L’Association pétrolière et gazière du Québec fait des pieds et des mains afin d’amadouer la population. Questerre, une des plus importantes entreprises dans ce domaine, n’en finit plus de débaucher d’ex-ministres ou directeurs de cabinet, libéraux et péquistes, de façon à constituer une brochette de personnalités qui, croit-on, feront revenir le peuple à de meilleurs sentiments envers une ressources qu’ils prétendent propre et avantageuse économiquement pour le Québec.
Que des libéraux que l’on sait inféodés à l’industrie des énergies fossiles se déclarent disponibles pour ce genre de mandat, on ne peut être surpris. Que de prétendus tenants de l’indépendance du Québec en soient, il y a là matière à s’interroger. Pourtant, à y regarder de plus près, en examinant le parcours de ces personnes, l’étonnement laisse place à la colère contre le double langage de ces supposés défenseurs du Québec. N’est-ce pas le PQ au pouvoir qui a multiplié les avantages et congés fiscaux pour favoriser l’exploration pétrolière et gazière ? N’est-ce pas Pauline Marois qui défendait bec et ongles dans les pages du journal Les Affaires une politique d’exploitation conjointe de la filière des énergies fossiles ? Or, que fait l’ex-ministre de l’environnement qui se targue d’être à l’origine de la politique québécoise de la qualité de l’eau ?
Dans une lettre publié sur Cyberpresse (http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/opinions/points-de-vue/201109/19/01-4449181-lenergie-de-chez-nous-oui-au-codeveloppement-du-gaz-de-shale.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B13b_points-de-vue_794_section_POS2), le nouveau porte-parole de l’industrie en général et de Questerre en particulier, nous brosse un tableau tout ce qu’il y a de plus rose. Il félicite la population d’avoir ralenti un gouvernement et une industrie qui agit dans la précipitation.
Mais il n’en conclut pas que l’on doit mettre fin à cette industrie selon la volonté populaire. Il opte plutôt pour l’approche douce : après avoir fait mea culpa pour l’industrie, il revient à la charge en prétendant que l’industrie s’est réformée, à preuve, elle accepte de publier la composition des eaux de fracturation et de révéler les produits chimiques utilisés dans ces opérations. Et d’ajouter qu’une “grande majorité de ceux qui ont réclamé un moratoire n’ont pas fermé la porte à l’industrie. Ils réclament plutôt avec véhémence un encadrement juridique clair, apte à protéger la qualité de leur environnement.”
Il affirme tout comme les tenants de cette filière énergétique que le gaz de schiste possède une empreinte écologique plus faible que d’autres ressources. Il souhaite également que l’État québécois exploite conjointement avec l’industrie le gaz de schiste, nous gratifiant au passage de chiffres faramineux que créerait une telle industrie, de 5 000 à 19 000 emplois selon lui. Il conclut en banalisant les risques relatifs au forage, mentionnant “qu’il se creuse des milliers de puits par année au Canada et, qu’à ce jour, les prophètes de malheur ont été confondus.”
Il s’agit là d’une façon détournée de remettre en selle une industrie dont la légitimité est fortement mise en cause. La révélation de la composition des eaux de fracturation ne règle pas grand chose lorsque le danger vient plus largement de contamination des nappes phréatiques et de l’ignorance de la géographie du sous-sol québécois. Il s’égare également lorsqu’il aborde la question de la création d’emplois puisque les experts interrogés récemment sur la question croient que le Québec ne possède pas une main d’oeuvre spécialisée suffisante dans ce domaine et que les retombées risquent de ne pas être au rendez-vous. Le Cegep de Thetford-Mines tente de mettre sur pied une formation dans le domaine de l’exploitation des énergies fossiles mais de l’aveu de son directeur, rien ne peut démarrer avant 1-2 ans.
Il prétend qu’une grande majorité de QuébecoisEs est en faveur de l’exploitation (conjointe ???) des énergies fossiles. On se demande où il prend les informations permettant d’affirmer ce genre de choses. Par ailleurs, rien dans sa lettre ne laisse entrevoir que l’auteur a comparé l’empreinte écologique des énergies fossiles aux avantages du développement d’une filière d’énergies propres et renouvelables.
Pour un porte-parole d’une industrie des énergies fossiles, c’est évidemment l’omerta sur le sujet. Quant à la création d’emplois, est-ce que les 5 000 à 19 000 prétendus emplois peuvent tenir la route lorsque l’on compare le potentiel de développement économique que représente un véritable virage vers la création d’une filière québécoise d’énergies propres et renouvelables (recherche et développement, production, distribution, etc.).
Enfin, comme toutes les interventions favorables à l’industrie, il passe sous silence les retombées négatives de l’industrie : investissement pour construire ou mettre à niveau les voies de transport, augmentation du trafic routier, puits qui fuient, dégradation de la valeurs des maisons situées à proximité, investissement pour mettre à niveau les système de traitement des eaux.
Bref, les coûts liés à la présence de cette industrie. Lorsque l’on fait les comptes et évalue les risques pour l’environnement, il est de plus en plus évident que l’avenir réside dans le développement d’une filière québécoise d’énergies propres. Qu’un débauché par l’industrie prétende le contraire ou tente de passer sous silence ces enjeux ne nous étonne pas. Le parcours de cet ex-chef d’une formation prétendument souverainiste devrait nous faire réfléchir la population sur le genre de société que souhaite le PQ.