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Europe

En Grande-Bretagne, l’écart se réduit entre le Parti travailliste de Jeremy Corbyn et les Conservateurs de Mme Theresa May

Juste avant les élections générales de la semaine prochaine en Grande-Bretagne, les sondages font état d’un resserrement important entre les deux principaux partis. Le chef des Travaillistes, Jeremy Corbyn, se moque de sa rivale qui, récemment, a connu quelques piètres performances et refusé de participer au débat télévisé de mercredi soir dernier, le 24 mai : « Au débat de ce soir, je vais livrer notre vision de la Grande-Bretagne à la population. Est-ce que Theresa May viendra défendre son bilan en faveur du petit nombre » ?

Robert Mackey, The Intercept, 31 mai 2017
Traduction : Alexandra Cyr

Il avait lui-même songé à ne pas participer à ce débat en l’absence de la Première ministre conservatrice, mais, encouragé par les nouveaux sondages qui démontrent que son Parti s’approche sérieusement des Conservateurs et rassuré par sa performance à une forum télévisé plus tôt dans la semaine, il a changé d’idée et talonné Mme May pour qu’elle en fasse autant : « Theresa May, venez débattre avec moi. N’importe où, n’importe quand. La Grande-Bretagne mérite d’entendre les deux seules personnes qui pourraient devenir Premier-ère Ministre ».

Comme il l’a noté, la Première Ministre a accepté de participer à un rassemblement local télévisé sur Channel 4 News and Sky lundi (22 mai), mais à la seule condition que son opposant travailliste ne soit pas en même temps qu’elle sur le plateau. Quand on lui a demandé pourquoi elle avait demandé au Secrétaire à l’intérieur, M. Amber Rudd, de la remplacer dans le débat auquel assistaient M. Corbyn et les chefs des autres partis politiques, elle a ri nerveusement comme elle le fait toujours quand elle est coincée. Elle a ensuite déclaré que ce débat était de peu d’importance comparé au travail sérieux de préparation des négociations avec l’Union européenne sur la sortie de la Grande-Bretagne de cette organisation. Cette réponse a vite été reprise dans les arguments de M. Corbyn : « La Grande-Bretagne mérite de voir un débat entre les deux candidats qui peuvent devenir Premier-ère ministre. Refuser de participer au débat de ce soir, est une manifestation de faiblesse ».

La décision de Mme May d’éviter le débat en question peut se comprendre par le fait qu’elle a été dépassée lors du rassemblement local télévisé ; certaines personnes de l’auditoire ont ri d’elle ouvertement. C’est un virage remarquable par rapport au « style présidentiel » que son équipe de campagne lui avait préparé. Son avance dans la course au poste de Première ministre par rapport à Jeremy Corbyn devait être son atout principal.

Les sondages continuent de la mettre en tête dans les intentions de vote au plan national, même si c’est parfois par un mince 3 points comme récemment. Le Parlement britannique n’est pas formé sur cette base, mais bien sur celle des 650 sièges mis en jeu. Les résultats peuvent être bien différents du partage des voix entre les Partis dominants.

Une nouvelle analyse siège par siège, publiée mardi (23 mai) par la compagnie de sondages YouGov, démontre que Mme May a joué gros en déclenchant ces élections hâtives et qu’elle pourrait en subir de dures conséquences. Son Parti resterait le plus important dans le prochain parlement, mais il aurait perdu 20 sièges et sa majorité. Il serait donc incapable de former un gouvernement sans alliance. (cf. Sam Coates, Times, 30 mai 2017. N.d.t.).

Un tel résultat produirait une assemblée parlementaire où aucun parti n’aurait la majorité et ne pourrait donc former un gouvernement par lui-même. Il leur faudrait négocier entre eux et former une quelconque coalition comme celle entre les Conservateurs et les Libéraux démocrates qui a gouverné entre 2010 et 2015. Toutefois, alors que les Libéraux démocrates sont encore occupés à réparer les dommages causés par cette coalition et qu’ils sont horrifiés par les plans conservateurs pour le Brexit, une reprise d’une coalition entre ces deux partis est moins que probable. Un examen précis de la distribution des sièges, à partir de la médiane donnée par les projections du sondage Yougov, montre qu’il est plausible qu’aucun des partis ne remporte la majorité, rendant ainsi une nouvelle élection nécessaire.

Le chaos qui suivrait une telle perspective serait sans doute fatal à Mme May, elle qui avait une majorité confortable et qui aurait pu diriger le pays jusqu’en 2020, après la conclusion des négociations du Brexit. Elle s’est laissé gagner par l’idée d’une élection anticipée, croyant comme beaucoup de personnes que le Parti travailliste était si faible sous la direction de J. Corbyn que les Conservateurs l’emporteraient inévitablement et même par un balayage complet. Le chef exécutif de YouGov, M. Stéphan Shakespeare, est d’accord avec cette analyse qui indique qu’un parlement sans gagnant est possible. Il y a aussi suffisamment de marge de manœuvre pour que les Conservateurs puissent malgré tout récolter 345 sièges, donnant ainsi à Mme May l’augmentation de majorité qu’elle recherche.

(…) Un des conseillers de Mme May, Jim Messina, directeur de la campagne de B. Obama en 2012, a ridiculisé ces chiffres.

Les sondages suggèrent que M. Corbyn n’a pas la base électorale suffisante pour donner une majorité de sièges aux Travaillistes, mais, sous l’effet de sa plateforme progressiste, contrairement à celles de ses prédécesseurs centristes, sa popularité est telle chez les jeunes électeurs-trices à l’esprit créatif que Mme May pourrait bien être privée de la majorité qu’elle attendait comme résultat de sa campagne. (…)

Comme le souligne Nate Silver, s’il y a tant de variations avancées par les sondeurs britanniques, c’est que leurs modèles sont en désaccord avec ce que l’électorat voudrait. Si, comme dans les élections précédentes, les plus âgés-es votent en plus grand nombre que les plus jeunes, les Conservateurs pourraient encore gagner une majorité confortable.

Les données de HuffPost placent les Conservateurs en tête, mais seulement avec 3 points d’avance ; ces résultats sont très différents de d’autres sondages qui donnent 12 % d’avance aux Conservateurs quand, se basant sur les résultats de la dernière élection, la pondération du taux de participation par tranches d’âge est prise en compte. (Matt Monk, 30 mai 2017).

Il n’est pas impossible que l’enthousiasme envers J. Corbyn, comme le soulignent ses partisans-es, suscite une forte participation des jeunes en sa faveur ; il se peut que rien ne soit joué avant jeudi (8 juin).

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