Édition du 19 novembre 2024

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Politique québécoise

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Je vous le mentionnais dans mon dernier billet, c’est ce matin que la FIQ présentait ses recommandations (http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/AudioVideo-37183.html) quant aux mesures contenues au projet de loi 16, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de santé et de services sociaux afin notamment de resserrer le processus de certification des résidences pour personnes âgées.

La question de la certification des résidences privées a été maintes fois abordée par les médias depuis le début des consultations sur ce projet de loi et vous savez probablement déjà que l’application de plusieurs des mesures qui y sont proposées par le gouvernement se fera à partir de critères à déterminer ultérieurement. Qui ? Quand ? Quoi ? Où ? Comment ? Aucune garantie quant à la qualité et à la sécurité des soins que recevront nos ainés, mais on sait que les entreprises privées y trouveront leur compte !

En matière de flou artistique, peut-on trouver mieux ? Tout à fait ! Et cela, à l’intérieur du même projet de loi qui, dans sa seconde partie, touche la fonction d’approvisionnement en biens et services.

La fonction d’approvisionnement se résume, grossièrement, à la standardisation et à la normalisation des achats qui pourront ainsi s’effectuer en regroupement. Se regrouper pour acheter et profiter d’économies de volume, c’est le principe « Costco » appliqué au réseau de la santé et des services sociaux. Un système déjà en place dans le réseau depuis quelques années et connu sous le nom de « groupes d’approvisionnement en commun » et au sujet duquel le ministère ne dispose que de très peu d’information. Si peu, en fait, que le Vérificateur général concluait, en 2008, que « le MSSS et les agences ne peuvent déterminer s’il vaut la peine de faire appel à de tels groupes. »

Jusqu’ici, ça va ? Vous me suivez toujours ? Les quelques prochains paragraphes pourraient paraitre ardus, mais ça en vaut la peine !

Donc, avec le projet de loi 16, le ministre de la Santé et des Services sociaux vient se doter du pouvoir de réduire de façon importante le nombre de groupes d’approvisionnement en commun, en fusionnant les groupes existants à sa guise et en obligeant les agences régionales à en imposer l’utilisation aux établissements. Ceci aurait pour effet d’augmenter considérablement le volume d’achats de chaque groupe d’approvisionnement et, du même coup, les économies de volume possibles.

On peut se questionner sur la pertinence des économies qui pourraient ainsi être réalisées lorsqu’on met dans la balance le fait que des établissements se trouveront encore plus éloignés des centres de décision en matière d’approvisionnement selon leurs besoins spécifiques ou encore le tort qui sera causé aux économies locales et régionales. Des questions sur lesquelles le débat reste à faire.

Quelle pourrait donc être, alors, la motivation principale du ministre de la Santé dans ce dossier ? Pourquoi ceci ? Pourquoi maintenant ? Et surtout pourquoi tenter de le passer en douce dans un projet de loi sur les résidences privées pour ainés ?

Poussons un peu plus loin la réflexion, si vous le voulez bien. On sait qu’Ottawa mène présentement des négociations devant mener à la conclusion d’un accord de libre-échange avec l’Union européenne. On sait que parmi les demandes les plus pressantes des négociateurs européens s’en trouvent qui concernent le secteur de la santé.

On sait également qu’à partir d’un certain seuil minimum, les achats de biens et services seraient obligatoirement soumis aux règles d’un tel accord. Or, selon les informations qui circulent, ces seuils minimums seraient facilement atteignables en concentrant le volume d’achats au sein d’un nombre réduit de groupes d’approvisionnement.

Maintenant, considérons que la définition de « biens et services » comprend ici les ressources humaines tout autant que le matériel et le béton. Sachant que des multinationales de placement temporaire sont déjà très présentes en Europe, on peut s’attendre à ce que celles-ci cherchent à s’implanter au Québec. Et des multinationales qui contestent les lois et pratiques en vigueur sur un territoire sous prétexte que celles-ci nuisent à leur fonction première qui est de rapporter un profit à leurs actionnaires, ça vous rappelle quelque chose ?

Il y a une semaine aujourd’hui, la Commission européenne était saisie d’une plainte à l’encontre de l’État français « pour atteinte à la libre concurrence des établissements de santé et « aides illicites au profit des établissements publics » ». Le contexte peut sembler différent, mais le principe demeure le même.

Le gouvernement Charest s’est servi d’un projet de loi explicitement destiné aux résidences privées pour ainés afin de dissimuler des mesures qui risquent d’ouvrir le réseau de santé public québécois aux entreprises privées multinationales comme il ne l’a jamais été auparavant. Tout cela en douce. Et les implications qui pourraient en découler sont terrifiantes.

Encore un bel exemple de la façon de faire du gouvernement Charest, un gouvernement avec les deux mains sur le volant et une destination claire : la privatisation des services publics.

Mémoire présenté par la FIQ : « Servir l’âge d’or sur un plateau d’argent » http://www.fiqsante.qc.ca/projet-de-loi-16

Régine Laurent

Présidente

Porte-parole officielle de la Fédération Interprofessionnelle de la santé du Québec.

Responsable : Communication-Information

Parcours syndical et professionnel

Diplômée du Collège du Vieux-Montréal en soins infirmiers

Infirmière depuis 1980 à l’Hôpital Santa Cabrini

Militante syndicale depuis 1984

Secrétaire au sein du comité exécutif de la FIQ de 1991 à 2001

Militante syndicale locale à l’Hôpital Santa Cabrini de 2001 à 2005

Présidente de l’Alliance interprofessionnelle de Montréal (AIM) de 2005 à 2009

Présidente de la FIQ depuis juin 2009

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