurs public et parapublic sont échus. Dix mois où les salariéEs syndiquées de ces secteurs n’ont pas reçu aucune augmentation de salaire. Dix mois où ces personnes se sont fait promettre diverses choses qui ne se sont pas concrétisées. La négociation devait être finalisée, selon les dires même du premier ministre François Legault, à la fin du mois de mars 2020. Dix mois plus tard, il y a eu une conclusion des négociations autour de certains aspects des conditions de travail des préposéEs aux bénéficiaires et la conclusion d’une entente de principe sectorielle avec la FIQ.

Pour les autres, rien. Pire, un sentiment de se faire « niaiser » par la partie patronale qui se contente de simuler la négociation. Devant cet état de fait, où la négociation avance à pas de tortue, la CSQ a obtenu de ses syndicats de l’éducation une banque de journée de grèves de 5 jours. Les quatre fédérations de la CSN consultent en ce moment leurs assemblées générales autour d’un mandat de moyens d’action et éventuellement d’un plan d’action à adopter à nouveau autour de l’exercice de la grève. Avec la fonte de la neige, il se peut que les salariéEs syndiquéEs des secteurs public et parapublic s’activent et se mobilisent en déployant des moyens d’action et de visibilités qui vont faire ombrage à François Legault et aux autres leaders ou porte-parole aphones (parce qu’elles et ils disent peu de choses sur la présente ronde de négociation) de l’opposition.

Conclusion

Le gouvernement a une marge de manœuvre pour bonifier son offre à ses salariéEs syndiquéEs. Il doit cesser illico d’injecter de l’argent, en provenance de l’impôt et des taxes, pour le verser dans ce fonds d’accumulation (et de spéculation) capitalistique qui a pour nom le Fonds des générations. Un nom mensonger et porteur d’injustices à l’endroit des femmes et des hommes qui se donnent et se dévouent dans ces emplois essentiels à notre qualité de vie et à notre développement social, éducatif, culturel et économique.

Devant des menaces de perturbations et d’interruption de services François Legault optera-t-il pour la voie de la négociation véritable ou déploiera-t-il les armes répressives qu’il a à sa disposition ? François Legault a-t-il de l’argent sonnant ou uniquement de bons sentiments qui reposent sur des paroles vides de sens pour les personnes vers qui elles sont dirigées, c’est-à-dire pour ses 550 000 à 560 000 salariées syndiquées ?

À suivre…

Dernière heure

Nous apprenons à l’instant que la présidente du Conseil du trésor, madame Sonia Lebel aurait largué les gestionnaires des centres de services scolaires du Comité patronal des négociations en éducation. Est-ce là un signe que les négociations vont vraiment prendre de la vitesse à la table de l’éducation ? Possible.

Il arrive parfois que le gouvernement préfère ficeler, finaliser ou conclure sa négociation dans le cadre d’un comité dit « restreint », c’est-à-dire en l’absence d’actrices et d’acteurs mineurs à ses yeux. Pour le moment, nous savons que depuis le mois de décembre 2019, le gouvernement Legault a prévu « des mesures dédiées aux groupes prioritaires (préposés aux bénéciaires et enseignants) ».

Le gouvernement semble convaincu d’avoir réglé avec les préposéEs aux bénéficiaires et, à moins d’un revirement de dernière minute, d’abord avec les infirmières de la FIQ et ensuite avec les mêmes infirmières des autres organisations syndicales. Cherche-t-il, à ce moment-ci, à intensifier la négociation avec les enseignantEs avant de conclure avec les autres organisations syndicales présentes dans les secteurs public et parapublic ? Peut-être. Quoi qu’il en soit, nous semblons arrivés au moment où les parties se disent : « Ça passe ou ça casse ! » À suivre…

https://www.ledevoir.com/societe/education/594693/schisme-a-la-table-patronale-en-education. Consulté le 5 février 2021.

Le mot de la fin…

La Saint-Valentin est cette journée où, dans certains cas, les célibataires espèrent trouver l’âme sœur. C’est également la journée où celles et ceux qui sont déjà engagés dans une relation de couple constatent et réalisent jusqu’à quel point elles et ils sont précieuses et précieux pour l’autre. Journée durant laquelle le pôle dominant montre qu’il apprécie à sa juste valeur celles et ceux sans qui il ne serait rien… Au gouvernement Legault de reconnaître enfin que sans salariéEs syndiquéEs, il n’est rien !

Yvan Perrier

5 février 2021, 20 heures

https://secteurpublic.quebec/2021/02/01/info-nego-no-14-nous-en-avons-assez-du-mepris-de-ce-gouvernement/. Consulté le 5 février 2021.

Yvan Perrier

Yvan Perrier est professeur de science politique depuis 1979. Il détient une maîtrise en science politique de l’Université Laval (Québec), un diplôme d’études approfondies (DEA) en sociologie politique de l’École des hautes études en sciences sociales (Paris) et un doctorat (Ph. D.) en science politique de l’Université du Québec à Montréal. Il est professeur au département des Sciences sociales du Cégep du Vieux Montréal (depuis 1990). Il a été chargé de cours en Relations industrielles à l’Université du Québec en Outaouais (de 2008 à 2016). Il a également été chercheur-associé au Centre de recherche en droit public à l’Université de Montréal.
Il est l’auteur de textes portant sur les sujets suivants : la question des jeunes ; la méthodologie du travail intellectuel et les méthodes de recherche en sciences sociales ; les Codes d’éthique dans les établissements de santé et de services sociaux ; la laïcité et la constitution canadienne ; les rapports collectifs de travail dans les secteurs public et parapublic au Québec ; l’État ; l’effectivité du droit et l’État de droit ; la constitutionnalisation de la liberté d’association ; l’historiographie ; la société moderne et finalement les arts (les arts visuels, le cinéma et la littérature).
Vous pouvez m’écrire à l’adresse suivante : yvan_perrier@hotmail.com

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