Édition du 17 décembre 2024

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Asie/Proche-Orient

Carnet de Santiago Bertolino - En route vers Gaza

Presse-toi à gauche reproduit le journal du cinéaste Santiago Bertolino à bord du bateau canadien pour Gaza qui doit prendre la mer en milieu de semaine afin de dénoncer le blocus imposé par Israël. Dernière mise à jour : 11 juillet 2011.

« On lâche pas ! »

St-Nicolas, Crête, Grèce 6 juillet 2011

Mardi, une journée après l’arraisonnement, un sentiment de liberté régnait sur le navire. Grisé par cette expérience collective, sur Facebook j’écrivais « Notre bateau est devenu un havre de liberté et d’autogestion. Les autorités grecques pensent qu’ils nous ont emprisonnés dans notre navire, mais nous sommes autonomes. D’ici, les journalistes continuent d’envoyer leurs articles. On a une génératrice et l’Internet satellite. On peut résister tout en préparant notre prochain tour ! On est tous des capitaines ! »

Depuis quelques jours, les choses évoluent rapidement. Voici un survol de la situation. Le 4 juillet, après notre remorquage forcé jusqu’au port, nous sommes restés une journée sous surveillance. Nous avons dormi sur le navire. Ne connaissant pas notre situation légale, nous nous sommes cloisonnés le temps que nos avocats éclaircissent la situation. Pour des raisons spécifiques, le Tahrir bat pavillon des îles Comores, donc en restant à bord, nous étions protégés par les lois internationales ; cela nous évitait d’être arrêtés. À plusieurs reprises nous avons tenté, en vain, d’obtenir la permission de mettre en marche notre génératrice électrique. Sur le quai, des supporters grecs ont fait un sit-in. De manière générale, les gens du pays sont sympathiques à notre cause. Nous étions forts de cet appui populaire.

À terre, trois personnes du groupe étaient détenues dans le bureau des autorités portuaires. Sandra Ruch a été arrêtée parce qu’elle était la responsable légale du bateau et a permis un départ non autorisé. Michael Coleman et Soha Kneen ont été détenus pour avoir obstrué la voie à la garde côtière avec leurs kayaks.

Au cours de la nuit, l’effet du manque d’électricité s’est peu à peu fait sentir. Les toilettes ne fonctionnaient plus et les piles des ordinateurs portables s’épuisaient une à une. Nous expérimentions l’effet d’un siège. Le lendemain matin, le 5 juillet, sans demander la permission, nous avons remis en marche la génératrice électrique. À notre grande surprise, les autorités n’ont pas bronché, c’était bon signe. Les journalistes ont pu continuer à travailler et diffuser l’info à travers le monde. L’intérêt des médias est toujours là. Cette capacité d’informer la planète en direct par téléphone et internet satellites est une force. Par le biais de cette aventure humaine, on martèle notre message : levons le blocus !

Au cours de la journée, la police insistait pour recueillir nos témoignages. Nous avons réussi à négocier pour que cette procédure soit faite sur le navire. Les enquêteurs cherchaient à déterminer qui était le capitaine au moment de notre petite escapade en mer. À cela, nous nous étions entendus pour dire "we were all captains !". Nous avions établi cette stratégie afin qu’aucune personne en particulier ne soit ciblée. En fin de journée, nos trois camarades en détention ont été relâchés sous promesse de comparaître le jour suivant à la cour. Plus tard, notre bateau a été remorqué jusqu’à la marina, mais il est toujours sous haute surveillance. On a la garde côtière "au cul".

Aujourd’hui, 6 juillet 2011, Sandra Ruch, Soha Kneen et Michael Coleman sont passés en cours. Pour les soutenir, toute la délégation s’est réunie dans ce petit tribunal de district décrépit. Le jugement s’est déroulé en grec, un de nos avocats avait l’air passionné. Dans un envoi Facebook, Manon Massé de la délégation québécoise synthétise la journée ainsi : « Nos trois collègues ont eu 30 jours d’emprisonnement avec sursis. La juge a reconnu la dimension humanitaire de notre mission. Grande victoire ! Ici c’est la fête... ». De plus, on vient d’apprendre que le bateau greco-suédois, le Juliano, a été autorisé à prendre la mer à la condition de rester en eau grecque. On avance étape par étape, on lâche pas ! On a sûrement "une couple" de dieux grecs avec nous ! FREE GAZA !

