Édition du 18 juin 2024

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Québec

« C’est trop ! », « Un fardeau ! », « Y a des abus ! » - Québec solidaire, le droit d’asile et l’immigration

Après avoir méthodiquement coupé le financement des services publics et en chute libre dans les sondages, le gouvernement Legault reprend une recette éculée de la droite la plus réactionnaire et se lance dans une surenchère xénophobe. Les migrant.es et plus récemment des demandeurs et les demandeuses d’asile en particulier sont systématiquement associé.es à la crise du logement, au débordement des services d’urgence, aux classes d’écoles surchargées, au développement de « groupes criminalisés » etc.

Loin de dénoncer cette instrumentalisation de l’immigration et la persécution des demandeurs d’asile, Québec solidaire, sans vergogne, sans aucune donnée, sans même questionner celles du gouvernement, sans aucun égard pour les obligations internationales du Québec, reprend haut et fort cet argumentaire xénophobe.

«  500 000 travailleurs temporaires », « c’est trop… ce n’est pas raisonnable » affirme ainsi le 25 janvier, le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois . « Le Québec a fait plus que sa part en matière de demandeur d’asile » ; « y a un fardeau.. y a des abus… y a un impact… c’est mathématique…c’est clair, on va se le dire  », martèle à son tour, pendant plus de cinq minutes, Guillaume Cliche-Rivard avocat et porte-parole de Québec solidaire en matière d’immigration, lors d’un entretien avec un fervent défenseur des « valeurs québécoises », Mario Dumont, qui opine du chef et boit du petit lait.

Et quelle est la solution de Québec solidaire ? « Notre position n’a pas changé : Québec solidaire réclame depuis longtemps un changement de modèle basé sur des études, et élaboré avec l’appui des expert.es et des groupes » ; tout en affirmant, qu’il ne faut pas dépasser un quota de 80 000 résidant.es permanents par an. Pourquoi ce chiffre ? On ne sait pas.

On sait en revanche que quelques jours plus tard, le 1er février, la Ministre de l’immigration, Christine Fréchette, reconnaissait sur Radio-Canada qu’elle n’avait aucune donnée permettant d’appuyer l’idée d’un quelconque lien entre les demandeurs d’asile et les classes surchargées, par exemple. Dans le même sens, le 5 février, on apprenait que le gouvernement Legault gonflait artificiellement le nombre de demandeurs et demandeuses d’asile au Québec et qu’il n’avait absolument aucune idée de si elles ou ils avaient pu bénéficier de services sociaux du Québec ou si elles ou ils avaient préféré quitter le Québec pour d’autres Provinces, peut-être plus accueillantes.

Pendant ce temps, le Conseil du patronat du Québec, chiffres et études à l’appui quant à lui, relève que « les villes du Québec ayant le plus faible taux d’inoccupation se trouvent en région, là où le pourcentage de population immigrante est le plus bas » et « rappelle que l’immigration est une solution à nos enjeux, et non un obstacle » .

Alors, quand le patronat défend une politique migratoire plus ouverte que le parti qui se prétend le plus à gauche de l’échiquier politique, il semble effectivement plus que temps d’exiger des porte-paroles de Québec solidaire qu’ils fassent des études et qu’ils se renseignent. Cela permettrait peut-être d’éviter qu’ils attribuent sans aucune preuve des responsabilités aux demandeurs et aux demandeuses d’asile et plus largement aux migrant.es dans la crise du logement, dans la surcharge des services publics de santé et d’éducation et surtout qu’ils cessent d’alimenter ce discours xénophobe nauséabond.

A minima, ils pourraient commencer par s’engager à respecter les engagements internationaux et rappeler que les États sont juridiquement tenus d’accueillir les demandeurs et demandeuses d’asile et d’examiner leurs demandes. A minima toujours, ils pourraient revendiquer la résidence permanente à des travailleurs et des travailleuses temporaires éhontément exploité.es, victimes de « discrimination systémique » selon un rapport de 2010 de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse (CDPDJ) et soumis.es à un programme qualifié en 2023, par un rapporteur des Nations Unies, comme « un terreau pour des formes d’esclavage modernes ».

Après, si un parti de gauche souhaitait développer une politique d’immigration « de gauche », on rappellera que la régularisation des personnes sans statut, la libre circulation, l’ouverture des frontières, la lutte contre la xénophobie et la solidarité internationale ont fait partie, historiquement, des critères pour se revendiquer de gauche.

Camille Popinot

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