Paru sur le site Fourth International.
Thousands of people gather for a protest outside a court Athens, October 7, 2020. (Yorgos Karahalis/AP)
Déclaration de l’OKDE-Spartakos
Des dizaines de milliers de travailleurs, de membres de syndicats et d’organisations politiques, de chômeurs, d’immigrants, de jeunes, d’antifascistes, ont érigé un mur contre la barbarie fasciste et mis un terme à un cycle historique, envoyant Aube Dorée et ses ramifications en prison et dans les poubelles de l’histoire. Pavlos et Sahzad, mais aussi les juifs de Thessalonique et de Ioannina, les assassinés de Kalavrita et de Viannos, les héros de Kokkinia et de Kalogreza se sont levés et ont crié avec nous. C’est une claire victoire de classe, une victoire absolument nôtre.
Les néonazis n’ont pas été condamnés grâce au caractère prétendument démocratique du gouvernement. Le gouvernement de Mitsotakis, comme le gouvernement de Samaras avant lui, a été contraint de rompre ses liens consanguins avec les nazis et de les traîner en justice sous le poids de la lutte antifasciste massive et multiforme qui, en particulier après l’assassinat de Fyssas, s’est transformée en avalanche dans chaque ville et quartier du pays. La Nouvelle Démocratie ne s’est pas soudainement intéressée à nettoyer la société des assassins fascistes qui pendant tant d’années ont agi sans être dérangés avec le soutien ouvert de la police, le soutien financier des armateurs et des patrons et le blanchiment par les médias systémiques. La bourgeoisie craignait que le mouvement antifasciste ne se transforme en un soulèvement de classe généralisé et a donc décidé qu’elle ne pouvait pas, à ce stade, investir dans le fascisme.
Les néo-nazis n’ont pas plus été condamnés par l’antifascisme lâche et institutionnel de SYRIZA. L’invocation constante à la démocratie bourgeoise et à la normalité, surtout dans des conditions des mémorandums et de la dépréciation du parlementarisme et du système politique, n’a réussi qu’à faire apparaître les nazis comme ceux qui combattent « contre tout ». Pire encore, la tolérance institutionnelle appuyée du gouvernement SYRIZA et le retard dans la conduite du procès ont agi comme du vent dans les voiles du gang nazi.
La condamnation d’Aube Dorée est exclusivement une conquête du mouvement antifasciste de classe. Il y a quelques années, les nazis semblaient invincibles et puissants dans les rues et dans les quartiers. Le rôle conscient des organisations politiques qui ont souligné la nécessité d’un mouvement politique antifasciste de front uni, de comités et d’assemblées antifascistes, l’action de masse, voire la confrontation physique avec le gang nazi ; la contribution inestimable des avocats dans le contentieux civil devant les tribunaux ; l’instict de classe au sein des quartiers populaires et des lieux de travail ; les réflexes antifascistes de la jeunesse ; la mémoire collective des atrocités des Nazis ; le sentiment démocratique de masse qui enflamme encore chaque année la majorité du peuple à l’anniversaire de la révolte de l’Université polytechnique : tout cela a créé une situation complètement différente en quelques années.
Le mouvement antifasciste a mûri de manière impressionnante ces dernières années et cela nous emplit d’espoir. En tant qu’OKDE-Spartakos, pendant des décennies, bien avant qu’Aube Dorée ne devienne un parti parlementaire, nous avions déchiffré le phénomène fasciste avec ses particularités historiques et souligné au mieux de nos capacités l’urgence d’y répondre, loin de la logique des fronts "démocratiques" interclasses, ainsi que des visions de la violence fasciste comme supplétif "simplement" para-étatique ou simpliste de la répression étatique, l’arbitraire des employeurs, la violence du chômage ou le conservatisme social. La contribution à la compréhension du phénomène et les nombreuses années de participation conséquente aux mobilisations antifascistes nous amène à nous considérer comme partie organique de ce mouvement beaucoup plus large qui a vaincu Aube Dorée.
La victoire historique du 7 octobre ouvre de nouvelles perspectives pour l’antifasciste et le mouvement de classe en général. Il est évident que ND, voulant se présenter comme un garant de « démocratie et normalité » mettra en avant la rhétorique de la « théorie du fer à cheval ». La répression et la dispersion du rassemblement d’hier à Athènes montrent que le gouvernement ne peut tolérer des dizaines de milliers d’antifascistes célébrant la condamnation des nazis. L’interdiction de toute mobilisation montre dernièrement son attitude envers ceux qui combattent. Il ne tient qu’à nous de ne pas laisser le mouvement être étouffé.
La lutte contre le racisme et les mythes nationalistes reste pertinente et importante. Après l’écrasement d’Aube Dorée, nous allons également écraser la politique d’extermination des réfugiés et des immigrés, les idées nationalistes de grandeur et d’expansion et la course aux armements contre la Turquie et le reste de nos voisins, le sexisme et le patriarcat, les divers soi-disant "indignés" d’extrême droite qui tenteront de combler le vide laissé par Aube Dorée. Il n’y a pas de temps pour le repos, mais il n’y a pas non plus de temps pour le pessimisme. Tout est devant nous.
Athènes, le 8 octobre 2020.
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