Ovide Bastien, auteur de Chili : le coup divin
Alors qu’il y a presque 38 000 victimes et 89 000 blessés... que les Gazaouis souffrent d’une famine utilisée comme arme de guerre... que Gaza est tellement détruite qu’elle est inhabitable... qu’Israël est de plus en plus dénoncé à travers le monde - Assemblée générale de l’ONU, ONGs de droits de la personnes, Cour de justice internationale, Cour pénale internationale ; campements universitaires étudiants... que l’ONU vient d’ajouter Israël, le 7 juin, à sa liste d’États et groupes armés commettant des violations à l’encontre d’enfants... que Save the Children vient d’alléguer, le 24 juin, que 21 000 enfants seraient portés disparus dans le chaos de la guerre à Gaza... que ce même 24 juin on voit un Palestinien blessé attaché au capot d’une jeep militaire israélienne qui passe entre deux ambulances lors d’un raid d’arrestation dans la ville de Jénine, en Cisjordanie occupée...
Alors que cette tragédie incommensurable s’accentue de jour en jour, le président Joe Biden affirmait hier soir, dans son débat avec Donald Trump, que « Le Hamas est le seul à vouloir que la guerre se poursuive ».
Quelle absence de connaissances historiques et quel sionisme honteux ! Quelle absence de cohérence logique de la part d’un leader qui, le jour même où il attribuait une proposition de cessez-le-feu permanent à Israël, se voyait carrément contredit par le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou lui-même !
Les Britanniques appuyaient les Juifs qui s’installaient massivement en Palestine dans les années 1930s, nous rappelle Rashid Khalidi dans The Hundred Years’ War on Palestine (2020). Ils leur fournissaient armes et entrainement militaire intensif, et leur enseignaient les techniques de répression qu’ils avaient perfectionnées au cours de plusieurs décennies de guerres coloniales.
Lorsque les Palestiniens se révoltaient, en1936, contre les colonisateurs britanniques et leur appui au projet sioniste, ces derniers, affirme Khalidi, les écrasaient impitoyablement, faisant intervenir une centaine de milliers de leurs soldats et des escadrons de bombardiers. Non seulement exécutaient-ils sommairement un très grand nombre de Palestiniens, souvent à l’issue de procès sommaires devant des tribunaux militaires, mais ils détenaient aussi, sans possibilité de procès, de milliers de Palestiniens, et démolissaient les maisons des exécutés et détenus, ou de rebelles présumés.
Et lorsque les Palestiniens résistaient en tendant des embuscades aux véhicules blindés britanniques et faisant exploser leurs trains, les Britanniques avaient recours à une stratégie qu’ils avaient inaugurée lorsqu’ils tentaient d’écraser la résistance des Irlandais pendant leur guerre d’indépendance de 1919 à 1921. Comme vient de faire l’armée israélienne à Jénine, ils attachaient des prisonniers devant leurs véhicules blindés et trains, les utilisant comme boucliers humains.
Telle fut la répression, affirme Khalidi, qu’à la fin de la révolte en 1939, environ 17 % de la population palestinienne adulte masculine se trouvait tuée, blessée, emprisonnée ou exilée.
Un retour historique, et ce qui se passe à Gaza ces derniers mois, nous démontrent que les fondateurs d’Israël ont fort bien appris les leçons que leur donnaient les Britanniques.
Le 10 mars 1948, le futur Premier ministre d’Israël David Ben-Gourion se réunissait avec dix autres leaders sionistes chevronnés et quelques jeunes officiers militaires juifs afin de peaufiner un plan. Le soir même, il faisait parvenir des ordres, dont le caractère « nettoyage ethnique » est on ne peut plus clair, aux unités sur le terrain, précisant les endroits que chacune devait attaquer ainsi que les méthodes à employer : intimidation à grande échelle ; siège et bombardement de villages et villes ; expulsion de Palestiniens et incendie et démolition de leurs maisons, propriétés et biens ; pose de mines parmi les décombres afin d’empêcher tout retour des habitants expulsés.
Quelques mois plus tard, après que 750 000 Palestiniens et Palestiniennes furent brutalement expulsés de leurs terres et villes, plusieurs milliers ayant été tués lors de véritables massacres, on déclarait la fondation d’Israël.
Ce n’est pas étonnant que l’attaque du Hamas le 7 octobre dernier, où 1 200 Israéliens furent atrocement exécutés et 250 pris en otage, provienne de cette grande prison qu’est Gaza, où une bonne partie des descendants de ces exécutés et expulsés se trouvent aujourd’hui. Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, dénonçait ces atrocités, mais rappelait, contrairement à Biden, la profonde injustice historique dont souffre depuis des décennies le peuple palestinien, et qui a donné naissance à cette attaque.
Le 13 janvier 1947, Ben-Gurion écrivait à son bras droit sioniste, Moshe Sharett, qu’il était d’accord avec l’idée que ce dernier lui proposait, c’est-à-dire « de faire subir aux Palestiniens tout ce que nous voulons, incluant les faire mourir de faim. » Et il poursuivait : « Ils seront ainsi à notre merci. »
Benjamin Nétanyahou, de toute évidence, semble partager cette idée de son prédécesseur. Car, comme le monde entier le constate depuis neuf mois, il la met présentement en pratique à Gaza.
En janvier 1948, Ben-Gurion qualifiait les pertes de ses troupes « les victimes d’un second Holocauste ». Et les Palestiniens qui résistaient au projet sioniste, il les appelait « les nouveaux Nazis ». Il faisait cela, affirme Khalidi, pour s’assurer que, trois ans après l’Holocauste, ses soldats ne perdent pas courage lorsqu’ils recevaient l’ordre de nettoyer villes et villages palestiniens, de détruire, et de tuer des êtres humains.
Cette façon de faire se poursuit aujourd’hui. Le 17 octobre dernier, Benjamin Nétanyahou, lors d’une conférence de presse tenue aux côtés du chancelier allemand Olaf Scholz, qualifiait le Hamas de "nouveaux nazis". Et il répète constamment ce message, insistant que le Hamas veut l’extermination de tous les Juifs !
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