John Nichols, The Nation, 5 janvier 2017,
Traduction, Alexandra Cyr,
« Beaucoup de travailleurs-euses ont voté pour le changement dans cette élection » a déclaré M. Bill Finn, le directeur du Kentucky State Building and Construction Trades Council, alors que les élus-es de l’État s’apprêtaient à déchirer les droits du travail. « Ce n’est pas ce changement qui était visé. Ils et elles n’ont pas voté pour des baisses de salaire ».
M. Finn est dans le vrai. Les Républicains-es du Kentucky ont lancé la nouvelle année avec une course pour introduire une véritable vague de lois contre le monde ouvrier. Pas question de se préoccuper de savoir si leur mandat leur donne le pouvoir de s’attaquer aux syndicats, de saper les salaires et les protections dans les milieux de travail. C’est un mouvement immédiat, agressif et de grande ampleur pour mettre en place les attaques tous azimut contre les travailleurs-euses et les syndicats qui les représentent.
À tout juste 15 jours de l’assermentation de D. Trump à la Présidence, les Républicains-es du Kentucky remplissaient une autre mission : faire un rappel puissant des menaces qui sont dirigées contre les familles travailleuses quand ils et elles prennent le pouvoir dans les trois branches des gouvernements, soit l’exécutif et les deux chambres. Jusqu’à maintenant, les Démocrates contrôlaient la Chambre des représentants du Kentucky. Il leur était possible de bloquer les lois anti travail qui étaient mises de l’avant par le Gouverneur républicain de l’État, Matt Bevin et ses alliés-es du Sénat de l’État, où ils détenaient le contrôle, avec le soutient financier de groupes nationaux anti syndicaux, les frères Koch et d’autres multi millionnaires. Mais en novembre de cette année, les Républicains-es ont obtenu le contrôle total de toutes les instances et l’approbation de mesures anti travail est leur priorité.
Le démantèlement des syndicats est sur la voie rapide dans la législature de l’État. Les Républicains-es refusent d’entendre les arguments des travailleurs-euses, des leaders communautaires, des propriétaires responsables dans les entreprises et des universitaires qui leur expliquent que ces attaques contre les droits du travail auront peu d’effet sur le développement économique mais beaucoup d’impacts négatifs sur les familles. Parmi les opposants à ces lois, on trouve l’Évêque catholique, Mgr John Stowe du diocèse de Lexington. Il a publié une lettre ouverte où il écrit : « L’affaiblissement des syndicats au moyen de lois dites « du droit au travail », a démontré qu’elles font baisser les salaires et les bénéfices marginaux partout où ce genre de législations ont été introduites. On ne peut considérer qu’il s’agisse d’une contribution au bien commun ».
Malheureusement, rien ni personne n’ont pu arrêter ces Républicains-es qui ont accédé au pouvoir. Leur mission n’allait pas être retardée par quelques arguments économiques, sociaux ou moraux ; ils et elles avaient la détermination pour aller de l’avant délibérément. Le 4 janvier, le Lexington Herald-leader rapportait que les slogans des syndiqués-es ne dérangeaient pas vraiment le Gouverneur Matt Bevin et ses collègues républicains-es de la Chambre et du Sénat qui avaient donné la priorité à l’approbation de ces lois. On pouvait entendre des cris de protestation et des bruits dans les corridors, mais la pièce où se tenait la rencontre était bondée par des supporteurs-euses quand le Comité de la chambre sur le développement économique et les investissements dans la main d’œuvre à présenté sa loi 1. Elle permettra aux travailleurs-euses de ne pas payer de contribution syndicale même quand le travail se passe dans des entreprises où existe un contrat syndical. La loi 3 a aussi été adoptée. Elle élimine la loi sur les conditions minimales du travail.
En une fin de semaine, toutes les initiatives contre le monde ouvrier ont été approuvées.
