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Fidèle à la devise des potentats africains : « On n’organise pas une élection pour la perdre », le président de la République Macky Sall a entrepris un véritable coup constitutionnel en repoussant le scrutin à décembre 2024 à quelques heures de l’ouverture électorale officielle.
Le plan A échoue
Après la révision de la Constitution en 2016, le président Sall avait bien tenté de briguer un troisième mandat mais en vain, au vu des oppositions tant à l’intérieur du pays qu’à l’international. Il a donc désigné son dauphin, l’actuel Premier ministre Amadou Ba. Cette décision solitaire a suscité mécontentements et oppositions. Ainsi le camp présidentiel s’est divisé et affaibli avec l’apparition de candidatures dissidentes.
Bien que le président sortant ait préparé le terrain en écartant du jeu électoral son principal concurrent Ousmane Sonko, en dissolvant son parti le PASTEF (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité), en emprisonnant des dizaines d’opposantEs et en muselant la presse libre, la candidature de son protégé ne fait pas recette. Et le candidat Bassirou Diomaye Faye lui-même emprisonné, qui remplace Sonko, a des grandes chances d’emporter le scrutin.
Un véritable cauchemar pour les élites sénégalaises, car le programme du PASTEF vise à rompre les amarres avec l’ancienne puissance coloniale, se traduisant notamment par la sortie du franc CFA, la fermeture de la base militaire française et l’adoption d’une politique indépendante de l’hexagone.
Le plan B s’écroule
Devant une telle situation, bon gré mal gré, Macky Sall se doit d’intégrer dans son plan la candidature de Karim Wade, le fils de l’ancien président. Il a dû s’exiler pendant de longues années à la suite des affaires de corruption. Mais si un temps Sall et Wade s’opposaient, nécessité faisant loi, leur union contre les partisans de Sonko se scelle. Mais coup de théâtre, la presse révèle la double nationalité française et sénégalaise de Wade, entraînant l’annulation de sa candidature par le Conseil constitutionnel. Les députés de son parti contre-attaquent et exigent une commission d’enquête sur des allégations de corruption de deux juges de cette juridiction. Second coup théâtre, les députés du camp présidentiel votent pour. Ainsi, Macky Sall profite de cette situation, que ses partisans ont créée, pour parler de crise institutionnelle et repousser les élections.
Après avoir fait virer les députés de l’opposition par la gendarmerie, la majorité de l’Assemblée nationale valide la nouvelle date du scrutin au 15 décembre et le prolongement présidentiel d’autant. Soit dix mois, un délai suffisamment long pour permettre à Macky Sall de rebattre les cartes afin que les résultats électoraux soient conformes à ses desiderata. Tel un joueur annulant la partie au motif qu’il n’a plus d’atout dans son jeu ! Désormais, tout est possible y compris que la rue renverse la table.
Paul Martial
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