Le nouveau président français est un homme bien sous tous rapports : joli visage, bien mis, propre sur lui, cultivé, aimable et poli avec les dames, le gendre rêvé. Personne ne peut mettre en doute sa sincérité quand il dit qu’il ne doit rien à personne et qu’il fait ce en quoi il croit, même si son ton de voix dans ses déclarations publiques fait trop penser à un curé de petite paroisse.
Par ailleurs, ce n’est pas un hasard si les complaisants commentateurs et autres perroquets médiatiques parlent d’un nouveau logiciel politique à implanter chez les citoyenNEs. C’est bien de cela qu’il s’agit : sans aucun état d’âme remplacer le débat démocratique par la « rationalité » bourgeoise. Cette fameuse rationalité considère la planète comme un citron jamais à cours de jus et les salariéEs comme des marchandises moins importantes que les primes et les produits dérivés, et moins encore que les holdings, ces « personnes morales » auxquelles on donne tous les droits des personnes physiques, mais aucun des devoirs sinon strictement marchands.
Brel parlait de la « raison d’État qui a remplacé la raison » (dans Les Singes). Ici c’est la raison du profit qui a remplacé tout autre motif.
Cette conception mécaniciste de la pensée substitue à la nécessaire agonistique politique, totalement imprévisible parce que vivante et citoyenne, le ronron du logiciel bien rodé.
Le prince président ne peut pas se rendre compte qu’il est au service d’une caste, il est cette caste. Il ne peut pas se rendre compte qu’il est d’une brutalité ravageuse avec la population, ce n’est pas dans son logiciel. Il ne peut même pas l’apercevoir. Il a été programmé pour penser la start up nation et la précarité enthousiaste...
Cette arrogance de classe, totalement inconsciente de sa brutalité et de sa cruauté, est la véritable vulgarité, beaucoup plus vulgaire que toutes les travailleuses de la rue Saint-Denis, que chantait la Fréhel, que tous les apaches du Sébasto, que décrivait la Piaf, ou que les innombrables clodos qui hantent actuellement les rues, hagards et hébétés n’ayant plus assez de voix pour nous hurler dessus comme nous le méritons.
LAGACÉ, Francis
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