Le « budget carbone » encore disponible si l’on veut limiter le réchauffement à 2°C est de 1000 Gigatonnes de CO2. Les réserves fossiles prouvées représentent 2800 Gt. Plus du quart appartient aux multinationales. Les investisseurs misent sur le fait qu’elles seront exploitées, et le cours des actions est fonction du taux de remplacement des réserves : au-dessus de 100%, il augmente, au-dessous, il diminue. Conclusion : alors qu’il faudrait fermer le robinet, la concurrence contraint chaque compagnie à chercher sans arrêt de nouvelles réserves.
Selon l’ONG Carbon Tracker, plus de mille milliards de dollars sont engagés dans des projets fossiles … qui ne rapporteront pas un sou si les gouvernements de la planète devaient respecter leurs engagements climatiques. La capitalisation boursière des 200 plus grandes sociétés fossiles est de 4000 milliards de dollars. La moitié est menacée de dévalorisation, selon HSBC Global Research.
La menace d’une dépression gravissime causée par l’éclatement de la « bulle carbone » est de plus en plus agitée. Dans quatre directions au moins :
– pour semer le doute sur le degré d’urgence de la transition énergétique,
– pour convaincre que la capture-séquestration du CO2 est sans danger,
– pour lever les entraves à l’exploitation du gaz de schiste,
– et… pour amener les gouvernements à imaginer une « solution » analogue à celle des « bad banks » créées pour que la collectivité essuie les plâtres de la crise des « subprimes ».
D’une bulle à l’autre, la logique des 1% reste la même : nous ne paierons pas les frais de notre gabegie. Le capital prend pour ainsi dire la planète et l’emploi en otage pour imposer sa loi. Les politiques obéissent, le petit doigt sur la couture du pantalon. C’est peu dire qu’une alternative écosocialiste est nécessaire : elle est vitale.
Rubrique « En vert et rouge contre tout », à paraître dans Politique, mai-juin 2015