Le nœud du problème
Au début des années 1970, l’Espagne quittait ses colonies adossées au Maroc, dont le Sahara Occidental. Aussitôt, le Maroc revendique ce territoire comme étant le sien. En 1975 le pouvoir organise la marche verte grâce à laquelle des centaines de Marocains ont pénétré au-delà de la frontière commune et ainsi installé une main mise directe sur le territoire et sur sa population. Occupation qui dure toujours.
Les Nations Unies et la Cour de justice internationale l’ont déclarée illégale et demandé au Maroc de se retirer. Sans succès, au contraire. Même si, dès le retrait de l’Espagne, la République arabe démocratique du Sahraoui a été reconnue officiellement par 70 pays, et même si elle est membre à part entière de l’Union africaine.
L’ONU a reconnu le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui et a travaillé à organiser la tenue d’un référendum également sans succès jusqu’à maintenant. Une force de casques bleus, la Minurso est installée au Sahara Occidental précisément pour arriver à actualiser ce référendum.
Situation actuelle
Ce pays non encore officiel mais, qui a son gouvernement reconnu, le Front Polisario, proteste contre l’occupation marocaine et lutte pour la tenue d’un référendum sur son avenir. Une partie de sa population est réfugiée en Algérie, son seul soutien, semble-t-il dans la communauté internationale.
Le Front a mené, dans les 15 premières années de l’occupation une lutte armée contre le Maroc et a ….presque gagné ! Il avait réussi à reconquérir 85% du territoire en 1981.
Le Maroc a reconnu qu’il aurait perdu le référendum s’il avait eu lieu. Aussi a-t-il fait appel à ses alliés, les États-Unis et la France pour le soutenir sur le terrain et au Conseil de sécurité de l’ONU. Avec succès.
À l’époque, Ronald Reagan est au pouvoir et nous sommes en pleine guerre froide. Le Maroc de Mohamed 5 est tenu pour un allié efficace contre le communisme et le nationalisme arabe de gauche présent dans la région (Égypte, Syrie, Lybie etc.) C’est donc une aide massive des États-Unis dont des forces spéciales sur le terrain et le support français qui a fait tourner la situation. Le Maroc reconquiert 80% de ce territoire qu’il occupe toujours. La poursuite de ces appuis financiers, militaires et diplomatiques lui ont permis de maintenir une occupation de plus en plus dure.
Le Polisario a changé ses méthodes de lutte et est passé, après la défaite des années quatre-vingt, à la résistance pacifique par voies de manifestations, protestations, grèves, boycotts etc. qu’il a baptisé « Intifada pour l’indépendance ». Il a aussi mis l’accent sur les mauvais traitements fait au peuple et ses mauvaises conditions de vie. La répression marocaine contre ces actions n’a fait qu’augmenter au fil des années. Et singulièrement contre sa figure de proue, Aminatou Haidar.
La population sahraouie ne soutient pas complètement le projet d’indépendance défendu par le Front Polisario, mais tient absolument à pouvoir se prononcer démocratiquement sur son avenir. Le Maroc a toujours refusé cette option et ne veut de vote que sur son propre projet dit d’initiative d’autonomie, dans le cadre de sa politique de régionalisation. Le gouvernement marocain ne se cache pas pour dire qu’il demande aux négociateurs des Nations Unies de désigner un juriste international pour valider l’abandon du projet de référendum d’autodétermination, toujours exigé par le Front Polisario.
Des négociations continues se tiennent sous l’égide des Nations Unies. Une rencontre dite informelle a eu lieu le 8 et le 9 novembre dernier. Le négociateur marocain Taïeb Fassi Fihri blâmait les représentants du Front pour les lenteurs dans le processus dont ses demandes pour que la question des droits humains soient traités directement. M. Fihri qualifie cela de diversions. Idem pour ce qui concerne les ressources naturelles du territoire.
Derniers événements
C’est dans ce contexte que se sont produits les événements de la première semaine de novembre.
Des populations se sont déplacées vers El Aaiùn, métropole de ce territoire et y ont monté un campement de protestation contre leurs mauvaises conditions de vie, leur niveau de chômage et les atteintes aux droits humains qu’elles subissent. Le pouvoir a réagit en multipliant les arrestations et en empêchant les journalistes de se rendre su place. Jusqu’au 8 novembre ou les militaires donnent l’assaut à coup de canons à eau, de matraques, de grenades lacrymogènes, cocktails Molotov et autres instrument. Pas de coups de feu toutefois, mais des morts des deux côtés et un nombre important d’arrestations. Le camp est effectivement démantelé.
Beaucoup s’inquiètent de la sécurité de ce peuple et singulièrement de celle personnes arrêtées. De nombreux témoignages font état de mauvais traitements en prison allant jusqu’à jusqu’au viol. La sécurité marocaine aurait tenté de leur faire avouer des appuis directs du gouvernement algérien et d’autres sources extérieures au pays.
En avril 2009 un vote a eut lieu au conseil de sécurité des Nations-Unies pour prolonger le mandat de la MINURSO qui en ce moment ne comprend pas la protection des droits humains. Un amendement a été présenté pour y introduire cette dimension. La France s’y est opposée et a soutenu sans réserve le plan marocain d’autonomie qui bafoue le droit international quant au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.ii
Le fait que les journalistes soient interdits d’accès au terrain est très dangereux. L’armée et de la police marocaines ont toutes les possibilités d’agir et le gouvernement contrôle complètement l’information publique.
Aminatou Haidar est aussi bloquée en Espagne où elle est allée recevoir des traitements médicaux il y a maintenant plusieurs mois. Elle devait tenter une rentrée à El Aaiùn récemment mais s’attendait à être refoulée à la frontière.
Les SahraouiEs ne comptent plus maintenant que sur des appuis populaires dans le monde. Il semble bien que toutes les autres avenues soient bloquées. Le professeur Zunes fait une analogie entre la situation de ce peuple et celle du Timor occidental. Seuls les appuis extérieurs ont permis la réalisation de son indépendance.