« Un an après que le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) ait jugé le projet « non acceptable », il y a encore beaucoup de questions sans réponse », s’inquiète Ugo Lapointe, porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine et coordonnateur canadien de MiningWatch Canada.
« Aucune nouvelle étude n’a été présentée à la population depuis un an. Tout se fait sans transparence, derrière des portes closes. La décision du gouvernement d’aller de l’avant contre l’avis du BAPE, sans avoir informé et obtenu l’appui formel de la Nation Innue et de la population de Sept-Îles est très préoccupante », affirme Louise Gagnon du Regroupement citoyens pour la sauvegarde de la grande Baie de Sept-Îles.
Des questions sans réponse
1. Le BAPE a conclu que le projet était « non acceptable » pour des raisons de sécurité et d’environnement. Qu’est-ce qui a changé depuis un an pour que le projet soit aujourd’hui jugé « acceptable » sur les plans de la sécurité et de l’environnement ? Y a-t-il de nouvelles études qui ont été réalisées après février 2014 ? Ces études sont-elles publiques ?
2. Le BAPE remet également en question la rentabilité économique du projet dans un contexte de baisse mondiale du prix du phosphate et des coûts élevés de production. Le BAPE craint que « le promoteur pourrait éprouver des problèmes de rentabilité quelques années à peine après le début de l’exploitation ». Le BAPE souligne que le gouvernement étant « actionnaire de Mine Arnaud », cela « constitue en fait une socialisation des risques ». Combien d’argent public sera dépensé dans ce projet ? Quel est le prix de vente du phosphate qui a été négocié avec l’acheteur ? Y a-t-il une nouvelle étude de faisabilité économique ? Est-elle publique ?
3. Le BAPE craint pour la vie et la sécurité de la population en cas d’un glissement de terrain ou du bris d’une digue qui entraînerait un déversement et des impacts majeurs sur les résidences et les infrastructures situées en aval, notamment les maisons du Canton Arnaud, la route 138 (voie d’accès principale de la région) et les lignes hydro-électriques qui alimentent le reste du Québec et les États-Unis. Quelles modifications ont été apportées au projet pour éliminer ces risques ? Quelles sont les mesures d’urgence et la police d’assurance de Mine Arnaud en cas d’un déversement catastrophique ?
4. Le BAPE conclut que le projet aurait un impact « irréversible » sur le paysage de la Baie de Sept-Îles et qu’aucune étude « approfondie » n’a été réalisée pour évaluer les impacts qu’entraînerait « le rejet de 2000 à 4000 tonnes de contaminants » dans les eaux de la Baie-de-Sept-Îles pendant la durée de la mine (eaux du fleuve). Mine Arnaud a-t-elle corrigé cette importante lacune et réalisé une étude de caractérisation approfondie des impacts sur la Baie de Sept-Îles ? Cette étude est-elle publique ?
5. Le BAPE craint plusieurs dépassements de normes et a dénoncé le manque de rigueur de Mine Arnaud concernant l’évaluation des impacts sur les eaux souterraines, les eaux de la Baie de Sept-Îles, les émissions de poussière, le bruit et les impacts psychosociaux. Quelles nouvelles études ont été réalisées pour évaluer ces impacts ? Sachant qu’une mine à ciel ouvert de taille semblable à Malartic n’est pas en mesure de respecter les normes reliées aux poussières, au bruit et aux dynamitages (plus de 150 avis d’infraction depuis 2009), que sera-t-il fait de différent à Sept-Îles pour que toutes les normes soient respectées ?
6. De plus en plus d’intervenants au Québec s’inquiètent des impacts des mines à ciel ouvert en milieux habités et en milieux sensibles, notamment les directions régionales de la Santé publique, l’Institut nationale de la santé publique du Québec, des syndicats, des groupes citoyens, des organismes environnementaux et des associations de médecins. Ces organismes réclament un changement des lois et des normes qui encadrent les mines à ciel ouvert au Québec. Le BAPE recommande également un changement de certaines normes et règlements. Le gouvernement compte-t-il répondre à ces demandes et agir ?
« Le gouvernement étant actuellement actionnaire majoritaire du projet Mine Arnaud a une responsabilité accrue d’agir de façon responsable et de rendre des compte à la population en toute transparence. Agir de façon contraire enverrait un très mauvais signal », de conclure M. Lapointe.