Les hauts cadres, dont la PDG du CIUSSS de l’Estrie-CHUS, Patricia Gauthier, qui gagne 300 000$ par année, se retrouvant parmi les dix haut·e·s fonctionnaires de l’État les mieux payé·e·s2, se plaignent de la rétention du personnel et affirment que tous les efforts sont faits. Ce qui n’est pas mentionné ce sont les raisons. Comme le mentionne le rapport du Protecteur du citoyen, « (…) le cercle vicieux dû au manque de personnel augmente la pression sur les équipes de travail, crée de l’essoufflement se traduisant en absentéisme pour des raisons de santé, ce qui, en retour, aggrave davantage le manque de personnel.
Une employée rencontrée a traduit cette situation de façon éloquente en affirmant : le préposé aux bénéficiaires ayant travaillé une journée à -1 et qui se fait imposer du temps supplémentaire est le prochain candidat pour un arrêt maladie. »3 Ce sont surtout des travailleuses qui œuvrent dans les secteur de la santé et des services sociaux. Il n’y a pas si longtemps, il s’agissait d’un secteur privé, basé sur du travail féminin non rémunéré, ce qui contribue à une sous-valorisation créée par le capitalisme.
Posons un diagnostic : nous savons que la situation n’est pas réduite à Argyll, mais à l’ensemble des CHSLD du Québec, avec des variantes en intensité. Pas de bains pendant trois semaines, être cloué·e au lit pendant 36 heures, absence de surveillance et de suivi avec des cas plus lourds qui a causé des accidents mortels, équipes de travail épuisées et en détresse psychologique, obligées de faire du temps supplémentaire, etc. Voilà le rapport à la vie que – non seulement le régime libéral Barrette, mais tout le système capitaliste – nous met en pleine face.
Comme avec les générations suivantes, notamment en question d’environnement, le système capitaliste se fout de celles qui précèdent et des personnes vulnérables à moins qu’elles aient assez de cash pour se payer du personnel privé, et ces personnes sont très minoritaires. Il s’agit d’un système sous-développé côté social et malade chronique dans ses finalités, et ce n’est pas à cause du manque de richesses produites. Que veulent dire des marchandises abondantes et du divertissement à souhait, pourvu qu’on ait les moyens ou qu’on s’endette, quand nous ne pouvons recevoir des soins de base pour nos dernières années de vie ? Que, malgré notre volonté et notre dévouement en travaillant au service de la population, on se retrouve dans des conditions qui nous rendent nous-mêmes malades ?
Pourtant, on a les moyens de produire et de répartir les richesses pour répondre aux besoins de la majorité et pas pour enrichir une minorité possédante avide sans fin. Nous en avons assez de voir les secteurs économiques lucratifs à forte valeur ajoutée être sous le contrôle du privé et subventionnés en plus (multinationales, industries minières, énergétiques, industrielles, commerces, banques, assurances), tandis que les secteurs jugés à perte (éducation et santé publique, services sociaux, transport collectif) sont gérés par l’État avec des moyens indignes d’une société aussi riche.
Et qu’on ne dise pas, comme un certain Jean-François Lisée en août 2017, que l’argent pour accueillir les personnes migrantes pourrait servir à soigner « nos » gens en CHSLD. Huit hommes contrôlent la moitié des richesses mondiales et nous allons viser ces responsables et leurs allié·e·s, et pour cela, il faut du courage politique, pas une politique dangereusement xénophobe qui tape sur d’autres personnes vulnérables au lieu de faire front commun avec elles.
Deux moyens possibles et nécessaires s’offrent à nous pour lutter pour nos conditions de travail et plus largement pour nos conditions de vie, en visant à remplacer le système capitaliste actuel par un système socialiste démocratique, seule voie pour résoudre en profondeur la situation :
1.En s’impliquant dans nos syndicats et en créant des comités intersyndicaux, peu importent les catégories d’emploi et les affiliations durement malmenées par le maraudage voulu par Barrette. Ces comités intersyndicaux peuvent créer des liens avec les familles des bénéficiaires et les bénévoles au cœur des problèmes vécus ainsi qu’avec d’autres syndicats présents dans le privé et rendant des soins comme dans les Résidences Soleil de Savoie. Nous défendons des syndicats démocratiques et combatifs pour défendre la majorité laborieuse et pour prendre position politiquement ;
2.En s’organisant politiquement pour former notre parti des travailleurs et des travailleuses, contrôlé et redevable à eux et à elles, pas aux compagnies d’assurances privées, aux banques, aux pharmaceutiques ou aux médecins spécialistes.
QS a appelé avec sa candidate Christine Labrie à prendre la rue le 2 juin à Sherbrooke4 pour dénoncer la situation, en visant le député et ministre libéral Luc Fortin. L’APTS et le SCFP ont joint la marche ainsi que des citoyen·ne·s touché·e·s par la dignité de nos aîné·e·s. Comme la manifestation pour mettre Barrette dehors ce printemps à Montréal, il s’agit d’un pas en avant afin que QS soit un parti en mouvement dans la rue et pas seulement un parti électoral. La construction de notre parti passe entre autres par l’établissement des liens avec QS afin de contrecarrer les autres partis dominants, totalement soumis aux intérêts de la classe dominante et clarifier dans le processus qui dans QS aura à cœur de lutter pour un changement de système en profondeur, pas juste pour un changement de gouvernement en surface.
William G.
Notes
1 La Tribune, Le CHSLD Argyll reçoit un rapport accablant du Protecteur du citoyen, 26 mai 2018.
2 La Tribune, Patricia Gauthier parmi les cadres gouvernementaux les mieux payés, 9 avril 2018.
3 Rapport d’intervention à l’Hôpital et CHSLD Argyll, 12 avril 2018.
4 La Tribune, CHSLD : QS accuse de nouveau les libéraux, 2 juin 2018.
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