Le Tahrir arraisonné : quelques observations de l’intérieur

Nous sommes présentement dans le Tahrir, au port. Je dois utiliser la pile de mon ordinateur, le moteur est éteint et l’électricité coupée. Quelques observations en vrac et à chaud...

• Les autorités grecques nous ont remorqués. Nous avons fait 8 milles nautique, nous étions à 4 milles nautiques des eaux internationales.

• Nous avons bravé l’interdiction du gouvernement grec de quitter le port en direction de Gaza. Le bateau respectait les normes internationales, nous avions tous les papiers en règles.

• Le bateau a été arraisonné par les commandos navals grecs. Ils ont endommagé notre bateau en nous remorquant au quai. Il y a une fuite de diesel sur le navire. Le gros bateau de la garde-côtière n’a pas réussi à nous arrêter au début, ce sont des militaires dans un bateau semblable à un Zodiac qui ont sauté sur le navire avec des mitraillettes. Ils ont fait peur aux gens, aux pacifistes à bord, ils ont ensuite pris la cabine du capitaine, et ont pris le contrôle de notre bateau.

• Nous avions décidé de partir à l’improviste, en surprenant le bateau de la garde-côtière voisin au nôtre. Deux kayakistes se sont mis juste en avant du bateau de la garde-côtière ils ont donc perdu un certain temps pour enlever les deux personnes placées en avant du bateau.

• D’après notre avocat grec, tant que nous restons dans le bateau, ce sera correct. Mais si on touche le sol grec nous pouvons nous faire arrêter. Quelqu’un qui est à terre vient de nous livrer de la pizza pour tout le monde...

• Certains militaires avaient l’air de faire la manoeuvre à contre-coeur. Mais cela ne les a pas empêchés en embarquant sur le navire de pointer leurs mitraillettes sur les pacifistes...

Pleins feux sur le Tahrir

Notre histoire a pris l’allure d’un roman d’espionnage. Parce que cette saga m’apparaît de plus en plus irréelle, j’ai décidé de me lancer dans un style hors norme où s’entremêlent fiction et réalité. Cette première partie fait le compte-rendu du déroulement des évènements entre le 28 juin et le 1er juillet 2011. Au moment d’écrire ces lignes, le gouvernement grec interdit tout navire dont la destination est Gaza de quitter ses ports. Nous sommes le 4 juillet 2011, le Bateau canadien vers Gaza s’apprête à appareiller. Pour Stéphan Corriveau l’un des coordonnateurs de la délégation, il s’agit tout simplement de prendre la mer !

« Plein feu sur le Tahrir », partie 1

30 juin 2011 :
[base militaire : quelque part en Israël, fiction ]
Il mit fin à la communication. « Échec » murmura le commandant en chef, comme se parlant à lui-même. Il replaça le BlackBerry dans son étui en cuir attaché à sa ceinture. Machinalement, il ouvrit les stores verticaux de son bureau. Il ne fut point ébloui par la lumière du jour, sa fenêtre donnant sur un immense local où s’affairaient une multitude de technocrates. Au loin, sur un moniteur, on pouvait apercevoir une image satellite des îles grecques avec huit voyants verts qui clignotaient et deux rouges immobiles. Le responsable de l’opération No more freedom for the flottilla réfléchissait à voix haute. « Quel devrait être leur prochain mouvement ? »

30 juin 2011

[Quelque part sur une île grecque, journal de bord, la réalité]
J’ai la vague impression que des gens s’amusent à jouer aux échecs avec nous. Mardi, 10h, je n’ai pas encore conscience de tout ça. Le Tahrir est toujours à quai. Dans la cabine, il y a un premier branle-bas de combat ! Excité par l’arrivée de la cargaison de médicaments, le petit groupe de journalistes s’affairent. Ils questionnent les organisateurs. Caméra à la main, je filme la scène. Un point de presse s’organise. « D’où viennent les médicaments ? Correspondent-ils réellement aux besoins de la population de Gaza ? Avez-vous vérifié les dates d’expiration ? À qui sont réellement destinés ces médicaments ? »

Stéphan Corriveau, l’un des coordonnateurs du projet, et Guido, l’un des deux docteurs de notre délégation, répondent aisément aux questions.

