Édition du 17 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Lettre que je viens d'envoyer à la mairie.(Québec)

Bonjour,

Je viens d’apprendre, en ce vendredi 4 novembre, 18:30, que la Ville de Québec avait décidé d’expulser les campeurs de la Place de l’Université du Québec.

Je suis profondément scandalisé par cette décision autoritaire, arbitraire et injustifiée. Ainsi s’attaquer à l’un des exercices démocratiques des plus prometteurs en ces temps de déficit démocratique et de cynisme exacerbé relève d’un manque profond de solidarité humaine, que les services publics devraient normalement garantir, et s’appuie sur des arguments creux. Ayant gravité autour des campeurs, je sais pertinemment que ceux-ci auraient été prêts à apporter les modifications minimales à assurer l’efficacité d’une intervention d’urgence, l’objectif des indignés n’étant évidemment pas de bloquer la bonne marche de nos services essentiels, mais d’affirmer notre découragement et notre incapacité à supporter davantage un système économique qui concentre dans les mains d’une élite apatride et asociale toute richesse crée à partir de notre dur labeur quotidien.

Notre découragement, c’est aussi le vôtre, celui du payeur d’impôts, de père, de mère, de citoyen, d’être humain et celui aussi de serviteur du bien public. Devant une idéologie néolibérale de plus en plus agressive qui cherche à soumettre aux lois pseudo-scientifiques de l’économie toute forme de services publics, en un temps où toute organisation public se voit forcer de soumettre sa mission première aux impératifs asociaux d’un économisme forcené qui est en train de briser les véritables raisons de la communauté humaine, j’aurais cru, j’aurais anticipé plus de solidarité de la part des exécutants de la Ville de Québec. Les indignés du Parc Saint-Roch ne sont ni des ivrognes, ni des sans-abris, ni des chômeurs volontaires avec lesquels, parfois, les employés des services municipaux éprouvent de sérieux problèmes de discussion. Ce sont des gens ouverts, impliqués et profondément solidaires, qui ne cherchent qu’à conscientiser, dans une situation de médias de masse où l’on passe si volontiers des questions fondamentales aux inepties les plus tristes, sur les problèmes de plus en plus évident de nos sociétés. En réduisant au silence, on ne démontre jamais la justesse de son point de vue, et dans le contexte où l’interlocuteur est plus qu’ouvert à entendre les arguments de l’autre, votre décision est contre l’éthique d’une organisation se réclamant de la démocratie.

Cette décision, venait-elle du maire, Régis Labeaume ? Des services de police ? En tant que citoyen de Québec, on est guère habitué à tant d’agressivité de la part des policiers, dans notre ville paisible. La décision était-elle politique ? Je l’ignore, mais tout pousse à le croire. Si tes est le cas, voilà qui n’arrange en rien les choses. Les décideurs publics ne sont pas ceux qui doivent céder aux pressions des plus forts, mais doivent être des leaders, amener la population avec eux dans des projets que seule une communauté humaine peut accomplir. Cet évènement, accompagné de la dérive autoritaire qu’a prise l’administration municipale depuis l’élection du maire n’a rien à rassurer ceux qui, comme moi, se lèvent le matin, travaillent et vont chercher la force de continuer dans l’espoir que l’humanité peut, dans le dialogue et la solidarité, aller accomplir le meilleur d’elle-même.

- Un citoyen indigné -

Charles Guay-Boutet, Étudiant en philosophie à l’Université Laval

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