Édition du 25 février 2025

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Brésil : Élections 2026

Faria Lima mise sur les évangéliques pour battre Lula : vote conservateur et de droite

L’étude qui a mis les financiers en émoi a été réalisée par un gestionnaire de fonds qui compte parmi ses partenaires un membre du conseil d’administration d’Equatorial, le groupe qui a racheté Sabesp* lors de la privatisation douteuse menée par Tarcísio.

Faria Lima aposta em evangélicos para derrotar Lula : voto conservador e à direita | Revista Fórum

18 février 2025

Tout en alimentant le jeu spéculatif sur le marché, banquiers et cadres du système financier parient sur le fait que l’électorat évangélique battra Lula et portera au pouvoir un gouvernement de droite - excluant totalement l’usé Jair Bolsonaro (PL) - en 2026.

Ce pronostic, qui a fait bondir Faria Lima (l’équivalent de "Wall Street" pour le Brésil), a été émis par le gestionnaire de fonds Mar Asset, dirigé par Bruno Coutinho (ex-BTG Pacutal, propriété de Paulo Guedes, Ministre de l’économie de Bolsonaro.), Philippe Perdigão (ex-Oportunitty, propriété de Daniel Dantas) et Luis Moura (ex-3G Capital, propriété du groupe Lemman).

« Notre perception repose sur deux piliers. Nous voyons une inflexion cyclique de l’économie, résultat d’un cycle économique épuisé et la perspective d’une détérioration dans les années à venir. En même temps, nous identifions un changement structurel dans la société brésilienne, marqué par la croissance de la population évangélique, qui a influencé un changement dans le profil du vote moyen vers le conservatisme et a déplacé le pendule politique brésilien vers la droite », indique l’analyse.

Ensuite, les financiers admettent que, sous Lula, « la croissance du PIB a surpris les marchés de manière significative, le chômage a atteint des niveaux historiquement bas et l’inflation s’est maintenue à un niveau historiquement bas ».

« Le tableau de la fin 2024, bien résumé par le fameux indice de misère - qui est la somme de l’inflation et du taux de chômage - aux niveaux les plus bas de notre histoire, reflète exactement ce que le gouvernement a voulu réaliser », ajoute-t-il, soulignant toutefois que le problème est structurel »puisque, bien que l’indice de misère soit au niveau le plus bas de son histoire, son effet positif sur la popularité présidentielle a été décevant. »

Coopté par l’ultra-droite

Le problème « structurel » évoqué par les financiers est précisément le créneau électoral évangélique.

Une étude Latam Pulse, réalisée en partenariat avec Atlas et Bloomberg et publiée la semaine dernière, révèle que la chute du taux d’approbation de Lula est directement liée au rejet de l’électorat évangélique, qui a été coopté par l’ultra-droite et désapprouve actuellement à 80,1 % le travail du président, selon l’étude.

« Nous pensons que l’idée évangélique qui représente le mieux le moment social du Brésil est la Théologie de la Prospérité. Elle associe la foi en Dieu à la réussite matérielle, à la santé et au bien-être physique et émotionnel. Cette idée souligne que le succès professionnel fait partie du voyage spirituel et que sa progression est une bénédiction de Dieu pour le bon croyant, ce qui affaiblit le lien entre l’amélioration de la vie personnelle et le gouvernement actuel », indique l’analyse de Mar Asset.

Dans la pratique, cette thèse est illustrée par l’alliance entre Pablo Marçal (PRTB) et sa méritocratie de « coaching » avec l’électorat évangélique et la théologie de la prospérité. L’« ex-entraîneur » a mené une grande partie de la course à la mairie de São Paulo parmi les évangéliques et n’a perdu son soutien qu’après l’entrée en lice de Silas Malafaia, qui a dirigé un bataillon de pasteurs pour faire passer les votes à Ricardo Nunes (MDB).

Dans son étude, Mar Asset montre une détérioration du vote évangélique à gauche, tant au niveau municipal qu’aux élections présidentielles, en particulier depuis 2014, lorsque Dilma Rousseff (PT) a battu Aécio Neves (PSDB) « avec environ 55 % du vote non évangélique et 50 % du vote évangélique ».

« Lors des élections présidentielles de 2018, qui ont vu la victoire de Bolsonaro, le PT, par l’intermédiaire de Fernando Haddad, a obtenu encore plus de voix parmi les non-évangéliques, mais seulement 31 % des voix parmi les évangéliques. Lors des élections de 2022, qui ont scellé la victoire de Lula avec la plus petite marge de notre histoire, la conversion de l’électorat évangélique au candidat du PT s’est maintenue aux mêmes 31 % obtenus par Fernando Haddad en 2018. Cependant, parmi les non-évangéliques, Lula a obtenu un impressionnant 60 % des voix, ce qui a été décisif pour garantir sa courte victoire », indique le texte.

« Les élections présidentielles de 2022 ont été marquées par un fort rejet du président Bolsonaro. Malgré cela, nous avons vu l’inclinaison à droite de l’électorat s’exprimer lors des élections des gouverneurs et des mandats législatifs tels que les députés fédéraux et les députés d’État. Les récentes élections municipales de 2024 ont approfondi le mouvement de droite observé depuis 2016, indiquant une fois de plus la tendance à la victoire d’un candidat présidentiel conservateur en 2026 », ajoute-t-il.

Dans leur analyse, les économistes affirment que « le meilleur moment économique du mandat actuel est passé » et que le facteur évangélique pèsera en faveur de la droite dans le balancier électoral en 2026.

« En résumé, la situation économique est un facteur de difficulté important pour les perspectives politiques du gouvernement actuel. Parallèlement, la croissance forte et continue de la population évangélique produit un mouvement structurel de droite dans la société brésilienne. Il s’agit de deux vecteurs puissants qui convergent dans la même direction politique : une plus grande difficulté pour une candidature du PT en 2026 », affirment les financiers.

« Cette combinaison, à notre avis, rend la probabilité de la réélection du président Lula minoritaire, ce qui devrait être anticipé par les marchés à un moment donné en 2025 », dit le texte, appelant à la guerre des banquiers contre Lula dès 2025.

Enfin, les FariaLimer signalent que les paris sur Tarcísio sont ouverts, étant donné qu’ils ont déjà mis Bolsonaro sur la touche et qu’ils veulent « saigner » Lula plus tard cette année.

« Dans le scénario idéal, l’anticipation d’une amélioration passerait par l’indication que ni Lula ni Bolsonaro ne participeraient aux prochaines élections. Un renouvellement générationnel en politique, avec des candidats plus modérés des deux côtés du spectre, aurait un énorme potentiel pour l’évolution institutionnelle du pays », conclut l’étude.

*NDLR : La Sabesp est la compagnie privée à laquelle le gouverneur de l’État de Sao Paulo, le bolsonariste Tarcisio Gomes de Freitas, a confié le traitement des eaux de l’État. Depuis, les tarifs ont monté et le service a diminué, ce qui a eu des conséquences désastreuses à plusieurs occasions.

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