« Le Bateau canadien transportera pour plus de 30 000$ de médicaments, ils ont été achetés en Grèce afin de limiter les coûts de transport. Bien sûr, on vérifie les dates d’expirations. Actuellement, ce qui se passe avec le blocus, c’est que les médicaments sont interceptés par les Israéliens. Ils les stockent dans des hangars. La redistribution se fait au compte-gouttes. Quand les médicaments arrivent dans les hôpitaux à Gaza, ils sont souvent passés date. »

David Heap, un autre coordonnateur du projet, renchérit. « Les Israéliens vont même jusqu’à faire payer aux distributeurs cette étape de contrôle de la marchandise. Oui, évidemment, on est en relation avec des réseaux sociaux qui oeuvrent dans le domaine de la santé, l’équivalent de nos CLSC, ils nous ont bien précisé ce qui leur manque. »

La conférence se termine. Alexandra Szacka fait son « stand up » pour le bulletin de 18h. À ce moment-là, un embargo était en vigueur, aucune image de l’extérieur du navire n’était permise. Rapidement on quitte le bateau. On se sépare en petits groupes qui se dispersent dans la ville. Le comité de coordo ne lésine pas sur la sécurité. David Heap a les yeux cernés. Je ne comprends pas leur stress, je trouve les mesures exagérées. Au moment de déserter les lieux, je remarque que des plongeurs, des bénévoles, inspectent la coque du navire. Je ne saisis pas encore l’ampleur des enjeux.

Vendredi 1er juillet 2011
[Base militaire : quelque part en Israël : fiction inspirée des faits réels]
Blême, mais souriant, l’homme au BlackBerry révise une dernière fois la synthèse des évènements. Il s’agit des grands titres rapportés par les médias de masse. La collecte des données a été effectuée par l’un de ses fidèles bureaucrates au service de l’État.

 Grèce, 24 juin 2011. Le Centre juridique d’Israël porte plainte contre la délégation américaine. Leur bateau mouille dans le port du Pirée. On les accuse de ne pas être correctement déclarés et assurés. Le Audacity of Hope reste cloué à quai et devra subir une inspection technique.

 Grèce, 25 juin 2011. Bonne nouvelle pour la Flottille, un des deux bateaux de la délégation française quitte les côtes de la Corse en direction de Gaza.

 Grèce, 28 juin 2011. Le bateau de la délégation gréco-suédoise, le Juliano, est victime d’un curieux acte de sabotage. L’arbre de l’hélice aurait été tordu. Cela nécessitera plusieurs jours de réparations. Une course contre la montre débute.

 Turquie, 30 juin 2011. Un autre bateau de la flottille est victime d’un acte de sabotage semblable au Juliano. Devant l’ampleur des dommages, la délégation irlandaise devra abdiquer. Le bateau des Irlandais est hors-jeu.

 Israël, 30 juin 2011. Dans un discours, Benyamin Netanyahu évoque les efforts diplomatiques déployés par certains pays pour empêcher la Flottille de Gaza de prendre la mer.

 Grèce, 1er juillet 2011. Le 2e bateau français de la flottille, le Dignité-Al Karama, est lui aussi immobilisé au port. Les autorités portuaires grecques stoppent leurs approvisionnements en fuel. Le gouvernement grec est en train de céder aux pressions israéliennes

 Grèce, 1er juillet. Le ministère grec de la Protection du citoyen publie un communiqué interdisant le départ de toutes les embarcations en partance de ses ports à destination de Gaza.

 Grèce, 1er juillet. L’embarcation américaine The Audacity of Hope décide de défier les autorités grecques et de prendre la mer. La marine militaire l’interceptera à quelques kilomètres à peine de son port de départ. Le bateau est immobilisé en mer.

Au bas du rapport, dans la section commentaire, on y a laisser une note : « La délégation canadienne devrait très prochainement faire face aux méandres de la bureaucratie grecque : dossier à suivre. » L’homme replace sa cravate et quitte les lieux, il a des comptes à rendre. Le ministre de la Défense l’attend.

Vendredi 1er juillet 2011
[Quelque part en Grèce : journal de bord, la réalité]
Le Tahrir est amarré au quai, les plongeurs augmentent la fréquence de leurs inspections. Notre séjour à terre s’éternise... À l’hôtel, les délégués se réunissent, le comité de coordination nous fait le bilan des évènements.

