Ces textes « confirment les menaces sur la santé, l’environnement et le climat » juge Jorgo Riss, directeur de Greenpeace EU, car « ce traité mettrait les intérêts des grandes entreprises au centre du processus de décision politique et législatif au détriment de l’environnement et de la santé publique ».
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Les documents que Greenpeace publie représentent environ la moitié du projet de Traité, en son état d’avril 2016. Le texte final devrait comprendre 25 à 30 chapitres ainsi que de nombreuses et volumineuses annexes. Pour autant qu’on puisse le savoir, 17 chapitres sont déjà consolidés, et 13 de ces chapitres consolidés ont fuité, soit les 2/3 de ces textes, qui présentent côte à côte, les positions de l’UE et des États-Unis, telles qu’elles étaient avant le début du 13e cycle de négociations entre l’UE et les États-Unis.
Cette étape dans le processus de négociation permet de voir les domaines où l’UE et les États-Unis sont proches d’un accord, et ceux où des compromis et des concessions seraient encore nécessaires.
Greenpeace a travaillé sur les textes fuités avec le réseau d’investigation NDR, WDR et Süddeutsche Zeitung, un partenariat de médias allemands qui ont couvert, entre autres, les fuites Snowden et l’affaire Volkswagen.
« Il est temps de montrer ces négociations secrètes pour ce qu’elles sont. Les progrès environnementaux chèrement acquis sont bradés derrière des portes closes. Ces documents révèlent que la société civile avait raison d’être préoccupée par le TTIP. Il faut arrêter les négociations et commencer le débat », a déclaré Faiza Oulahsen, militante de Greenpeace Pays-Bas
Quatre principaux sujets de préoccupation
– La protection à long terme de l’environnement est abandonnée
La règle "Exceptions générales", inscrite dans l’accord du GATT de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) depuis plus de 70 ans, est absente du texte. Cette règle permet aux pays d’encadrer le commerce « pour protéger la vie animale et végétale, la santé humaine et la conservation des ressources naturelles épuisables » [La plupart des accords de l’OMC sont le résultat de l’Uruguay Round, négociations commerciales de 1986-1994. D’autres accords, comme le GATT de 1994, n’étaient que des révisions de textes qui existaient auparavant (https://www.wto.org/english/docs_e/legal_e/gatt47_02_e.htm#articleXX)
– Aucune place pour la protection du climat dans le TTIP
Rien sur la protection du climat ne peut être trouvé dans les textes obtenus. Pourtant, si les objectifs de la COP21 (moins de 1,5°C de réchauffement) doivent être respectés, le commerce doit être soumis aux spécifications de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pire encore, le champ d’application des mesures d’atténuation est limité par les dispositions des chapitres sur la coopération réglementaire ou l’accès aux marchés pour les produits industriels. À titre d’exemple, ces propositions excluent qu’on puisse réglementer l’importation des combustibles à forte intensité de CO2 tels que le pétrole de sables bitumineux.
– Le principe de précaution est oublié
Le principe de précaution, inscrit dans le traité de l’Union européenne (http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=URISERV%3Al32042), n’est pas mentionné dans le chapitre sur la Coopération réglementaire, ni dans aucun autre des 12 chapitres fuités. La demande américaine pour une approche « fondée sur le risque », et qui vise à gérer les substances dangereuses plutôt que de les éviter, est inclue dans différents chapitres. Cette approche sape la capacité des régulateurs à prendre des mesures préventives, par exemple en ce qui concerne les substances controversées comme les perturbateurs endocriniens.
– Porte ouverte au lobbying des entreprises
Alors que les propositions menacent la protection de l’environnement et des consommateurs, les grandes entreprises obtiennent, elles, ce qu’elles veulent : la possibilité de participer à la prise de décision et d’intervenir dès les premières étapes du processus de prise de décision.
Exiger la transparence et ouvrir le débat
Alors que la société civile a eu très peu d’accès aux négociations, les documents montrent que l’industrie a bénéficié d’un regard privilégié sur les décisions importantes, et que l’UE n’a pas été franche sur l’influence importante octroyée à l’industrie. Le rapport récemment rendu public par l’Union européenne (http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2016/march/tradoc_154391.pdf) ne mentionne en effet l’industrie qu’une seule fois, tandis que les documents divulgués parlent à plusieurs reprises de la nécessité de poursuivre les consultations avec l’industrie et mentionnent explicitement comment le point de vue de l’industrie a été entendu.
Par son volume de textes, cette fuite donne, pour la première fois, aux citoyens européens et américains, la possibilité de comparer les positions de négociation de l’UE et des États-Unis.
Jusqu’à maintenant les représentants élus ne pouvaient consulter ces documents que sous bonne garde, dans une salle sécurisée, avec interdiction de les copier et sans avoir accès à des consultations d’experts. Il leur était même interdit d’en discuter avec quelqu’un d’autre.
En publiant ces documents Greenpeace donne aux millions de citoyens concernés, la possibilité de contrôler l’action de l’UE et celle de leur gouvernement, et d’en discuter avec leurs représentants élus.
Pour Jorgo Riss, « les effets du TTIP deviendraient rapidement dévastateurs, car les lois européennes seraient conçues en vue de leurs conséquences pour le commerce et l’investissement, sans tenir compte de la protection des citoyens et de l’environnement ».
Source : Greenpeace