Le Kentucky est un État unique. Mais le phénomène ne concerne pas que ce seul État. Les Républicains-es du Kentucky appliquent un modèle élaboré par des gouverneurs de ce parti comme Scott Walker du Wisconsin. Ce modèle stipule, qu’en cas d’accès au pouvoir, les Républicains-es doivent immédiatement faire le nécessaire pour affaiblir les syndicats parce qu’ils pourraient soutenir les Démocrates qui sont en faveur du maintient des services publics dont le réseau de l’éducation. Le futur vice-président, M. Pence, est un défenseur zélé des lois anti travailleurs-euses et proche allié de S. Walker. Il travaille déjà à l’élaboration du programme législatif de la nouvelle administration avec le Président de la chambre, Paul Ryan, un autre allié de S. Walker, et le chef de la majorité sénatoriale, Mitch McConnell qui louange les lois adoptées au Wisconsin. Le Président désigné a déjà donné des signaux importants quant à ses positions contre les travailleurs-eusses avec la nomination du PDG Andrew Puzder au poste de secrétaire au travail. Il est vigoureusement contre l’augmentation du salaire minimum.
Personne ne devrait se laisser abuser par les déclarations du Président désigné pour faire croire qu’il est l’ami des travailleurs-euses. Avec son vice-président, il a été élu sur la base d’une plateforme républicaine anti travailleurs-euses qui refuse l’augmentation du salaire minimum fédéral et déclare que les décisions à ce sujet « devraient être traitées au niveau des États et localement ». Au cours de la campagne à la présidence, le candidat Trump a défendu ces positions de plus en plus vigoureusement. Cette plateforme appuie les lois anti syndicales appelées « du droit de travailler » mises de l’avant par le gouverneur républicain Walker. Elle appelle aussi à une croisade nationale en faveur de lois portant sur « le droit de travailler ». Dans cette plateforme de 2016, on trouve également une attaque contre l’usage de la loi de protection des travailleurs-euses, le Fair Labor Standard Act. Elle appelle aussi au retrait du Project Labor Agreements qui vise à augmenter les salaires et améliorer les conditions de travail. Elle propose aussi d’en finir avec le Davis-Bacon Act vieux de 85 ans qui garantit « les conditions minimales de travail » aux travailleurs-euses des projets fédéraux.
Il doit rester encore quelques Républicains-es qui reconnaissent l’historique position de leur parti telle que le Président Abraham Lincoln la formulait : « Le travail a la priorité et est indépendant du capital. Le capital n’est que le fruit du travail et n’aurait jamais existé si le travail n’avait d’abord existé. Le travail est le supérieur du capital et mérite donc les plus hautes considérations ». Bien sûr ils et elles ne sont que quelques uns-es et ne sont pas à l’avant scène. Ce qui se passe au Kentucky nous laisse voir que, quand les Républicains-es détiennent le pouvoir à l’exécutif en même temps que dans les chambres législatives, ce qui sera le cas au pays après le 20 janvier, c’est une menace envers le monde de travail.
En juillet dernier, après que D. Trump ait eut choisi M. Pence comme colistier, le Président de l’AFL-CIO, Richard Trumka a déclaré : « Tout ce que dit Donald Trump montre qu’il veut désespérément être l’ami des travailleurs-euses. Mais, tout ce qu’il fait nous prouve qu’il est notre ennemi. Cette décision démontre qu’il ne soutient pas les familles travailleuses. Mike Pence peut être un bon choix pour D. Trump, mais c’est un mauvais choix pour les États-Unis. Ce choix prouve où se trouvent les véritables priorités de D. Trump : attaquer les droits des travailleurs-eusses et aider les PDG des entreprises à se remplir les poches ».
M. Trumka avait raison de s’inquiéter. Le monde du travail doit se préparer de toute urgence à combattre les Républicains-es qui auront le contrôle de la Maison blanche et du Congrès. Leur programme anti syndical arrive à Washington.