Les mots sont certainement mal choisis. Il faut laisser tomber ce point non nécessaire. Il est en effet plus que temps. Mais il faut viser une cible pour ne pas tirer dans le vide. Mon article sur la manifestation sur le climat tentait d’expliquer pourquoi. Je précise sous forme de brèves thèses :
1. Une manifestation de 50 000 sur le climat et une pétition de près de 200 000 témoignent de l’équivalent d’un moment « moi aussi » comme le dit Francine Pelletier dans sa chronique du Devoir du 14 novembre. Il faudrait vérifier mais j’ai l’impression d’une première mondiale.
2. C’est l’initiative d’un « mouvement citoyen », c’est-à-dire animé par un groupe ad hoc de gens médiatiquement connus, non démocratiquement redevable et utilisant les réseaux sociaux, qui a su saisir le moment (canicule, tornade, feux, réfugiés) ce que n’a su faire le mouvement écologiste enlisé dans la concertation et la dépendance budgétaire.
3. Québec solidaire a incarné ce tournant sur la scène électorale mais n’a pas fait et ne fait pas encore la liaison avec le parti de la rue. Ce qui a retardé sa liaison avec « La planète s’invite... » et l’a réduite lors de la manif à une affaire d’étendards sous le vent sans message par bannières, pancartes ou tracts.
4. Ce mouvement se moule à l’opinion publique sans le porter en avant par un noyau de revendications précises, se contentant d’appels pour des gestes individuels et une interpellation des gouvernements pour faire du climat une priorité sans plus de précision.
5. Les gouvernements (et leurs oppositions officielle) surfent la vague en participant aux manifs, en dialoguant avec les organisateurs (et en les menant en bateau), en approuvant des déclarations (DUC) tout en ne prenant aucun engagement concret puisqu’on ne leur en demande aucun.
6. Comme les institutions durent et que les mouvements s’essoufflent à moins d’objectifs clairs et précis soutenus par un plan d’action en escalade, les gouvernements s’en tireront au pire avec des éraflures tandis que la vague populaire refluera dans l’amertume approfondissant le cynisme politique ambiant.
7. Québec solidaire, avec le succès de sa performance électorale basée sur la priorité donnée à la crise climatique, est en mesure de corriger le tir en mettant de l’avant une ou un noyau de revendications concrètes et précises qui peuvent donner le souffle de la durée au mouvement climatique
8. Ce mouvement climatique, s’il se pérennise, peut se transformer en grand mouvement écologique urbain qui, avec son complément anti-hydrocarbure surtout hors urbain, serait en mesure de devenir l’épine dorsale du mouvement social québécois et même du mouvement indépendantiste.
9. La revendication de la gratuité du transport en commun sort du lot par sa popularisation réussie lors de la campagne électorale, à preuve sa reprise édulcorée par les Libéraux et le PQ. Cet acquis ne doit pas être laissé à refroidir.
10. Ce fut déjà une erreur de ne pas le remettre en circulation en appuyant haut et fort la pétition pour la gratuité du transport en commun pour les sorties scolaires provenant du monde de l’enseignement primaire-secondaire, ce qui pourrait créer une synergie entre mouvements climatique et syndical.
11. La revendication de la gratuité du transport en commun est une brèche ouverte sur la révolution du transport qui est le secteur où le bât blesse en termes d’émanations de GES au Québec.
12. Mais à cet égard, le plan de transition Solidaire s’est vautré dans le cloaque du capitalisme vert suite à un processus d’élaboration peu démocratique d’où la nécessité de le réviser en vue du congrès de décembre 2019 ou en 2020 et donc de ne pas le mettre en évidence d’ici là.
Marc Bonhomme, 15 novembre 2018, www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.c a
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