On n’a pas retenu la leçon de l’épisode Muguette Paillé du débat fédéral de 2011 (voir mon billet La pipolisation aplatit tout), cette pauvre dame qui avait posé une bonne question, mais qui s’est trouvée satisfaite qu’on règle son cas personnel plutôt que de s’attaquer à la cause. Au contraire, on a fait de cette erreur monumentale la règle de ce « débat », qui n’en fut pas un.
Ces personnes qu’on a appelées pour soumettre leur question aux représentantEs politiques sont bien gentilles, ce n’est pas leur faute. Mais, la politique, ce sont les affaires de la polis, la cité, c’est-à-dire les règles du bien commun et du vivre-ensemble pas l’art de régler ses problèmes personnels. À part monsieur Dung Lê, qui a su élargir sa situation à l’ensemble des immigrants pour poser une question de nature générale, toutes les autres personnes n’ont été que des clones de Muguette Paillé, dont on sait de quel bois elle se chauffait.
Les participantEs au débat étaient donc prisEs dans un piège. Soit on répondait à la question en donnant une leçon de politique, ce qui nous faisait passer pour un pédant, soit on essayait de démêler en un temps record (45 secondes) le général et le particulier, ce qui menait à la confusion, confusion dont on espérait peut-être qu’elle donne un bon show. Dans tous les cas, la personne représentant le public n’y trouvait pas son compte, trompée par les réseaux de télé qui ne finissaient pas l’émission avec la brassée de cadeaux attendus dans ce genre de mise en scène pseudo glamour.
Difficile de trouver plus mauvais animateur pour cette véritable épreuve que les téléspectatrices et téléspectateurs ont subie que Patrice Roy, dont la sinuosité et la superficialité sont sans égales de ce côté-ci de la galaxie. Fidèle à lui-même, la vedette radio-canadienne a ramené sans cesse les orateurs et l’oratrice aux aspects anecdotiques des questions dès qu’on semblait s’approcher du fond de l’affaire et de ses causes systémiques.
Le grand gagnant de la joute : François Legault qui a réussi à déstabiliser Philippe Couillard et qui a su ignorer les allusions qui le mettaient en cause. Mais veut-on d’un premier ministre qui pratique l’art de l’esquive ?
En deuxième place : Jean-François Lisée grâce à son habileté rhétorique supérieure. Mais veut-on d’un émule de Machiavel comme premier ministre ?
Grande perdante de l’expérience : la population québécoise qui n’a rien appris, sauf ce qu’elle savait déjà, et qui s’est fait passer un mauvais show, oublié aussitôt terminé.
LAGACÉ, Francis
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