Édition du 17 décembre 2024

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Agriculture

Réponse au ministre François Gendron

Le monopole syndical de l’UPA est en fait un monopole de l’UPA sur l’agriculture du Québec.

Le ministre de l’agriculture François Gendron, interrogé sur sa future politique agricole, répète à gauche et à droite que la question du monopole syndical accordé à l’Union des producteurs agricoles (UPA) en 1972 est loin d’être le plus important problème de notre agriculture et que la future politique, pour éviter de s’enliser dans une controverse futile, entend se concentrer sur des objectifs plus susceptibles de faire consensus, comme la promotion des produits du Québec ou la lutte contre l’accaparement des terres.

Le Ministre Gendron devrait savoir que le rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture (Rapport Pronovost), qui a fait consensus à peu près partout au Québec sauf à l’UPA, a clairement démontré que le monopole syndical de l’UPA est en fait un monopole sur l’agriculture elle-même et sur les politiques agricoles, à tel point qu’il est illusoire de penser pouvoir ouvrir les structures de financement et de mise en marché actuelles, et donc répondre aux besoins du marché et des consommateurs d’aujourd’hui, sans ouvrir le monopole de représentation. Le modèle de production et de mise en marché défendu par l’UPA est conçu sur mesure pour les productions commerciales en circuit fermé. Or de plus en plus d’agriculteurs, aussi bien quelques milliers de gros producteurs regroupés dans le nouveau Conseil des Exploitants Agricoles (CEA), que les milliers de petits agriculteurs artisans, indépendants ou de proximité de plus en plus isolés,, sont étouffés par les politiques issues de ce système. Pour les mêmes raisons, alors que la demande des consommateurs pour une agriculture plus proche d’eux ne cesse d’augmenter, les produits locaux et d’appellation sont toujours difficilement accessibles.

Si le ministre Gendron ne veut pas que sa politique agricole ne s’enlise dans des vœux pieux d’achat local et de protection des terres, coiffés du terme vide de souveraineté alimentaire, il ferait mieux de s’attaquer aux vrais enjeux, et il ne pourra le faire sans s’attaquer au contrôle absolu qu’exerce l’UPA sur tout l’espace agricole, aussi bien les structures de financement, de mise en marché, de zonage agricole, de formation et de recherche que la réglementation environnementale et sanitaire. Et il ne pourra briser ce monopole agricole qu’en rétablissant le pluralisme d’accréditation et de représentation, de la façon recommandée, avec beaucoup de sagesse, par le Rapport Pronovost. Sinon, c’est le statu quo, c’est-à-dire le démembrement accéléré de notre agriculture territoriale.

Notre agriculture, tout comme nos autres ressources naturelles, est captive d’un monopole qui n’a plus sa place. La vaste consultation réalisée par la Commission Pronovost est claire à ce sujet. Ce n’est surtout pas l’UPA, qui a tout à perdre, qu’il faut consulter à ce sujet. La seule tribune ouverte qui pourrait encore confirmer au gouvernement, s’il en est encore besoin, le large consensus public autour de cette question serait une Commission parlementaire spéciale, sur invitation, mais les résultats seront sensiblement les même que ceux que la Commission a dégagé de 770 séances publiques et 720 mémoires de partout au Québec en 2008.

C’est une question de volonté et de courage politique purement et simplement. Et le présent gouvernement n’a pas démontré jusqu’ici qu’il en a beaucoup.

Roméo Bouchard

Coordonnateur de la Coalition SOS-Pronovost

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