« On a une bonne nouvelle et trois mauvaises. D’abord la bonne nouvelle, un bateau de la flottille a pu prendre la mer ! Oui, bien sûr, nous pouvons applaudir ! Mais en contrepartie, deux embarcations ont été sabotées. Les dégâts seraient probablement causés par les services secrets israéliens. De plus, le navire américain est victime d’une plainte en provenance du Centre juridique d’Israël, un groupe un groupe procolonisation et pro militaire. Les autorités portuaires devront procéder à une autre inspection. Sur les 10 bateaux de la flottille, 7 ont encore une réelle possibilité d’appareiller, mais le gouvernement grec semble céder aux pressions de l’État hébreu. »

L’obsession sécuritaire des organisateurs gagne le groupe. On comprend maintenant leur stress. On se divise en équipe de quatre, des rondes de sécurité auront lieu jour et nuit. En parallèle, une petite équipe met au point un système d’arbre téléphonique afin de réussir à rejoindre toute la délégation. En moins d’une heure, nous devons être en mesure d’effectuer un départ précipité à toute heure du jour ou de la nuit.

À suivre....

En route vers Gaza

Carnet de voyage : Jour 1

[Athène, 17h30 heure locale, 20 juin 2011]
Me voilà arrivé en Grèce, à Athènes. Officiellement, je viens faire du tourisme. Je suis seul. Sac sur le dos et caméra à la main je me rends jusqu’au port du Pirée. J’arpente la ville. C’est seulement dans deux jours que toute la délégation se rencontrera. D’ici là, on s’arrange par soi-même.

Je me sens comme un agent secret qui doit passer incognito. On a reçu l’ordre de ne rien dire à la douane, de ne pas parler de notre mission à des inconnus et surtout de ne pas dévoiler le lieu exact de notre départ. Cette Flottille de la liberté ne fait pas l’affaire de tout le monde et pour s’éviter des problèmes, vaut mieux rester discret.

Le port du Pirée, c’est de là que partent les immenses traversiers pour les îles grecques. Sur le quai, il y a une certaine activité, j’échange quelques mots avec des vendeurs de « cossins ».

J’apprends qu’ils viennent du Bangladesh, ce sont des sans-papiers. Régulariser leurs statuts coûterait trop cher, ils sont pris au piège à survivre de l’économie informelle. Après avoir été tenté par des lunettes fumées roses et de fausses jumelles en plastique made in Taiwan, je leur dis au revoir. C’est décidé, à 21h j’embarque sur un traversier et j’irai visiter une île. Je reviendrai à temps pour le début des ateliers sur la désobéissance civile.

Une belle gang de touristes

Carnet de voyage : Jours 2-3
[Quelque part sur une île grecque, 21 et 22 juin 2011]

Ça y est, je viens de rejoindre la gang d’un bateau canadien pour Gaza. Oui, pour l’instant on ressemble à une belle gang de touristes errant dans une station balnéaire ! Finalement, c’est le 23 que débutent les ateliers de désobéissance civile.

D’ici là, on profite des lieux. Les délégués convergent les uns après les autres au camp de base. Je « chill » avec Michael Coleman, un des trois délégués australiens qui sera avec nous sur le bateau. Il est là depuis quelques jours déjà. On marche le long du port, il m’explique qu’il a 34 ans, qu’il vient de Sydney, qu’il a participé à un projet de solidarité à Naplouse où il a passé plus de 3 mois à travailler avec des jeunes dans un camp de réfugiés...

Tout à coup, il coupe net la discussion et dit « That’s it ! ». Je ne comprends pas tout de suite. « Thats it’s man ! » Je lève les yeux. Wow ! C’est le Tahrir, je suis à contre-jour, le soleil grec m’éblouit, il y a comme une auréole de lumière autour. Tahrir signifie liberté en arabe, il s’agit aussi du nom de la place au Caire où les protestations populaires ont eu lieu, je l’interprète comme un clin d’oeil au printemps arabe.

