Y a-t-il une différence entre une convention collective négociée et un arbitrage ? Le moment est bien indiqué selon nous pour effectuer une petite clarification conceptuelle dans le champ des relations de travail. Quatre mots ou expressions à préciser ici : « convention collective négociée », « médiation », « conciliation » et « arbitrage ».
Convention collective négociée : il s’agit d’une entente intervenue lors d’un face-à-face entre deux parties négociantes, en l’occurrence ici l’employeur et le syndicat. Cette entente correspond à un accord survenu entre deux parties dans le cadre d’une négociation.
Médiation : Processus dans lequel un tiers s’entremet entre les parties opposées dans un conflit en vue des rapprocher et dans certains cas de suggérer diverses propositions en vue de permettre la conclusion d’une entente. Dans les relations de travail, il s’agit d’un processus volontaire et non obligatoire (sauf dans les secteurs public et parapublic).
Conciliation : Procédure impliquant l’intervention d’un tiers qui n’a aucun pouvoir coercitif pour rapprocher les parties dans un conflit. La conciliation vise à faciliter le dialogue entre les parties pour les aider à se mettre d’accord. Elle peut être volontaire ou obligatoire.
Médiateur-conciliateur : voir la définition plus bas.
Arbitrage : Procédure consistant à remettre à un tiers la solution du règlement d’un conflit. Le résultat est exécutoire et souvent à l’avantage de l’employeur.
Selon que vous vous retrouvez dans la position de l’employeur, qui dans le cas qui nous intéresse ici semble avoir de grandes réticences à négocier avec le syndicat, vous êtes susceptible de préférer le recours à l’arbitrage.
Selon que vous vous retrouvez dans la position du syndicat, vous allez nettement privilégier la voie menant à une convention collective négociée même si vous avez devant vous un employeur buté et borné.
L’arbitrage : un processus objectif ?
Le ministre Boulet a suggéré que la nomination d’une ou d’un arbitre aurait pour effet de remettre entre les mains d’une ou d’un tiers « objectif » le dénouement du conflit.
Qu’on nous permette la remarque suivante : s’il est un champ de la pratique sociale qui n’a rien d’objectif, c’est bien celui des relations de travail. Deux forces antagoniques s’y affrontent : les propriétaires des moyens de production d’une part et la force de travail de l’autre. Un exploiteur d’un côté et des exploitéEs de l’autre. En règle générale, les ministres ont une nette préférence à défendre les intérêts des détenteurs des moyens de production.
Dans le présent conflit, il est à remarquer que le premier ministre Legault et ses deux acolytes de son conseil des ministres (Boulet et Lamontagne) ne disent rien sur les stratégies ou les pratiques de l’employeur. Ce trio ministériel met de la pression uniquement sur les épaules du syndicat à qui ils demandent de renoncer au processus de médiation-conciliation et d’aller en arbitrage. Nous y voyons là-dedans une prise de position en faveur de l’employeur.
Les conditions de travail dans l’industrie de l’abattage de poulet (et autres animaux) sont particulièrement difficiles à supporter pour les salariéEs et il s’agit en plus d’une industrie qui n’a pas été épargnée lors de la présente pandémie. Le premier ministre rêve d’en faire un service essentiel, pourquoi ? Pour sauver des poulets ? Améliorer les conditions de travail des salariéEs ? ou tout simplement éliminer le droit de grève ? Je vous laisse méditer là-dessus.
Yvan Perrier
19 juin 2021
11h
yvan_perrier@hotmail.com
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1801991/ministre-andre-lamontagne-agriculture-greve-exceldor-arbitrage. Consulté le 19 juin 2021.
Ajout
22 juin 2021
20h
« Qui sont les médiateurs-conciliateurs ? »
« Les médiateurs-conciliateurs du Secrétariat du travail sont des spécialistes expérimentés qui ont une connaissance approfondie des relations du travail et qui sont rompus aux techniques de négociation et de résolution de problèmes. »
[…]
« Même si la conciliation n’est demandée que par une seule partie, le médiateur-conciliateur n’intervient pas au « profit » de la seule demanderesse. Il recherche l’adhésion de l’ensemble des personnes prenant part au processus de conciliation. »
Source :
https://www.travail.gouv.qc.ca/relations-du-travail/qui-sont-les-mediateurs-conciliateurs/ . Consulté le 22 juin 2021.
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