Cet ancien traversier d’environ 25 mètres est amarré au port, un garde de sécurité est à bord jour et nuit. On ne sait jamais ce qui peut arriver me dit Michael. « Do you remember the explosion of the Rainbow Warrior in 85, the Greenpeace boat... ». En effet, cette histoire est connue, en 1985 les services secrets français avaient coulé le bateau de Greenpeace qui faisait route vers l’île de Mururoa dans le but de perturber les essais nucléaires dans l’océan. Bien que pacifique, si la désobéissance civile fait peur aux gouvernements, c’est peut-être parce qu’elle a un réel pouvoir d’action !?

Nous sommes à environ 5 jours du départ en mer, chez les membres organisateurs le stress est palpable. Depuis un an, beaucoup d’énergie a été investie dans ce projet, des milliers d’heures de bénévolat pour la cause. Imaginez, en moins de 10 mois, des dizaines de levées de fonds ont été organisées dans tout le Canada afin d’amasser les 300 000$ nécessaires à l’achat du bateau. L’autre soir, Sandra Ruch, une des initiatrices du projet, me racontait comment on l’a prise pour une rêveuse au début. 300 000$ n’est pas une somme banale à trouver pour un projet mis en oeuvre par de simples citoyens, mais rapidement les gens ont répondu à l’appel. Pour moi, c’est indéniable, « Un bateau canadien vers Gaza » a véritablement une assise populaire.

Jour 4-5 : Apprivoiser sa peur !

Songeur, posté à l’entrée de mon hôtel, je fixe la mer. Intérieurement, je suis agité. Il y a de l’écume sur les vagues, le vent souffle au large. Le Tahrir est toujours à quai.

Dimanche, on a permis aux journalistes de visiter le navire, on sent qu’on se rapproche du départ.

Lundi à Athènes le comité de coordination du Bateau canadien vers Gaza donne une conférence de presse. Les choses se mettent en place. Ici à l’hôtel, c’est notre dernier jour d’ateliers. D’ailleurs, il est 10h, au lobby il n’y a plus personne. Je bois d’une traite mon triple espresso et cours vers la salle où a lieu le « workshop ».

Depuis 3 jours, nous suivons des cours sur la désobéissance civile pacifique. C’est de l’intensif. La salle est exiguë. On est les uns sur les autres. On devra s’y faire, sur le navire on sera plus d’une quarantaine de personnes dans un espace semblable. À bord, en plus de la trentaine de Canadiens, il y aura des délégués de Belgique, d’Australie, du Danemark, de Turquie, il y aura aussi un petit groupe disparate de journalistes. Parmi eux on retrouvera d’importants reporters : Amira Hass du quotidien israélien de gauche Haaretz, Jim Rankin du Toronto Star et Alexandra Szacka de Radio-Canada.

Le bateau ne fait que 25 mètres de long. Il n’y aura pas de cabine individuelle, qu’un espace commun qu’on devra apprendre à gérer ensemble. Un véritable exercice d’autogestion.

Les ateliers sont très demandant psychologiquement. Lee A. McKenna, une ontarienne reconnue pour son travail de médiation en zone de conflit, assure notre formation. C’est un traitement-choc qu’elle nous offre. Le cours est à peine commencé qu’elle nous propose déjà d’extérioriser nos peurs. « Mettez-vous en équipe de deux et évoquez à votre partenaire le moment où vous avez eu le plus peur dans votre vie ! »

Sans réfléchir, on exécute l’exercice. Quelques minutes plus tard, nous revenons en groupe et mettons nos confidences en commun. À midi, on prend une pause ! Rapidement, on entend un brouhaha dans la salle. Les gens se parlent, rient, échangent des sourires... La magie de Lee McKenna a opéré. Une complicité de groupe vient d’être créée.

Exprimer sa peur, pour mieux l’apprivoiser. Pour Lee, « les gens doivent expérimenter leurs terreurs, leurs peurs. Pour ce faire, ils doivent parler de ces moments de frayeurs, se remémorer comment leur corps a réagi. »

– « À ce moment-là je suais, mes genoux tremblaient, je me sentais lourd, mes jambes étaient de plomb. »

– « Yes I remember what’s it feels like. »

On nous prépare à envisager le pire des scénarios et à y faire face stratégiquement. Il faut élaborer une stratégie de groupe, bien s’entendre sur les méthodes de résistance non violente. Comment réagir si les militaires montent sur le bateau ? Quels sont les endroits à bord les plus sécuritaires au moment d’une attaque éventuelle ? Établir une équipe médicale, etc.

Ces articles sont tirés du site web du journal Métro

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